Une approche qui a fait ses preuves

Nicolette de Joncaire

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Rothschild & Co envisage une croissance largement organique focalisée sur l’Europe de l’Ouest. Entretien avec Laurent Gagnebin.

Les encours de Rothschild & Co Bank AG ont continué de croitre en Suisse et en Allemagne l’an dernier. Mi-mars, l’entité dirigée par Laurent Gagnebin annonçait des actifs administrés en progression de 13,5% à 36,2 milliards de francs, une part non négligeable de l’ensemble géré par le wealth management du groupe au niveau international, soit 76 milliards d’euros. L’année 2019 a pourtant été riche en évènements. Pour mémoire, Rothschild & Co s’est séparée de son activité de création et d’administration de trusts début 2019. Par ailleurs, après avoir fermé son antenne de Singapour, Rothschild & Co Bank a également renoncé à sa présence à Hong Kong. «En gardant la grande majorité des clients» nous explique Laurent Gagnebin.

Pouvez-vous résumer les activités de Rothschild & Co dans leur ensemble?

Le groupe est structuré en trois divisions. L’activité à laquelle Rothschild & Co Bank appartient se consacre à la gestion de fortune et d’actifs dans plusieurs pays Européens dont la France, Le Royaume Uni et la Suisse. Elle gère des encours totaux de l’ordre de 76 milliards d’euros. Vient ensuite la banque d’affaires (ou Global Advisory), responsable du conseil financier dans plus de quarante pays. Ses activités comprennent les fusions et acquisitions, l’introduction sur les marchés de capitaux, le conseil en matière de structuration et de restructuration des dettes publiques et privées. La plus jeune des divisions du groupe, Rothschild & Co Merchant Banking, est la branche dédiée au private equity et à la dette privée. Au niveau global, le groupe emploie plus de 3’500 collaborateurs.

«L’essentiel de nos activités en Suisse est centré sur la banque privée
avec un bureau principal à Zurich et un deuxième à Genève.»
Et en Suisse, dont vous dirigez la banque privée depuis 2016?

L’essentiel de nos activités est centré sur la banque privée avec un bureau principal à Zurich et un deuxième à Genève dès lors que nous avons intégré la société de gestion Equitas. Nos effectifs comptent plus de 200 personnes à Zurich et une quarantaine à Genève, après cession de Rothschild Trust en tout début d’année dernière. C’est à partir de la Suisse que sont dirigés nos deux bureaux allemands, un premier à Francfort et un second, depuis 18 mois, à Düsseldorf. De son côté, Rothschild & Co Global Advisory Switzerland qui est administré indépendamment, compte une dizaine d’employés en Suisse.

Après avoir fermé vos bureaux de Singapour, vous avez également renoncé à Hong Kong. Pour quelles raisons?

Notre point fort est la gestion discrétionnaire et sous advisory alors que la clientèle asiatique recherche plutôt des plateformes de trading. En ce qui nous concerne les opportunités sont bien plus porteuses en Europe qu’elles ne le sont en Asie du Sud-est. Notez à ce propos que nous avons conservé presque l’intégralité de notre clientèle de Hong Kong désormais gérée depuis la Suisse. Comme nous avions fermé ce bureau avant les manifestations de l’automne 2019, nos clients s’en sont fort bien trouvés.

«Plus de 80% de nos clients sont sous mandats discrétionnaires
ou de conseil bénéficiant d’une forte densité de conseillers.»
A quel type de clientèle vous adressez-vous principalement?

Nous offrons des mandats discrétionnaires et d’advisory ou d’execution only à une clientèle privée au sens où elle ne comprend en général pas de gérants indépendants. Plus de 80% de nos clients sont sous mandats discrétionnaires ou de conseil bénéficiant d’une forte densité de conseillers, soit 30 clients par conseiller, un nombre dix fois inférieur à celui des grandes banques et donc très favorable à la clientèle. Pour ce qui est du wealth planning, nous continuons à travailler avec notre ancienne filiale Trust mais aussi avec d’autres acteurs indépendants. Les clients institutionnels sont, pour leur part, gérés par le biais de l’asset management.

Comment fonctionne l’articulation entre banque privée et Global Advisory?

Un ensemble de règles et de procédures de type «muraille de Chine» séparent les deux entités. Il existe toutefois des synergies très intéressantes pour le client qui constituent un véritable différentiateur vis-à-vis d’autres banques privées en particulier pour les entrepreneurs. Un exemple classique est celui de l’entreprise pour laquelle nous levons des capitaux et dont le propriétaire, par la suite, décide de vendre la société et nous demande de gérer ses placements. En outre, les chefs d’entreprise apprécient que leur banquier appartienne à un groupe familial actif sur sept générations.

«Notre croissance future sera «more of the same»
avec une croissance largement organique focalisée sur l’Europe de l’Ouest.»
Vous co-dirigez le wealth management avec Helen Watson. Y-a-t-il un avantage à être deux?

Sans aucun doute. D’abord parce que nos marchés sont très différents et que nous sommes donc complémentaires. Et puis nous avons en commun un parcours similaire ayant fait nos classes en tant que conseiller à la clientèle dans des organisation anglo-saxonnes.

Comment envisagez-vous la croissance future de votre banque?

«More of the same»: avec une croissance largement organique focalisée sur l’Europe de l’Ouest – Allemagne, Suisse, France, Grande-Bretagne et Italie. Tout en restant naturellement ouverts aux opportunités externes comme ce fut le cas lors de la fusion avec la Banque Martin Maurel en 2017 en France. Bien évidemment notre ligne de conduite sera adaptée en fonction du contexte qui découlera de la crise sanitaire et économique actuelle.

Comment concevez-vous le rôle de Rothschild & Co Bank dans l’après COVID-19?

Nous sommes considérés sur le marché comme une contrepartie sûre et sommes très bien capitalisés. Notre marque est forte et notre offre est basée sur la préservation à long terme du patrimoine de nos clients. Ceci, ainsi que notre capacité à donner des conseils indépendants sans aucun conflit d'intérêt, a toujours été très attractif pour les familles et les entrepreneurs fortunés et le sera encore à l'avenir, après la crise.

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