Le titre du développeur genevois de logiciels bancaires Temenos a connu un après-midi noir jeudi à la Bourse suisse, dans le sillage d’allégations de mauvaises pratiques commerciales et comptables formulées juste après midi par le vendeur à découvert new-yorkais Hindenburg Research. Une suspension de cotation et une ébauche de réponse formulée en toute fin de séance par la société de la Place des Philosophes n’a pas suffi à redresser la barre.
Le titre a bouclé sur un recul de 28,2% à 63,54 francs, contrastant singulièrement avec un SPI en hausse de 0,59%.
«Une enquête de quatre mois sur Temenos, impliquant des entretiens avec 25 anciens employés dont des dirigeants, révèle des traces de bénéfices manipulés et d’irrégularités comptables majeures», affirme Hindenburg Research dans une étude qui détaille différents dossiers provenant de plusieurs sources.
Le cabinet avance des «pratiques agressives». «Plusieurs anciens employés ont indiqué que le directeur général Andreas Andreades encourage ces pratiques, qui permettent de masquer l’insatisfaction et l’attrition importantes des clients à l’égard des produits», selon la publication.
Pratiques systématiques
Selon l’une des sources citées par le cabinet de recherche, «chaque fois qu’un partenaire annonce, ou que Temenos annonce qu’un partenaire a acheté une licence, tout cela est faux, à mon avis. C’est une fraude comptable limite, à mon avis».
Un autre dossier concernant le fournisseur de prestations bancaires américain Mbanq s’ajoute avec les déclarations d’un ancien cadre de Temenos. «Mbanq avait acheté pour 20 millions de dollars de logiciels et de services à Temenos dans le cadre de l’opération, alors que Temenos avait financé l’achat de ses propres logiciels par le biais d’un ‘investissement’ non divulgué dans Mbanq.»
Diverses fraudes présumées comme «l’antidatage de contrats» ou «de faux accords de partenariats» avec plusieurs sociétés sont détaillées, notamment par d’anciens cadres du groupe.
Hindenburg Research estime le titre «trop cher» en Bourse et pense que Temenos «sera bientôt à court d’astuces comptables, de nouveaux clients involontaires qui croient à ses beaux discours de vente, et de nouveaux investisseurs prêts à acheter alors que les dirigeants continuent à vendre».
Réponse tardive
Après avoir dans un premier temps refusé de commenter pour l’agence AWP le rapport de Hindeburg, Temenos s’est fendu en fin de journée d’une prise de position laconique, à l’occasion d’une suspension temporaire de sa cotation par SIX.
Le conseil d’administration rejette «fondamentalement» les allègations formulées et évoque des «inexactitudes factuelles et des erreurs analytiques, en plus d’allégations fausses et trompeuses». Le groupe rappelle qu’il publiera ses résultats 2023 audités au soir du 19 février, à la veille d’une journée dédiée à ses investisseurs.
Partiellement dévoilés mi-janvier déjà, les chiffres 2023 faisaient état d’une croissance de 5% à un peu plus d’un milliard de dollars pour le chiffre d’affaires. Le groupe met dans l’intervalle en avant un flux de trésorerie livre de 242,6 millions, en hausse de plus d’un quart et des progrès tant dans la mue du modèle d’affaires vers une base d’abonnés que dans le démarchage de nouveaux clients.