Sur le climat, Kamala Harris et Donald Trump ont des vues diamétralement opposées, faisant de l’élection présidentielle américaine un choix entre transition énergétique ou climatoscepticisme, avec d’immenses conséquences au niveau mondial.
Aucun des deux candidats n’a détaillé de programme complet sur la question, qui est loin d’être au centre de la campagne aux Etats-Unis, pourtant deuxième plus gros émetteur mondial de gaz à effet de serre derrière la Chine.
Mais leurs positions ne font aucun mystère. L’ancien président qualifie le changement climatique de «canular», et a promis de «forer à tout va» s’il est élu.
Sa victoire entraînerait davantage d’émissions de gaz à effet de serre américaines -- avec un impact sur le réchauffement mondial -- ainsi qu’un désengagement des Etats-Unis de la diplomatie climatique, pouvant freiner l’élan contre les énergies fossiles.
Sans même attendre l’investiture en janvier, son élection affaiblirait la voix des négociateurs américains à la COP29, qui doit débuter six jours après le scrutin.
Or l’engagement des pays riches comme les Etats-Unis sera décisif pour l’augmentation de l’aide financière aux pays vulnérables, au coeur des discussions cette année.
Durant son mandat, le républicain avait retiré les Etats-Unis de l’Accord de Paris sur le climat, et a promis de le refaire s’il est élu, après l’annulation de cette décision par son successeur Joe Biden.
C’est sous cet accord que les Etats-Unis se sont engagés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de moitié d’ici 2030, comparé à 2005. En 2023, cette réduction avait atteint 18%, selon le centre de recherche Rhodium Group.
Pour parvenir à 50%, «nous devons vraiment maintenir le cap», mais «il y aurait un revirement complet sous Trump», avertit Leah Stokes, politologue spécialisée sur le climat. «L’élection américaine aura des répercussions pour l’ensemble de la planète.»
«Escroquerie verte»
Kamala Harris, qui s’était rendue à la COP28 où les Etats-Unis avaient joué un rôle clé, s’engage elle à «poursuivre et développer le leadership international des Etats-Unis sur le climat», selon son site de campagne.
En tant que sénatrice, elle a soutenu le «Green New Deal», résolution appelant à réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre -- surnommée par Donald Trump la «nouvelle escroquerie verte» («Green New Scam»).
En 2019, alors candidate à la primaire démocrate, elle s’était prononcée pour l’interdiction de la fracturation hydraulique, une méthode polluante d’extraction d’hydrocarbures.
Elle est toutefois revenue sur cette position, dommageable notamment auprès d’électeurs de l’Etat clé de Pennsylvanie, où le secteur est important.
La démocrate en campagne ne fait d’ailleurs que peu référence au climat.
Lors de son débat face à Donald Trump, elle a défendu la nécessité de «sources d’énergie diversifiées», allant jusqu’à vanter que le pays ait «connu la plus forte augmentation de la production nationale de pétrole de l’histoire».
Un positionnement critiqué à bas bruit par certains. Mais toutes les associations environnementales la soutiennent, martelant son bilan.
Elles citent ses poursuites contre des entreprises pétrolières en tant que procureure générale de Californie. Et surtout son vote décisif pour adopter l’»Inflation Reduction Act» (IRA), loi d’investissement massif pour la transition énergétique.
Celle-ci est régulièrement prise pour cible par Donald Trump, qui a déclaré qu’il en «annulerait tous les fonds non dépensés».
Mais revenir sur une loi est complexe, et même certains élus républicains se sont prononcés contre l’idée, soulignant l’utilité des crédits d’impôts qu’elle comprend.
Retour vers le futur
Autres promesses de Donald Trump: annuler le moratoire de Joe Biden sur les nouveaux terminaux d’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL), ainsi que «l’obligation d’achat de véhicules électriques».
Une référence aux nouvelles réglementations sur les émissions des voitures visant à accélérer le passage à l’électrique -- sans pour autant l’imposer.
D’autres normes récentes de l’agence de protection de l’environnement (EPA), notamment sur les limites aux émissions de CO2 des centrales à charbon, pourraient être renversées.
Mais «tout effort pour abroger ces réglementations donnera lieu à de nombreux recours», croit savoir Fatima Ahmad, de la société de conseil climatique Boundary Stone.
De plus, «les gouvernements locaux et le secteur privé continueront à pousser leurs engagements en matière de climat», comme «lors de la première administration Trump», dit-elle à l’AFP.
Mais selon une analyse du média spécialisé Carbon Brief, une victoire de Donald Trump entraînerait bien l’émission supplémentaire, d’ici à 2030, de 4 milliards de tonnes d’équivalent CO2 par rapport aux démocrates -- soit les émissions annuelles de l’Europe et du Japon.