Préférer le cash aux Etats-Unis mais pas en Europe

François Collet, DNCA

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L'année 2023 reste difficile pour les obligations face à l’inflation, risque de récession.

Cette année était censée être l'année de la reprise pour les obligations après «l'annus horribilis» obligataire de 2022, au cours duquel la quasi-totalité de l'univers obligataire a connu l'une des pires années de son histoire. Plus de trois trimestres après le début de l'année, de nombreux investisseurs doivent toutefois admettre que le chemin a été plus difficile que prévu.

Certes, les coupons sont élevés en raison de la hausse générale des taux d'intérêt, mais l'inflation reste persistante et absorbe une grande partie des rendements obtenus. De plus, une récession ne récession n'est pas à exclure, même si la plupart des grandes économies ont jusqu'à présent mieux résisté que prévu. Les problèmes géopolitiques tels que l'Ukraine et Israël contribuent à la turbulence des marchés.

Aux Etats-Unis, l'énorme déficit budgétaire pèse également sur les obligations, d'autant plus que les deux partis tentent de trouver des solutions à court terme - et n'ont jusqu'à présent accordé que peu d'attention aux solutions à long terme. Cette situation a déjà entraîné une vente massive d'obligations à long terme.

«Le cash est roi» aux États-Unis

Où donc les investisseurs à la recherche de rendements intéressants avec un risque contrôlé peuvent-ils les trouver? La réponse est simple: le cash. Aux Etats-Unis, on peut à nouveau affirmer que «le cash est roi». La hausse rapide des taux d'intérêt au cours des 18 derniers mois a eu pour conséquence que les instruments de dette à très court terme, même ceux émis par des emprunteurs dont la probabilité de défaillance est très faible, offrent désormais des rendements attrayants aux investisseurs. Cela signifie que les liquidités et les actifs similaires ne sont pas seulement en concurrence avec les actions, dont les rendements corrigés du risque sont actuellement à leur niveau le plus bas depuis 20 ans, mais qu'ils surpassent aussi lentement les obligations.

Même pour les obligations à haut rendement, qui offrent à première vue des rendements très élevés, les primes de risque restent assez faibles par rapport aux bons du Trésor.

L'inversion de la courbe des taux joue ici un rôle important: les investisseurs sont pratiquement récompensés pour leurs investissements dans des obligations à plus court terme (3 mois), alors qu'ils ne sont pas récompensés pour leurs investissements à plus long terme, c'est-à-dire qu'ils prennent des risques supplémentaires en fonction de l'échéance. Comme il n'y a toujours pas de signe de récession aux Etats-Unis, il n'y a donc guère de raison d'acheter des obligations d'État à plus long terme.

Cependant, les liquidités ne doivent pas être négligées par rapport aux investissements de crédit. Les 5% de rendement que les investisseurs peuvent obtenir avec des bons du Trésor à court terme - par exemple dans des fonds du marché monétaire - correspondent à peu près au rendement d'investissements beaucoup plus risqués, y compris les obligations d'entreprises notées «investment grade». Et même pour les obligations à haut rendement, qui offrent à première vue des rendements très élevés (plus de huit pour cent en moyenne), les primes de risque restent assez faibles par rapport aux bons du Trésor, ce qui indique que les investisseurs ne sont pas correctement rémunérés pour avoir pris un risque de crédit élevé.

Situation différente en Europe

En Europe, la situation est toutefois totalement différente. D'une part, les rendements nominaux sont plus faibles et, d'autre part, l'inflation - en particulier l'inflation sous-jacente - est beaucoup plus persistante. Cela s'explique notamment par le fait que le taux d'intérêt de la BCE est toujours nettement inférieur au taux d'inflation. Cela signifie que les rendements, en particulier les rendements réels, sont généralement plus faibles.

Par conséquent, les obligations européennes semblent peu attrayantes pour de nombreux investisseurs. L'indice Bloomberg Euro Corporate Bond, qui reflète le marché des obligations de haute qualité en Europe, a un rendement de 4,3%, ce qui ne représente pas une prime de rendement importante par rapport aux obligations d'Etat, compte tenu du rendement de 3,2% d'une obligation allemande à deux ans. Mais l'indice a également une échéance effective de 5,5 ans, ce qui signifie que les investisseurs doivent non seulement prendre un risque de crédit, mais aussi un risque de duration pour obtenir un quelconque rendement réel positif.

Quelle est la bonne stratégie d'investissement dans ce contexte? Ce que nous constatons dans de nombreux fonds «long-only», c'est qu'ils essaient simplement de maximiser les rendements en prenant un risque de crédit élevé. Toutefois, les investisseurs doivent se demander s'ils sont correctement rémunérés pour cela. Les liquidités peuvent être une bonne alternative, sous-estimée par de nombreux investisseurs. Toutefois, ce n'est actuellement le cas qu'aux Etats-Unis. En Europe, les rendements réels sont encore négatifs dans certains cas.

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