BNS: la liquidité comme remède économique au coronavirus

AWP

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Refusant de céder à la surenchère en matière de taux négatifs, l’institut d’émission a préféré soulager les banques.

L’action de la Banque nationale suisse (BNS) durant la crise sanitaire provoquée par le coronavirus va se concentrer sur un aspect: éviter à l’économie réelle une pénurie de liquidités. Refusant de céder à la surenchère en matière de taux négatifs, l’institut d’émission a préféré soulager les banques.

Ceux qui s’attendaient à des annonces fracassantes ont été pour leurs frais jeudi. Même dans la situation exceptionnelle de pandémie de coronavirus, la BNS est restée fidèle à elle-même et privilégié la politique monétaire des petits pas en reconduisant son taux directeur à -0,75% et en poursuivant ses interventions sur le marché des devises.

La vigilance reste de mise et des mesures sont envisagées «si nécessaire» pour garantir l’approvisionnement en liquidités des marchés, a indiqué la BNS dans un communiqué. L’institut d’émission a assuré que le système financier disposait actuellement de suffisamment de liquidités. Il travaille de concert avec le Conseil fédéral pour soutenir l’économie.

Dans ce contexte, le président Thomas Jordan a rappelé le rôle central des banques en qualité de pourvoyeuses de liquidités, notamment pour l’octroi de crédits. Afin de les aider dans cette tâche, la BNS a relevé le facteur d’exonération des taux négatifs de 25 à 30, ce qui va alléger le secteur bancaire de 600 millions de francs par an.

Cette mesure est la seule prise jeudi par les banquiers centraux helvétiques, qui ont reconduit leur politique monétaire accommodante alors que certains de leurs homologues ont musclé leur dispositif. La Réserve fédérale américaine (Fed), par exemple, a abaissé son taux directeur de 1 point le week-end dernier.

«A l’heure actuelle, baisser les taux ne servirait à rien», a souligné Thomas Jordan lors d’une conférence téléphonique. Les effets négatifs d’une telle politique doivent également être prises en considération.

«Pas de manipulation»

La BNS a récemment injecté des liquidités sur les marchés dans le cadre d’accords dits de «swap» en concertation avec d’autres instituts d’émission, notamment la Fed.

Questionné sur la possibilité de distribuer directement de l’argent à la population - l’«helicopter money» - Thomas Jordan a plaidé pour une approche plus ciblée. «Il faut canaliser l’aide sur ceux qui en ont le plus besoin pour maintenir l’activité économique.»

L’achat de devises étrangères pour limiter la hausse du franc, dont le statut de valeur refuge s’est renforcé, lui vaut quelques critiques. Le président américain Donald Trump accuse la Suisse de manipuler sa monnaie pour favoriser ses exportations. Un reproche balayé d’un revers de main par le patron de la BNS. «Ni la Confédération, ni la BNS ne manipulent les devises.»

Les interventions sur le marché des changes se sont intensifiés depuis le début de l’année. Ces quatre dernières semaines, la BNS a plus ou moins atteint le niveau de 2019, où les achats de devises étrangères ont atteint 13,2 milliards de francs. Cette activité est cruciale pour éviter une envolée du franc qui pourrait prétériter l’industrie d’exportation suisse, déjà mise à mal par la crise.

Du côté des perspectives conjoncturelles, l’optimisme modéré prévalant avant la pandémie a fondu comme neige au soleil. Selon la BNS, il est probable que la croissance du PIB suisse sera négative en 2020 en raison du coronavirus et de son impact économique. Elle renonce à livrer un nouveau pronostic plus précis. En décembre, la BNS tablait encore sur une croissance comprise entre 1,5% et 2% pour 2020.

Le renchérissement est prévu cette année à -0,3% contre +0,1% précédemment, en raison de la baisse des cours du pétrole, du repli marqué des perspectives de croissance et du renforcement du franc. L’inflation devrait être légèrement positive pour 2021, à +0,3%, contre +0,5% jusqu’alors. Elle progressera en 2022 pour s’inscrire à 0,7% (première estimation).

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