Les néobanques se présentant comme vertueuses pour l’environnement se contentent difficilement de leurs belles promesses pour se développer et doivent aussi axer leurs discours sur la performance de leurs placements ou s’adosser à d’autres acteurs financiers.
Les deux sociétés de la «fintech» française sur ce créneau, Helios et Green-Got, illustrent ce phénomène.
La première a annoncé mi-mai son rachat par le spécialiste français du crédit à la consommation en ligne Younited, à même de lui apporter son million de clients et des relais en Italie, en Espagne et au Portugal.
«On change complétement d’échelle», souligne auprès de l’AFP la dirigeante d’Helios Maeva Courtois, pour qui ce rapprochement avec Younited «donne assez peu de chances aux autres acteurs» de ce marché.
En face, Green-Got tient toujours à son indépendance.
Pour grossir, la néobanque a choisi de mettre sur le même plan performances financières et environnementales: «faites grandir votre épargne, en construisant un monde durable», c’est le «double profit» vanté par la «fintech» sur son site internet.
«Ce qui compte c’est d’offrir un service de qualité, qui se différencie via le plan environnemental et pas que, en ayant aussi des tarifs qui sont compétitifs, une offre qui est avantageuse», égrène Joseph Choueifaty, cofondateur de la société spécialisée dans l’investissement responsable Goodvest. Et bien sûr en matière d’épargne, de «bonnes performances», ajoute-t-il.
Par affinité
Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche et le recul européen sur un certain nombre de normes environnementales ont depuis quelques mois relégué au second plan les discours attentifs à l’environnement.
«Le sujet est provisoirement un peu moins à la mode», admet M. Choueifaty, «mais du côté des consommateurs particuliers, la sensibilité aux enjeux environnementaux n’a pas du tout baissé», affirme-t-il.
Les quelques pas en arrière «nous donnent encore plus de conviction dans le fait qu’il faut qu’on avance», appuie Ivan Chaleil, nouveau président du directoire de la banque coopérative La Nef.
Le positionnement «affinitaire» autour de l’identité durable, éthique, responsable de ces acteurs, numériques comme physiques, séduisant naturellement une communauté de clients avec des valeurs solidement ancrées, reste une force, conviennent les professionnels interrogés par l’AFP.
Ils permettent notamment d’attirer des clients plus enclins à en faire leur banque principale, offrant davantage de rentabilité que des utilisateurs occasionnels.
Les valeurs permettent aussi de justifier plus facilement un système d’abonnement payant, plus difficile à faire en entrée de gamme pour les banques en ligne plus classiques, comme BoursoBank ou Revolut.
Le coût d’acquisition de nouveaux clients, qui arrivent plus facilement à la faveur du bouche à oreille qu’après avoir été exposé à une publicité, est par ailleurs plus faible.
Taille critique
Le besoin de grossir demeure néanmoins clé pour Helios et Green-Got, aujourd’hui non rentables: il faut à tout prix des revenus pour compenser les coûts informatiques et juridiques faramineux mais indispensables à toute société financière, avant d’espérer dégager un bénéfice.
«Si vous ne faites que de la bancarisation en France, et que vous n’avez pas la taille critique, il y a une valeur marché qui est quand même assez faible avec des modèles de rémunérations qui sont tendus»,observe auprès de l’AFP Pascal Pouyet, directeur général du Crédit Coopératif.
Le contingent de convaincus suffit-il? «L’angle +écolo+ c’est très bien, mais (...) on va vite à arriver à un plafond de 200.000 personnes», estime la cofondatrice de Green-Got Maud Caillaux, un peu juste pour atteindre le milliard d’euros d’actifs que la société vise d’ici fin 2026.
«La base +écolo+ représente une grosse partie de la population en proportion par rapport aux nombre d’acteurs bancaires, fintech, qu’il y a sur le marché», tempère le patron de Goodvest, «encore faut-il savoir lui parler, l’atteindre...»