Actions des marchés émergents: bientôt sans la Chine?

Marc Bindschädler, Vontobel

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Les récents développements, qui risquent d'entraîner une baisse du taux de croissance à l'avenir, suscitent l'incertitude et l'insécurité chez de nombreux investisseurs occidentaux.

Après des décennies de forte croissance économique, la Chine est aujourd’hui la deuxième économie mondiale et avec une place dominante dans le MSCI emerging market index. Comment concilier cela avec l’impact éventuel des mesures économiques et politiques récentes de Pékin et de l’évolution démographique?

Les récents développements, qui risquent d'entraîner une baisse du taux de croissance à l'avenir, suscitent à juste titre l'incertitude et l'insécurité chez de nombreux investisseurs occidentaux. Les investisseurs cherchent de plus en plus à intégrer la Chine dans leurs portefeuilles. L'approche simple consistant à construire un portefeuille d'actions des marchés émergents mondiaux dans lequel la Chine a sa place commence à être remise en question. En conséquence, certains investisseurs ont décidé de considérer la Chine comme une classe d'actifs distincte et de gérer leur exposition séparément. Nous observons cinq approches parmi nos clients, à savoir: contrôle total, limitation de l'exposition, réduction de l'exposition: Contrôle total, limitation de l'exposition, réduction de l'exposition, maintien du statu quo et exposition zéro.

Se fier aux performances passées des marchés émergents hors Chine?

Changer la structure de votre portefeuille d’actions des pays émergents est une décision importante et il convient d’abord d’examiner la performance passée d’une approche hors Chine.

Commençons par le rendement annualisé pour la période 2002-2022 (en USD): l’indice MSCI EM affichait un rendement de 8,9%, contre 7,2% pour l’indice MSCI EM ex-China , ce qui est logique au vu de la forte croissance économique chinoise, absolue et relative, durant cette période. Si l’on décompose le rendement – en fonction du bénéfice par action, de la croissance des bénéfices, de la variation de la valorisation (C/B) et des dividendes – on constate que les valorisations ont baissé de 2% par an, avec et sans la Chine. Sachant qu’une croissance plus faible justifie une valorisation plus faible, cela peut s’expliquer par la diminution (jusqu’en territoire négatif) de la prime de croissance de tous les marchés émergents, par rapport aux pays développés, durant cette période. En outre, ces cinq dernières années, l’indice MSCI EM ex-China a affiché une volatilité légèrement plus élevée.

Ainsi, on peut dire que le passage à l’«hors Chine» n’a jamais été payant. Cela dit, prévoir l’évolution du profil risque/rendement des pays émergents hors Chine est impossible.

Exclure la Chine n’élimine pas nécessairement son influence

Une évolution à long terme des marchés émergents hors Chine pourrait être déterminée en examinant le lien entre la croissance démographique attendue, la croissance économique et la capitalisation boursière. Si la population de la Chine diminue, des décennies de forte croissance démographique sont prévues pour des pays comme l’Inde, le Pakistan, le Nigeria et l’Indonésie. Les économies en croissance démographique auront une forte croissance économique et – si le PIB par habitant inclut une hausse des revenus et de la richesse, investis à leur tour dans des actions via des fonds de pension – la capitalisation boursière pourrait même croître de manière exponentielle par rapport à la croissance de la population. Dans ce scénario, l’Inde dépasserait la Chine au niveau de la capitalisation à partir des années 2050 et les pays susmentionnés seraient plus fortement pondérés dans l’indice MSCI EM. À noter toutefois que des pays émergents comme le Nigeria et le Pakistan ne sont pas encore ouverts à de nombreux investisseurs professionnels ou ne disposent pas encore d’un marché boursier conforme aux normes institutionnelles.

Part de la capitalisation du marché mondial par région/pays

Source: Goldman Sachs Investment Research, Le chemin vers 2075 — Taille du marché des capitaux et opportunités, 08.06.2023

Pour beaucoup d’économies émergentes, les importations et les exportations vers et depuis l’Occident sont bien plus importantes que celles vers et depuis la Chine. En outre, depuis la pandémie de Covid, le cycle économique de la Chine s’est découplé de celui des autres pays, ce qui a rendu les bénéfices des entreprises moins sensibles à l’évolution des bénéfices et de l’activité économique chinoise. Mais si les investisseurs renoncent, totalement ou partiellement, à la Chine dans leur approche des marchés émergents, ils ne doivent pas oublier combien son économie est imbriquée dans l’économie mondiale et dans celles des marchés émergents. La Chine est aujourd’hui le premier partenaire commercial de la quasi-totalité des pays d’Asie, d’Amérique du Sud et d’Afrique. Au Chili, par exemple, les deux tiers des exportations de cuivre, qui représentent 15% du PIB, sont destinés à la Chine.

Quelle est l’approche la plus adaptée?

Pas de bonne ou de mauvaise réponse à cette question. Comme pour toute décision d’investissement, intégrer la Chine dans un portefeuille de pays émergents doit faire sens pour l’investisseur et correspondre à sa situation et à ses convictions.

La Chine étant un acteur important de l’économie mondiale, son retrait total des portefeuilles de pays émergents est à déconseiller. Si les dernières années ont été difficiles pour le marché boursier chinois, supprimer totalement son exposition au deuxième plus grand marché mondial est, à notre avis, une décision extrême. Mais les solutions hors Chine permettent aux clients de prendre le contrôle et des décisions d’allocation adaptées à leur situation. Selon nous, la personnalisation accrue des approches d’investissement est une évolution positive pour les investisseurs.  

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