Compenswiss: performance positive de 3% jusqu’à la mi-février

Yves Hulmann

3 minutes de lecture

Après un résultat de placement négatif de 12,8% en 2022, le Fonds de compensation AVS/AI/APG a bien débuté l’année, souligne Eric Breval, son directeur.

©Jurg Kaufmann

2022 a été une année difficile pour toutes les classes d’actifs qui font partie du portefeuille du Fonds de compensation AVS/AI/APG. Au final, compenswiss a réalisé un résultat de placement négatif de -12,85%, comme l’établissement l’a indiqué mardi. La fortune gérée par compenswiss s’est élevée à 37,28 milliards de francs à fin 2022, contre 40,88 milliards un an plus tôt. Si l’on examine en détail les contributions, après couverture de change, des différentes catégories de placement, les obligations en monnaies étrangères ont contribué à hauteur de 5,59% à la perte totale, tout comme les actions (-4,16%), les obligations en francs suisses (-1,63%), l’immobilier indirect (-0,85%) ou encore les placements multi-actifs (-0,44%). Seuls les placements dans l’or physique ont permis de générer une performance positive de 0,01%.

Nette inversion de tendance depuis le début d’année

Le rebond des marchés des actions, notamment, observé au début de 2023 a-t-il aussi profité à compenswiss? Eric Breval, directeur de compenswiss, souligne la nette amélioration de la situation en début d’année. «L’inversion de tendance a été assez nette dans le sens où les grandes tendances de 2022 ne semblent, du moins à court terme, pas se répéter. La guerre en Ukraine s’est enlisée. La hausse des taux semble pour l’instant se stabiliser pour la simple raison que l’inflation se stabilise. De plus, les résultats de beaucoup d’entreprises publiés jusqu’à présent sont plutôt satisfaisants. Jusqu’à la mi-février, nous avons réalisé une performance de placement d’environ 3% sur notre fortune totale, ce qui est bien sûr très différent des -12% réalisés en 2022», explique-t-il. Comme les dirigeants de compenswiss l’ont souligné lors de la conférence de presse de mardi, les performances positives de 3% jusqu’à la mi-février ou les performances négatives de 12% en 2022 ne sont pas des gains ou des pertes réalisées, mais correspondent simplement à de la volatilité dans la valeur comptable des placements de l’établissement.

La remontée des taux profitera aux investisseurs institutionnels

La remontée des taux d’intérêt tout au long de 2022 a eu impact négatif à la fois sur les marchés d’actions et ceux ces obligations. Le fait d’être sorti des taux négatifs en Suisse devrait être positif pour les investisseurs institutionnels, y compris compenswiss. «Le moment où les taux remontent peut être douloureux, comme nous l’avons vu en 2022. Il l’est surtout pour les investisseurs qui doivent vendre à ce moment-là. Sur les obligations suisses, il y a eu une perte de valeur comptable de près de 13%. Donc, la phase de remontée des taux d’intérêt est très mauvaise, effectivement. En revanche, alors que nous devions évoluer dans le contexte des taux zéro ou négatif auparavant, nous avons désormais la possibilité d’acheter des obligations qui affichent un rendement d’environ 2% en francs suisses - et cela sans prendre de risques. Pendant toute la durée de ces obligations, nous savons que nous pourrons encaisser 2%, ce n’est pas rien. Cela sera dans l’intérêt des assurés AVS, AI et APG», souligne Eric Breval.

A partir de quel niveau, une remontée des taux d’intérêt poserait-elle problème? «Des taux de l’ordre de 2% ne sont historiquement pas très élevés. Il s’agit de niveaux tout à fait acceptables. Si les taux continuaient à remonter bien au-delà, par exemple à 3, 4 voire 5%, la question se poserait en termes différents, notamment à cause de l’impact que de tels niveaux de taux pourraient avoir sur l’immobilier. Jusqu’à fin 2021, un emprunteur pouvait obtenir une hypothèque à dix ans à moins de 1%. Si les taux devaient remonter de plusieurs pourcents, les personnes avec des revenus modestes, qui avaient pu obtenir des hypothèques à moins de 1%, devront alors renouveler leurs hypothèques à des taux nettement plus élevés. C’est à ce moment-là que la hausse des taux pourrait poser un problème pour le secteur immobilier. Cela ne poserait pas de problèmes à compenswiss directement mais ce serait problématique pour le marché suisse de l’immobilier dans certains segments ou secteurs», estime Eric Breval. La part de la fortune de compenswiss qui est placée dans l’immobilier se situe à environ 15%, avec un tiers de placements immobiliers en Suisse et deux tiers à l’étranger. «Il s’agit là d’immobilier titrisé – nous n’investissons pas dans de l’immobilier direct. Nous avons des placements dans des sociétés immobilières ou dans des fonds suisses», précise-t-il.

Un nouvel outil pour évaluer la compatibilité environnementale des placements

S’agissant des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance d’entreprise (ESG), compenswiss a indiqué avoir procédé à un certain nombre de désinvestissements en 2022, en particulier dans le secteur du charbon. Par ailleurs, compenswiss indique avoir développé des instruments de mesure dans le domaine de la durabilité lui permettant entre autres « d’évaluer la compatibilité climatique de son portefeuille de marché à l’aune des «Swiss Climate Scores», tels qu’ils ont été mis en place par le Conseil fédéral.

Pas de vente automatique de titres

Le recours à cet outil devrait-il conduire à exclure davantage de titres mal notés d’un point de vue environnemental ou au contraire à favoriser davantage certaines sociétés considérées comme exemplaires au sein de vos placements? «Ni l’un, ni l’autre», considère Eric Breval. «Le but d’utilisation des «Swiss Climate Scores» est, d’une part, d’améliorer la comparabilité de nos placements, par exemple, par rapport à d’autres assurances ou encore à des caisses de pension. D’autre part, ces mesures doivent aussi nous aider à comparer l’évolution de nos placements sur la durée. Par exemple, afin d’évaluer si le score de 2023 indique une amélioration ou une détérioration par rapport à 2022. C’est un outil important en matière de benchmarking», estime le directeur de compenswiss. En revanche, l’idée n’est pas d’automatiser la gestion des placements: «Si telle ou telle société voit son score descendre en dessous d’une certaine note, nous n’allons pas automatiquement la vendre. «Les Swiss Climate Scores constituent un radar très utile pour savoir où les risques climatiques se trouvent dans notre portefeuille», juge-t-il.

Davantage de visibilité pour les 5 à 6 prochaines années

Concernant l’équilibre financier de l’AVS à plus long terme, l’évaluation faite par l’OFAS l’an dernier en incluant l’acceptation de la réforme AVS 21 anticipe un résultat de répartition positif au moins jusqu’à 2028. Pour Eric Breval, l’institution dispose de davantage de visibilité - au moins pour les 5 à 6 années prochaines. «Le Conseil fédéral viendra au plus tard en 2026 avec une nouvelle proposition de réforme. Nous disposons ainsi d’un répit», juge-t-il. compenswiss profitera de la réforme dès l’an prochain. «Dès janvier 2024, nous recevrons un supplément de revenu de la TVA, ce qui va beaucoup nous aider pour faire face à nos engagements. En outre, il y aura aussi dès l’an prochain graduellement davantage de femmes qui vont commencer à prendre leurs retraites à partir de l’âge de 65 ans», met-il en perspective.

Eric Breval juge qu’il est extrêmement difficile d’anticiper comment les marchés vont évoluer durant le reste de l’année. «Nous n’avons par contre pas le couteau sous la gorge et compenswiss n’est pas sous pression pour vendre des actifs – ce qui serait dommage au moment où les marchés remontent», observe-t-il.

A lire aussi...