Cette semaine sur les marchés – Rien ne presse pour la Fed

Andrew Craig, BNP Paribas Asset Management

2 minutes de lecture

Lors de son dernier discours, le gouverneur Waller a indiqué que les données économiques récentes suggéraient qu’il serait opportun que la Fed réduise le nombre de baisses de taux prévues en 2024.

Christopher Waller, l’un des gouverneurs de la Réserve fédérale américaine (Fed), a développé un don pour que ses prises de paroles aient un certain effet sur les orientations du marché. «Rien ne presse», déclare-t-il lors de sa dernière allocution. M. Waller a indiqué que les données économiques récentes laissent à penser que, selon lui, il n’y a aucune urgence à ce que la Fed commence à réduire ses taux directeurs.

Au sein du Comité de politique monétaire de la Réserve fédérale (FOMC), le gouverneur Christopher J. Waller s’est forgé une réputation en tant que baromètre fiable du sentiment au cours des deux dernières années. Il suffit de passer en revue les titres de ses discours au cours des six derniers mois pour avoir un bon aperçu de l’évolution récente de l’économie américaine.

«C’est soit l’un, soit l’autre»

Le 18 octobre 2023, le gouverneur Waller évoquait le conflit apparent entre, d’une part, la vigueur de l’économie américaine au troisième trimestre 2023, et, d’autre part, les progrès continus vers l’objectif d’inflation à 2% fixé par le Comité de politique monétaire de la Réserve fédérale (FOMC). Il estimait qu’il n’y avait que deux scénarios possibles : soit l’activité économique américaine allait ralentir, soit la progression vers une réduction de l’inflation cesserait.

… Et le ralentissement économique l’a emporté

Ses dires semblent avoir eu de l’effet. Fin novembre, M. Waller soulignait que les données économiques américaines faisaient état d’un ralentissement au quatrième trimestre 2023, avec une inflation pourtant restée trop élevée. Ce discours accommodant fut de bon augure par rapport au changement de cap opéré par le président Powell lors de la conférence de presse du FOMC de décembre, puisqu’au cours de celle-ci, il a surpris les investisseurs en indiquant sans aucune ambiguïté que la banque centrale américaine envisageait des baisses de taux beaucoup plus tôt que le marché ne l’avait prévu.

Les données sur l’inflation américaine de ce début d’année suggèrent que le revirement du président Powell en décembre était peut-être prématuré. A l’époque, cela avait incité les marchés à envisager une année 2024 avec six à sept baisses de taux de la part de la Fed. Depuis, du fait de données révélant une inflation persistante au premier trimestre, ces anticipations ont été révisées à seulement trois baisses de taux.

Presque au top… Mais cela va-t-il durer?

Le gouverneur Waller a ensuite commencé la nouvelle année avec ce discours du 16 janvier, dans lequel il constatait des conditions économiques aux Etats-Unis dignes d’un scénario idéal. Avec une croissance du produit intérieur brut (PIB) réel attendue de 1 à 2% au quatrième trimestre 2023 (ce sera finalement 3,4% en rythme annualisé), un taux de chômage restant inférieur à 4% et une inflation sous-jacente des dépenses privées de consommation (PCE) se rapprochant de 2%, la conjoncture économique américaine semblait idéale ou presque.

«Rien ne presse»

Lors de son dernier discours, le 27 mars, le gouverneur Waller a indiqué que les données économiques récentes suggéraient qu’il serait opportun que la Fed réduise le nombre de baisses de taux prévues en 2024. Ou du moins, de les renvoyer à plus tard – avec un démarrage probablement tout de même dès cette année. En ce qui concerne les critères, il faudra «de meilleures données sur l’inflation pendant au moins deux mois de suite» pour que la confiance soit au rendez-vous.

Les dernières données suggèrent que la Fed restera prudente

Les données publiées le 29 mars, juste après ce discours du gouverneur Waller, ont montré que les prix avaient augmenté modérément en février, mais que les progrès vers l’objectif de 2% de la Fed sont lents.

Le déflateur des dépenses privées de consommation (PCE) a augmenté de 0,3% en février. Les données de janvier ont été révisées à la hausse et indiquent un indice des prix PCE à la hausse de 0,4% au lieu de 0,3% comme indiqué précédemment.

Au cours de la période de 12 mois se terminant en février, l’inflation PCE a progressé de 2,5% après avoir augmenté de 2,4% en janvier. C’est globalement conforme aux attentes. Les pressions sur les prix s’atténuent, bien que le rythme de la désinflation ait ralenti.

S’exprimant après la publication du rapport, Jerome Powell, président de la Fed, a indiqué que les données ne remettaient pas en cause le scénario central de la banque centrale. Il a cependant déclaré que l’économie américaine reposant désormais sur de bonnes bases, il n’y avait pas d’urgence à ce que la banque centrale américaine réduise ses taux directeurs.

Au vu de ces données, les marchés financiers ont réduit la probabilité d’une baisse de 25 points de base d’ici la réunion de juin du Comité de politique monétaire de la Réserve fédérale. Ils considèrent désormais qu’il n’y a que 50% de chance que cela ne se produise. Il y a deux mois, trois réductions étaient attendues avec quasi-certitude. Pour la première fois depuis octobre dernier, il est possible de penser qu’aucune baisse n’aura eu lieu lorsque la Fed se réunira en juillet prochain.

A lire aussi...