Bons du Trésor: attention à la seconde vague de ventes

Mark Holman, TwentyFour Asset Management

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Les bons du Trésor US et l’inflation ont été les principaux moteurs de risque au premier trimestre.

©Keystone

Deux sujets dominent actuellement les discussions avec les investisseurs en obligations: les bons du Trésor US (UST) et l’inflation. Les taux d’intérêt des UST à 10 ans ont bondi, passant de 0,9% au début du T1 à près de 1,75% à la fin du trimestre et infligeant des pertes à la majorité des titres obligataires mondiaux. Cette tension sur les taux est aussi devenue la principale source de risque dans d’autres classes d’actifs, pénalisant ainsi un trimestre qui aurait pu être beaucoup plus solide en termes de rendements.

Deux questions attendent une réponse

Suite aux grands moyens déployés par la Fed, les bons du Trésor ont commencé à se stabiliser, favorisant un retour général de l’appétit pour le risque, mais les investisseurs craignent toujours que le scénario se reproduise. Alors qu’est-ce qui est précisément intégré dans les cours du marché et quelle sera l’évolution prochaine des bons du Trésor? Telles sont les questions auxquelles nous nous efforçons actuellement de trouver des réponses, car nous pensons qu’elles seront déterminantes pour les rendements obligataires du reste de l’année. 

Nous assistons clairement à des tensions à la hausse
sur les prix et les entreprises n’hésitent pas à réagir.

Pour le moment, il me semble que les cours intègrent une reprise très vigoureuse de l’activité économique au second semestre 2021 qui n’était pas encore envisagée fin 2020. Le déploiement rapide de la vaccination aux Etats-Unis a changé la donne et l’ampleur du rebond n’était à mon avis pas en phase avec le bas niveau des rendements, de sorte qu’ils se sont rapidement ajustés à la hausse. Les bons du Trésor semblent également intégrer aujourd’hui l’inflation transitoire résultant d’une hausse de 12 mois des prix de l’énergie, comme n’a cessé de l’expliquer la Fed. Elle a aussi explicitement annoncé son intention de laisser l’inflation dépasser légèrement son objectif, et de ne réagir qu’aux faits réels plutôt qu’à ceux éventuellement susceptibles de se produire. Enfin, les investisseurs savent que la Fed devra tôt ou tard normaliser sa politique monétaire, mais de mon point de vue, elle préfèrera attendre que l’incertitude se dissipe sur le marché de l’emploi avant de risquer un changement de cap prématuré. Tout cela se reflète clairement dans les niveaux actuels des rendements.

Les rendements pourraient remonter

Une chose me semble sûre: à 1,6%, les rendements des UST à 10 ans n’intègrent qu’une petite partie de l’inflation persistante qui pousserait probablement les rendements du Trésor à la hausse et finirait par inciter la Fed à relever le taux des Fed Funds. Par conséquent, au cas où nous verrions les signes d’une telle inflation, les rendements du Trésor apparaîtraient vulnérables aux niveaux actuels et la prochaine vague de ventes pourrait déclencher une nouvelle envolée brutale.

Il faut raisonnablement s’attendre à voir une partie des pressions
inflationnistes se concrétiser dans les chiffres entre le début et la mi-2022.

Les risques inflationnistes commencent à se préciser avec des perspectives incertaines concernant le renchérissement des prix, et cette incertitude ne nous semble pas davantage compatible avec les rendements actuels. Le rythme effréné de la reprise économique actuelle est très différent des précédentes et exerce une forte pression sur les entreprises pour répondre aux niveaux atteints par la demande. En conséquence, nous assistons clairement à des tensions à la hausse sur les prix et les entreprises n’hésitent pas à réagir. Ces tensions sont probablement plus fortes que celles qui ont prévalu tout au long du cycle précédent. En d’autres termes, les perspectives sont au mieux incertaines.

Mais à quel moment ces pressions inflationnistes pourraient-elles faire surface dans les données? Il est vraiment difficile d’y répondre, dans la mesure où les entreprises doivent prévoir des hausses de prix et de salaires et s’interroger sur la durée de ces pressions. Nous ne pensons pas que les données surprendront à la hausse dans l’immédiat, et nous savons que les forces déflationnistes à long terme des dernières années œuvrent toujours à empêcher une évolution incontrôlée, mais nous pourrions raisonnablement nous attendre à voir une partie de ces pressions inflationnistes se concrétiser dans les chiffres entre le début et la mi-2022.

Mais surtout, contrairement à la Fed qui pourrait temporiser, les marchés n’attendront pas jusque-là et nous prévoyons donc une «deuxième vague» de vente de bons du Trésor qui se produira bien avant. Nous ne serions pas surpris de voir le rendement de l’UST à 10 ans franchir la barre des 2% avant la fin de cette année si cette deuxième vague domine une nouvelle fois les événements.

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