Gestion d’actifs et ESG: un défi clé pour les institutions publiques

Yves Hulmann

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Jean-Christophe Van Tilborgh explique comment les Retraites Populaires intègrent les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance.

Jean-Christophe Van Tilborgh, directeur des investissements chez Retraites Populaires.

L’intégration des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) est une question qui se pose désormais à l’ensemble des gérants d’actifs. L’enjeu est d’autant plus important pour les institutions à caractère public qui pratiquent la gestion d’actifs. Celles-ci doivent rendre des comptes non seulement à leurs investisseurs mais aussi au public dans son ensemble. Le Forum Swiss Funds & Asset Management, qui s’est tenu vendredi à Berne, a été l’occasion d’aborder ces aspects avec les interventions d’Andréa Maechler, membre de la direction générale de la Banque nationale suisse (BNS), et de Jean-Christophe Van Tilborgh, directeur des investissements chez Retraites Populaires.

BNS: un portefeuille en actions de 150 milliards de francs.

Du côté de l’institut d’émission, Andréa Maechler a rappelé que la BNS gérait son portefeuille de manière avant tout passive. Pour des raisons de réputation, l’institut ne peut pas encourir de risque en pariant sur telle ou telle catégorie d’actifs. Une approche très diversifiée qui comporte néanmoins quelques exceptions: son univers d’investissement, qui compte quelque 6’000 entreprises, réplique à hauteur d’environ 97% la composition des indices en actions mondiales. Et les 3% restant? L’institut exclut, d’un côté, certaines actions bancaires – la BNS voulant éviter tout conflit d’intérêt étant donné les informations spécifiques dont elle dispose à propos de ce secteur – ou des titres suisses. De l’autre, la BNS exclut de son univers d’investissement les entreprises qui fabriquent des armes internationalement condamnées, qui violent des droits humains fondamentaux ou qui causent de graves dommages à l’environnement.

La liste des sociétés exclues n’est pas publiée par la BNS.

Pour autant, la BNS ne cherche pas à définir des normes dans un sens politique. «La BNS se limite à exclure les entreprises qui violent des normes largement reconnues par la société dans son ensemble». La BNS publie une quantité importante de détail sur les principes qu’elle applique, souligne Andréa Maechler. Toutefois, elle ne publie la liste des sociétés exclues de son univers d’investissement.

Exclure ne suffit pas, maintenir le dialogue est aussi essentiel.

Du côté des Retraites Populaires - qui gèrent quelque 25 milliards de francs d’actifs, dont un quart en actions -, l’institution pratique une approche un peu différente en ce qui concerne la prise en compte des critères ESG. «Nous appliquons pour l’essentiel les mêmes critères que ceux qui sont définis par l’ASIR (ndlr: Association suisse pour des investissements responsables)», a expliqué en marge de la manifestation Jean-Christophe Van Tilborgh, le directeur des investissements de Retraites Populaires. Il ne cache pas que dans un contexte de forte pression sur les coûts et de l’attente de rendements d’au moins 3% en francs, le fait de devoir tenir compte des critères ESG représente aussi une contrainte supplémentaire. «Intégrer les critères ESG est quelque chose qui prend beaucoup de temps. Mais cela peut aussi éviter des déconvenues plus tard avec certaines sociétés», poursuit-il. 

Pratiquement, l’intégration des critères ESG s’effectue en tenant compte de quatre aspects. Premièrement, avec l’évaluation des sociétés selon ces aspects. Deuxièmement, en dialoguant avec les entreprises («engagement»). Troisièmement en appliquant des critères d’exclusion et, quatrièmement, l’inclusion. «La partie engagement est particulièrement importante, car on ne peut pas toujours se contenter d’exclure certaines sociétés», poursuit Jean-Christophe Van Tilborgh. «Beaucoup d’entreprises sont à la fois une partie du problème et aussi une partie de la solution. On ne peut pas exclure toutes les entreprises qui émettent du CO2. Maintenir le dialogue avec ces sociétés reste dès lors très important», juge-t-il.

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