Horlogerie: non, l’entrée de gamme n’est pas morte!

Raffi Balyozyan, Genthod Global Wealth Management

2 minutes de lecture

Une analyse de l’évolution de la demande horlogère par gamme de prix.

Les exportations horlogères suisses sont reparties de l’avant en 2017 avec une hausse de 3%, après une année 2016 en chute libre de 10%. A y regarder de plus près, le rebond vient notamment de la tranche haut de gamme (montres au-delà de 3'000 francs) qui performe de 3% en valeur, certes grâce à des bases de comparaisons favorables, tandis que l’entrée de gamme (de 0 à 200 francs) est en déclin de 12%.

L'entrée de Gamme n'est pas une spécialité Suisse

Mais la réalité en est tout autre. Tout d’abord, la Suisse est focalisée sur les produits à hautes valeur ajoutée – les montres  haut de gamme de plus de 3'000 francs représentent 65% des exportations en valeur. Par conséquent, l’entrée de gamme n’est pas une spécialité Suisse et le sera d’autant moins avec l’avènement de la montre connectée. De plus, nombreux horlogers suisses qui commercialisent des montres à moins de 200 francs assemblent la plupart des composants à l’étranger (principalement en Asie). Il va de soi que l’entrée sur le territoire Suisse n’est pas nécessaire pour l’assemblage final, cela ne se reflète donc pas dans les chiffres d’exportations publiés par la fédération horlogère suisse.

Le Succès se juge par la bourse

On peut également juger le succès de cette catégorie de prix par le cours de bourse des sociétés spécialisées dans l’entrée de gamme. A titre d’exemple, l’horloger américain Movado (licence des marques Hugo Boss, Tommy Hilfiger, Lacoste, etc.) affiche une excellente santé avec une performance du titre de +20% sur les 3 derniers mois et un chiffre d’affaires en hausse de +6% au troisième trimestre 2017 par rapport à la même période en 2016. Le groupe grec Folli Follie a vu ses ventes de montres et bijoux augmenter de 11% sur les 9 premiers mois de 2017 comparés aux 9 mois 2016 avec une progression du cours de bourse de +11% en 3 mois. Enfin, la marque horlogère japonaise Seiko a enregistré une croissance de plus de 5% de sa division horlogère. L’action a quant à lui décroché de -7% sur les 3 derniers mois après un fort rebond de +55% en 2017. En comparaison, les ventes du groupe Richemont ont progressés de l’ordre de +6%  sur les 6 derniers mois de 2017 soit une accélération des ventes proche de celle des horlogers cités précédemment accompagné d’une performance boursière mitigée sur les 3 derniers mois.

De nombreuses marques continuent à émerger

Les publications trimestrielles des sociétés cotées permettent d’établir une tendance pour la gamme de prix dans laquelle une entreprise opère. Par conséquent, nous constatons que l’entrée de gamme n’est pas en retard sur le haut de gamme mais bien au contraire. En effet, de nombreuses marques horlogères d’entrée de gamme continuent à émerger aux quatre coins du monde, et ce, malgré la barrière à l’entrée de l’industrie. Ces nouvelles marques veulent démocratiser la fréquence d’achat d’une montre afin que celle-ci soit en symbiose avec la garde-robe de notre quotidien. L’émergence des réseaux sociaux et de la vente en ligne favorise largement cette nouvelle tendance d’autant plus que les revendeurs traditionnels sont prudents vis-à-vis de leur niveau de stocks et ne peuvent accueillir qu’un nombre de marque limité qui sont pour la plupart (des marques) déjà établies.

En conclusion, nous assistons non seulement à un retour confirmé de la demande pour le haut de gamme mais également de l’entrée de gamme. Nous constatons en revanche une bipolarisation de l’offre prix qui se fait davantage ressentir au détriment du milieu de gamme. Rappelons que les chiffres d’exportations ne concernent pas les ventes mais uniquement les exportations depuis la Suisse et ne se traduisent pas systématiquement par une vente.