Argentine: la Bourse chute, les perspectives s’assombrissent

AWP

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La Banque centrale table sur un bond de l’inflation de 55% et une récession de 2,5% en 2019 alors que l’entrée en vigueur du contrôle des changes inquiète les investisseurs.

La Bourse de Buenos Aires a chuté de 11,90% mardi, en réaction à l’entrée en vigueur du contrôle des changes imposé par le gouvernement argentin pour tenter de rassurer marchés et épargnants, et alors que les prévisions d’inflation dans ce pays en récession ont été revues à la hausse.

L’indice Merval se situait à 23’079 points. Les actions de banques et de compagnies d’énergie ont connu de fortes baisses, tout comme les actions argentines cotées à Wall Street. Lundi, l’indice avait bondi de 6,45%, mais le volume de transactions était resté limité pour cause de jour férié aux Etats-Unis.

Le peso argentin, qui s’était apprécié de 5,38% lundi à la fermeture, à 58,41 pesos pour un dollar, s’est montré stable mardi, à 58,49 pesos pour un dollar, en très légère hausse de 0,03%.

Les mesures de contrôle des changes prises par le gouvernement du président libéral Mauricio Macri - qui resteront en vigueur jusqu’au 31 décembre - visent à rassurer les marchés face à l’aggravation de la crise économique qui a notamment entraîné une forte dépréciation de la monnaie argentine, de quelque 20% en trois semaines.

Et pour la Banque centrale du pays sud-américain, qui a publié mardi ses estimations, la crise économique ne devrait pas s’arranger: elle prévoit une inflation qui devrait être de 55% et un PIB qui devrait chuter de 2,5% en 2019.

L’institution financière tablait auparavant sur une inflation de 40% et une récession de 1,4%.

«Question ouverte»

Le décret publié dimanche au Bulletin officiel argentin impose aux entreprises exportatrices de changer en pesos les dollars entre cinq et quinze jours ouvrables après l’encaissement, ou 180 jours après l’exportation des biens.

Les particuliers ne pourront effectuer de virements à l’étranger de plus de 10.000 dollars, ni acheter des devises pour un montant supérieur à cette somme sans autorisation de la Banque centrale d’Argentine (BCRA).

Lundi, de premières files d’épargnants angoissés se sont formées aux portes de banques pour retirer leurs dollars.

La décision du gouvernement a permis «de décourager la demande en devises étrangères, mais le comportement de la Bourse est distinct», a expliqué à l’AFP Matias Rajnerman, du cabinet de conseils Ecolatina. «Les problèmes financiers des actions et des obligations vont continuer, alors que le marché des changes pour l’instant va être contenu», a-t-il ajouté.

L’Argentine a aussi demandé au Fonds monétaire international (FMI) un rééchelonnement de sa dette de 57 milliards de dollars. Selon l’accord signé en 2018, les premiers remboursements doivent intervenir en 2021, mais la perspective d’un changement de gouvernement et le spectre d’un défaut de paiement rendent les marchés nerveux.

Le péroniste de centre gauche Alberto Fernandez, critique du programme du FMI, fait désormais figure de favori pour le scrutin présidentiel du 27 octobre, après sa large victoire aux élections primaires, où il a remporté 47% des suffrages, loin devant Mauricio Macri (32%), qui brigue un second mandat.

Il reste «une question ouverte» qui génère une grande incertitude et provoque de la volatilité: «quelle politique économique aurons-nous sous le prochain gouvernement?», s’est interrogé Tiago Severo, analyste chez Goldman Sachs à New York.

L’agence d’évaluation financière Fitch a relevé de son côté mercredi à «CC» la note de la dette argentine, abaissée cinq jours auparavant à «RD» (défaut de paiement partiel). Elle a estimé que l’Etat avait remédié, par un versement, à la menace pour certains de ses créanciers de ne pas être remboursé à l’échéance prévue.

Fitch reste toutefois pessimiste pour les détenteurs de dette argentine. «Un nouveau défaut de paiement ou une restructuration de dette de quelque sorte que ce soit est probable», a écrit l’agence dans un communiqué, relevant les «semaines d’extrême instabilité financière» depuis les élections primaires du 11 août.

L’économie argentine, en récession depuis 2018, connaît une des inflations les plus élevées au monde (25,1% entre janvier et juillet, 54,4% sur les 12 derniers mois), une baisse de la consommation, des fermetures de commerces et une augmentation de la pauvreté (32% en 2018) et du chômage (10,1% cette année).

Et pour 2020, la Banque centrale a prévu une baisse du PIB de 1,1%, ce qui contraste fortement avec la précédente publication de juillet, quand elle prévoyait une croissance de 2%.

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