Frappée par le virus, l’économie allemande fait un plongeon historique

AWP

2 minutes de lecture

L’industrie allemande fortement exportatrice a été frappée de plein fouet. L’Allemagne a subi au deuxième trimestre une chute sans précédent de 10,1% de son PIB.

L’Allemagne a subi au deuxième trimestre une chute sans précédent de 10,1% de son produit intérieur brut et connaît sa pire récession depuis l’après-guerre en raison de la pandémie de coronavirus, même si la reprise se profile déjà.

Ce plongeon «historique» selon un communiqué jeudi de l’office fédéral des statistiques Destatis, attribué aux «conséquences de la pandémie», dépasse largement la contraction de 4,7% au premier trimestre 2009, pic de la crise financière.

La première économie européenne a subi un choc multiforme: le confinement décrété pour ralentir la propagation du Covid-19 a paralysé la production dans de nombreux secteurs, nettement ralenti les échanges et bridé la consommation.

L’industrie allemande fortement exportatrice, déjà en souffrance avant la pandémie en raison des tensions commerciales internationales et des inquiétudes liées au Brexit, a été frappée de plein fouet.

En avril, au plus fort des restrictions, la production manufacturière a chuté de 17,9%; les commandes à l’industrie ont fléchi de 25,8% et les exportations se sont, elles, effondrées de 31,1%.

Le tourisme et l’aviation ont eux aussi été durablement touchés: les champions nationaux TUI et Lufthansa ont dû appeler l’Etat à la rescousse et ont annoncé plusieurs milliers de suppressions d’emplois.

Comparé au deuxième trimestre de 2019, le PIB recule de 11,7% en données corrigées de l’inflation.

«Rétroviseur»

Mais ces chiffres, aussi frappants soient-ils, ne sont qu’un «coup d’oeil dans le rétroviseur», alors que «l’économie allemande s’est déjà reprise», nuance Carsten Brzeski, économiste de la banque ING.

Bénéficiant d’une situation sanitaire meilleure que celle de ses voisins, l’Allemagne a levé à partir de mai la plupart de ses mesures de restrictions et relancé son économie.

Signe de stabilisation, le taux de chômage est resté au même niveau en juillet qu’en juin, à 6,4%, après trois mois consécutifs de hausse.

Un fort rebond est désormais attendu par les experts.

«Le pire trimestre pourrait être suivi par le meilleur», affirme M. Brzeski.

«Il y a clairement des signes de reprise», a déjà confirmé mercredi l’institut économique allemand DIW. L’économie est tirée par la demande intérieure -- consommation, services et construction -- qui relève la tête plus vite que l’industrie.

Berlin a adopté en juin un paquet de 130 milliards d’euros destiné justement à encourager la consommation, grâce à une baisse de la TVA et à l’octroi d’une allocation supplémentaire de 300 euros par enfant pour les parents.

En plus des mesures de soutien au niveau national, l’Allemagne compte également profiter du plan de relance européen de 750 milliards d’euros, décidé par les 27 à Bruxelles mi-juillet et qu’elle a largement porté.

«Je suis persuadé qu’avec la mise en oeuvre de ce plan, [l’Allemagne] connaîtra une croissance durable en 2021 et en 2022», a ainsi affirmé le ministre de l’Economie Peter Altmaier.

Le gouvernement prévoit un retour de la croissance au plus tard à partir d’octobre, et un rebond de 5,2% dès 2021, ainsi qu’un niveau de production équivalent à l’avant-crise en 2022.

‘Vents contraires’

Pour 2020, Berlin table sur une récession de 6,3%. L’Allemagne s’en sortirait ainsi mieux que ses partenaires européens alors que le PIB français, italien et espagnol pourraient se contracter de plus de 10%, selon la Commission européenne.

Mais la durabilité de la reprise allemande dépendra largement d’un redressement du commerce international, lui même suspendu à l’évolution de la pandémie.

Après le rebond, «le rythme du rattrapage pourrait bientôt ralentir à nouveau», a prévenu Fritzi Köhler-Geib, cheffe économiste de la banque publique KfW.

«L’industrie, tournée vers l’export, fait face à de nombreux vents contraires en raison de la dynamique des infections» dans le monde, note-t-elle.

«Il faut s’attendre maintenant à un rattrapage durant le reste de l’année» mais son rythme sera dépendant de la situation sanitaire, confirme Jens Oliver Niklash, économiste pour la banque LBBW.

Comme d’autres pays Européens, l’Allemagne connaît elle-aussi une recrudescence des infections en cette période de vacances estivales, et l’institut allemand de veille épidémiologique Robert Koch a exprimé mardi ses «grandes inquiétudes» face aux chiffres en hausse.

A lire aussi...