Pourquoi Warren Buffett est-il fan de Coca-Cola?

Nicholas Johnson, Morningstar

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Malgré la perte de vitesse sur son cœur de métier, Coca-Cola bénéficie à la fois d’un avantage-coût et d’une très forte notoriété de ses marques.

Il n’y a pas que le Cherry Coke qui explique pourquoi Warren Buffett, premier actionnaire avec 9,4% du capital, est fan de Coca-Cola. Le spécialiste des boissons non-alcoolisées dispose de nombreux avantages concurrentiels lui assurant une rentabilité du capital élevé et justifiant l’attribution par Morningstar d’un rempart concurrentiel élevé («Wide Moat»).

Coca-Cola est certes encore fortement exposé à certaines catégories de boissons en perte de vitesse. Mais nous pensons que la force de sa marque se traduit par une demande pour de nouvelles variantes, et lui assure suffisamment de ressources pour réorienter son offre vers des produits plus en phase avec les demandes des consommateurs.

Le rempart concurrentiel des fabricants de «soft drinks» réside avant tout dans leur avantage coût et leurs actifs intangibles (marques, secrets de fabrication). En matière d’avantage coût, tout repose sur les économies d’échelle.

L’industrie est très consolidée, les deux premiers acteurs (PepsiCo et Coke) contrôlant 70% des volumes au plan mondial, selon GlobalData. En outre, on observe une certaine stabilité de l’évolution des parts de marché des deux groupes, les consommateurs de certaines boissons étant souvent insensibles aux prix des boissons concurrentes.

A la différence d’autres fabricants de boissons, Coca-Cola ne se charge ni de l’emballage, ni de la distribution de ses produits. Le groupe se concentre sur la production des concentrés ou des sirops utilisés pour ses boissons qu’il fournit aux embouteilleurs, lesquels se chargent de leur mise en production, de l’emballage et de la distribution.

Le groupe est donc exposé aux activités les moins intensives en capital et utilisant une proportion relativement plus limitée de main d’œuvre. Le groupe dispose de 30 usines qui fournissent l’équivalent de 80% des volumes de caisses expédiés, tandis que les activités qui couvrent l’ensemble de la chaîne de la valeur représentent 20% des volumes expédiés mais utilisent 90 sites.

Tous ces éléments permettent de comprendre en quoi réside l’avantage concurrentiel de Coca-Cola: un effet de levier sur ses frais fixes, grâce à une forte utilisation des capacités de production existantes, et la capacité de réduire les coûts variables par un approvisionnement efficace. Coke bénéficie à notre avis d’un coût de production par unité vendue plus faible que ses concurrents.

Le groupe dégage un taux de marge brute au-dessus de 60%, reflet de son avantage coût.

A cela s’ajoute un portefeuille de marques de premier plan, lesquelles figurent dans le top 10 des boissons non-alcoolisées en termes de volumes et de valeur. Red Coke est le leader incontesté avec 18% de parts de marché aux Etats-Unis, soit deux fois celle de Pepsi Cola (selon Beverage Digest).

La société est également un acteur de poids sur le marché des jus (11% de parts de marché au niveau mondial), avec Minute Maid et sa marque Del Valle (Amérique Latine), ainsi que la marque premium Glaceau SmartWater.

Coca-Cola est leader mondial sur le marché mondial des boissons non-alcoolisées prêtes à boire (environ 20% de parts de marché), sur celui des boissons gazeuses (40% de parts de marché environ), et sur celui des boissons non-gazeuses (part inférieure à 10%).

La qualité des actifs intangibles et de la marque Coca-Cola a encore récemment été démontrée au Japon, où le groupe a procédé à des hausses de prix que ses concurrents locaux ont répliquées.

A cela s’ajoute le caractère stratégique conféré à la marque par de nombreux circuits de distribution, lequel tient à sa notoriété auprès des consommateurs.

Le vaste réseau d’embouteilleurs et l’infrastructure de distribution, avec plus de 100 embouteilleurs et produits dans plus de 200 pays représente l’éventail le plus vaste au monde, ce qui soutient sa marque et son positionnement au sein des circuits de distribution.

Tout ceci se traduit dans une dynamique de croissance soutenue. En 2019, Morningstar table sur un chiffre d’affaires consolidé de 36,77 milliards de dollars, en croissance de 15,4%, puis de 5,6% en 2020. Le résultat opérationnel du groupe devrait atteindre 10,37 milliards de dollars cette année, en progression de 19,2% en 2019 puis de 9,2% en 2020.

Coca-Cola dégagerait un flux de trésorerie disponible («free cash-flow») de 4,09 milliards de dollars cette année, puis de 9,11 milliards en 2020.

Nous estimons à 54 dollars par action la juste valeur de Coca-Cola. Au cours actuel, le titre nous semble raisonnablement valorisé. Sur la base de ce cours, Coca-Cola vaut 25 fois le résultat attendu en 2020, soit une prime conséquente par rapport au multiple du marché américain – mais une prime largement méritée.

Ce que les «Bulls» disent: 

  • Au regard des volumes, Coke est trois fois plus gros que son concurrent le plus proche sur le marché des boissons non-alcoolisées prêtes à boire.
  • Le vaste budget marketing de l’entreprise devrait lui permettre d’entretenir la forte notoriété de sa marque.
  • L’acquisition récente de Costa devrait permettre au groupe de s’exposer à des nouvelles catégories de boissons (café), qui sont parmi les plus rapides en termes de croissance.

Ce que les «Bears» disent:

  • Le groupe est trop exposé au seul secteur des sodas, qui connaît un mouvement de repli généralisé dans le monde.
  • Les catégories en croissance telles que l’eau ou le café font l’objet d’une concurrence intense, où l’entreprise ne dispose pas d’un avantage concurrentiel aussi fort que dans les sodas.
  • L’évolution défavorable des changes a pénalisé l’évolution des marges, et il n’est pas acquis que cela s’arrête.

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