Thomas Jordan: «La BNS ne lorgne pas vers les autres banques centrales»

AWP

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Interrogé sur une éventuelle hausse des taux directeurs, le président a répondu que «cela peut durer très longtemps» avant que la BNS n’agisse.

La Banque nationale suisse (BNS) décide elle-même de sa politique monétaire et ne se base pas sur les autres banques centrales, a affirmé jeudi le président de l’institut d’émission helvétique Thomas Jordan.

«Nous ne changeons pas de politique monétaire, parce que cela est le cas à l’étranger», même s’il applaudirait une éventuelle normalisation des conditions cadres de la politique monétaire au niveau mondial, a martelé le patron de BNS lors d’une conférence de presse à Berne.

Interrogé sur une éventuelle hausse des taux directeurs, M. Jordan a répondu que «cela peut durer très longtemps» avant que la BNS n’agisse, sans plus de précision. Pour décider de sa politique monétaire, la BNS apprécie la stabilité des prix - soit une inflation autour de 2% - et l’évolution de la conjoncture.

Alors que les craintes d’une inflation trop prononcée sont fortes aux Etats-Unis et dans la zone euro, la hausse des prix devrait vraiment être importante pour amener la BNS à resserrer sa politique monétaire actuellement ultra-accommodante. D’ici 2023, la banque centrale suisse s’attend en effet à un inflation de seulement 0,6%.

Ces déclarations interviennent alors que la Réserve fédérale américaine (Fed) n’a pas bougé mercredi soir sur sa politique monétaire. Les taux directeurs restent dans la fourchette de 0 à 0,25% dans laquelle ils avaient été abaissés en mars 2020, pour stimuler le crédit et la consommation. Cependant, les membres du comité monétaire envisagent désormais plus largement une première hausse des taux dès 2023.

Le président de la Fed, Jerome Powell, n’a ébauché aucun calendrier pour la réduction du soutien de l’institution à l’économie américaine, jugeant cela «prématuré».

Le rebond de l’inflation outre-Atlantique inquiète cependant les marchés. Elle devrait atteindre 3,4% cette année, contre 2,4% estimé en mars, avant de se stabiliser près de l’objectif de 2%, à 2,1% en 2022 et 2,2% en 2023. Mais M. Powell a martelé que le rebond des prix s’explique par des «facteurs transitoires» et s’attend à ce que la hausse «s’inverse avec le temps».

La BNS ne perçoit pas pour l’heure de risque d’inflation
La Banque nationale suisse (BNS) ne perçoit pas dans l’immédiat de risque de montée de l’inflation dans la Confédération, a déclaré jeudi Thomas Jordan.
«Il est très important que les banques centrales s’occupent intensivement du sujet de l’inflation. A la BNS également, nous devons surveiller de près ce phénomène. Mais pour l’heure nous ne voyons pas de risques d’inflation en Suisse», a précisé M. Jordan à AWP Video.
En Suisse, le renchérissement doit atteindre 0,4% (0,2% lors des prévisions en mars) sur l’exercice en cours, 0,6% (0,4%) en 2022 et 0,6% (0,5%) à nouveau en 2023, a détaillé la BNS dans son rapport trimestriel. L’évolution prévue des prix est mue principalement par l’augmentation attendue dans les hydrocarbures et dans les services liés au tourisme, ainsi que des biens concernés par les déficiences observées dans les chaînes d’approvisionnement.
«Notre cible en matière de stabilité des prix se situe entre 0% et 2%, nous nous y trouvons», a ajouté M. Jordan, précisant qu’il n’y avait donc pas de risque inflationniste dans le pays.
 
La politique de redistribution de la BNS est la bonne 
La politique de redistribution des bénéfices de la Banque nationale suisse (BNS) est la bonne, a estimé jeudi le président de l’institut d’émission Thomas Jordan, alors que ses pratiques en la matière sont règulièrement remises en question.
«Je ne pense pas qu’il faille changer un système qui fonctionne bien», a dit M. Jordan à Berne. Si les résultats de la BNS sont positifs, le Confédération et les cantons en profitent grâce au système de redistribution des bénéfices de la banque centrale helvétique.
Face aux risques élevés de taux de change, il est important pour la BNS de disposer d’un bilan solide. Illustrant ses propos, le patron de l’institut d’émission a indiqué que «si le franc s’apprécie d’un centime, cela représente une perte de 10 milliards de francs pour la BNS». Cette dernière doit donc à l’avenir renforcer ses fonds propres pour faire face aux éventuelles turbulences sur les marchés.
Quant à un usage des excédents de la BNS pour renflouer l’AVS, cela pourrait s’avérer problématique, selon Thomas Jordan.
Mercredi, trois professeurs ou ancien professeurs universitaires d’économie, réunis sous la bannière de «The SNB Observatory», ont lancé une attaque en règle contre l’accroissement continu des réserves de la BNS. L’économiste en chef d’EFG Stefan Gerlach, ainsi que les professeurs Yvan Lengwiler et Charles Wyplosz recommandent notamment une évaluation soigneuse et publique de ces réserves.

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