2019, le cru de la normalisation

Christophe Bernard, Vontobel Asset Management

2 minutes de lecture

Les grandes banques centrales – Réserve fédérale en tête – semblent désireuses de réduire peu à peu la voilure.

 

2018, théâtre d’un véritable embrasement des marchés, touche à sa fin. Le moment pour les investisseurs de dresser le bilan de l’année écoulée et d’échafauder diverses hypothèses sur le millésime à venir. Pourquoi une telle pression boursière? Et avec quel impact sur l’économie mondiale?

Dix ans après l’éclatement d’une crise financière d’envergure planétaire et l’instauration d’une politique de sou-tien monétaire sans précédent, les banques centrales du globe – Réserve fédérale en tête – semblent désireuses de réduire peu à peu la voilure (voir le graphique ci-dessous).

La Fed, en figure de proue, a déjà relevé le taux des fonds fédéraux à 2,25% et engagé la réduction de son bilan à raison de 150 milliards de dollars par trimestre. De son côté, malgré des indicateurs conjoncturels décevants, la BCE maintient résolument le cap, avec la ferme intention de porter un coup d’arrêt définitif à son programme de rachats d’actifs d’ici à la fin de l’année et de rehausser ses taux d’intérêt, au plus tôt, en septembre 2019.

Même si la morosité des projections économiques en Chine comme en Europe a induit un rabotage des pré-visions de la croissance mondiale, l’ampleur de la rétrogradation demeure somme toute modérée, la croissance renouant avec un rythme plus «normal» après une période 2017-2018 exceptionnelle. La «normalisation» de la croissance et de la politique monétaire est donc au cœur de notre scénario central pour 2019. Cette constellation, qui conjugue essoufflement de la dynamique bénéficiaire des entreprises et tarissement partiel des liquidités, est certes peu engageante pour les places boursières mais pas funeste pour autant. D’où notre mot d’ordre: opérer des achats tactiques en surfant sur la volatilité et le statu quo des cours des actions. D’autant que les emprunts d'État ont peu de chances de dégager un rendement. Dans ces condi-tions, les marchés du crédit pourraient constituer la meilleure option.

Les investisseurs n’auront d’autre choix que de donner
à leurs portefeuilles des contours plus défensifs.

Le principal risque de dérapage de notre scénario central réside dans une décélération marquée (sans pour autant confiner à la récession), déclenchée par une escalade de la guerre commerciale que se livrent l’Amérique et la Chine et que nul ne saurait exclure, même si les deux parties ont tout intérêt à calmer le jeu – en amont du sommet du G20 à Buenos Aires – sur l’épineux dossier des droits de douane. Autre écueil, l’enlisement du conflit opposant la Commission européenne au gouvernement populiste italien sur le bud-get 2019 de la Péninsule, susceptible de provoquer une vente massive d’emprunts d’État italiens et d’attiser les craintes quant à l’intégrité de la devise européenne. Inutile de préciser qu’en pareil cas, les banques cen-trales auraient tôt fait de renoncer à toute normalisation et les bénéfices d’entreprises de se contracter. Pour parer à l’orage, les investisseurs n’auront d’autre choix que de donner à leurs portefeuilles des contours plus défensifs.

C’est dire si, dans l’ensemble, les marchés financiers vogueront – en 2019 – sous des cieux plutôt sombres. À moins qu’une bonne surprise ne soit en vue. En effet, si les tensions entre Washington et Pékin venaient à s’apaiser et le différend sur le budget italien à être purgé, l’horizon conjoncturel planétaire pourrait s’éclaircir et les bénéfices des entreprises avoir de nouveau le vent en poupe. Un scénario idéal mais, hélas, peu probable dans lequel les portefeuilles pourraient alors s’ouvrir davantage aux marchés des actions et du crédit.

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