USA: la Fed a prédit des mois difficiles pour l’économie américaine

AWP

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La Réserve fédérale a laissé ses taux inchangés. Plus tôt ce mercredi, le département du Commerce a annoncé une chute du PIB de 4,8% au premier trimestre.

La Fed a prédit des mois difficiles pour l’économie américaine, terrassée par la pandémie de COVID-19, qui a d’ores et déjà mis fin à plus d’une décennie de croissance, et devrait provoquer un plongeon historique dans les mois à venir.

La pandémie «présente des risques considérables» pour les perspectives de l’économie américaine à moyen terme, a estimé la Réserve fédérale américaine dans un communiqué.

La Fed, qui se dit prête à utiliser «toute la palette d’outils» à sa disposition pour atténuer l’impact économique, estime que cette crise de santé publique «pèsera lourdement sur l’activité économique, l’emploi et l’inflation à court terme».

A l’issue de ses deux jours de réunion monétaire, la Banque centrale a maintenu en l’état ses taux directeurs, dans une fourchette de 0 à 0,25% depuis son dernier comité le 15 mars.

Elle les maintiendra à ce niveau jusqu’à ce qu’elle soit convaincue que l’économie «a survécu» à cette crise et «est en bonne voie d’atteindre ses objectifs maximaux d’emploi et de stabilité des prix».

Depuis deux mois, et la progression de la pandémie aux Etats-Unis, la Fed a également lancé une avalanche de mesures, qu’il s’agisse d’outils habituels ou de nouveautés, afin de rassurer les marchés et de donner une bouffée d’air aux entreprises et aux ménages.

La pays affichait une solide croissance depuis la fin de la crise financière de 2009.

Le président Donald Trump s’était félicité des 2,3% enregistrés en 2019 et visait 3% par an. La bonne santé de son économie était d’ailleurs un argument de taille dans sa course à la réélection à la Maison Blanche.

Chute du PIB

Mais la première économie du monde a vu son Produit intérieur brut (PIB) reculer de 4,8% au premier trimestre, la baisse la plus importante depuis le 4ème trimestre 2008, alors que les Etats-Unis s’enfonçaient dans la crise économique. La chute avait alors été de 8,4%.

La mise à l’arrêt de l’économie, progressivement au cours du mois de mars à mesure que le confinement était étendu à la majorité de la population, pour enrayer la pandémie, a «entraîné des changements rapides de la demande», relève le département du Commerce, qui a publié mercredi ces données.

Restaurants, bars, boutiques, écoles, ont fermé, seuls les commerces jugés indispensables pouvant rester ouverts, et «les consommateurs ont annulé, restreint ou réorienté leurs dépenses».

En cinq semaines, plus de 26 millions de personnes se sont inscrites au chômage, du jamais vu.

Or, seule la fin du trimestre a été touchée par ces mesures, ce qui laisse présager une chute du PIB bien plus spectaculaire au deuxième trimestre, et l’entrée officielle des Etats-Unis en récession, selon une définition classique de ce recul de la richesse nationale.

«Partie émergée de l’iceberg»

Ce recul est «la partie émergée de l’iceberg», avait averti Kevin Hassett, le conseiller économique de Donald Trump, mardi sur CNN, prédisant, pour les mois à venir, des chutes jamais vues.

Les projections des analystes laissent prévoir une baisse de l’ordre de 30 à 40%. L’ampleur dépendra du rythme auquel pourra redémarrer l’activité, tout en évitant une deuxième vague de contamination.

Puis, l’économie devrait se redresser timidement au second semestre. Le Fonds monétaire international table ainsi sur une contraction du PIB américain de 5,9% en 2020.

Les Etats-Unis pourraient connaître avec cette crise une récession trois fois plus forte que pendant la crise financière, «et la plus forte contraction économique depuis la Seconde Guerre mondiale», selon les analystes d’Oxford Economics.

«L’arrêt soudain de l’activité du secteur privé sera partiellement compensé par des dépenses massives du secteur public (...) et une relance sans précédent de la Fed», commentent-ils, mais «les pertes d’emplois seront traumatisantes et le rebond après le virus sera très progressif et semé d’embûches».

Pour certains secteurs particulièrement affectés par la paralysie de l’économie, à l’instar du transport aérien, le retour au niveau de 2019 pourrait prendre plusieurs années.

La mesure utilisée aux Etats-Unis pour estimer la croissance est l’évolution en rythme annuel, qui compare le PIB à celui du trimestre précédent, et projette l’évolution sur l’année entière à ce rythme. Elle diffère du glissement annuel, qui compare le PIB à celui du même trimestre de l’année précédente.

Powell anticipe «une chute à un niveau sans précédent au deuxième trimestre»
L’économie américaine va «probablement chuter à un rythme sans précédent au deuxième trimestre» en raison de la pandémie de coronavirus, a prévenu mercredi le président de la Banque centrale américaine Jerome Powell.
«L’ampleur et la durée du ralentissement économique sont extrêmement incertains et dépendront en grande partie de la rapidité avec laquelle le virus sera maîtrisé», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse, soulignant que la Fed s’efforçait d’assurer une reprise «aussi robuste que possible».
Pour ce faire, l’institution utilisera «de manière agressive» tous les outils à sa disposition parce que l’économie «aura sans doute besoin de plus de soutien».
Le patron de la Banque centrale a en outre estimé que ce n’était «pas le moment de s’inquiéter» des déficits budgétaires et que la priorité était de «gagner la bataille» contre la crise sanitaire et économique.
«C’est le moment d’utiliser la grande puissance budgétaire des Etats-Unis pour soutenir l’économie et essayer de traverser (cette crise) avec le moins de dommages possible sur les capacités de production à long terme de l’économie», a-t-il avancé.
La réflexion sur la manière de remettre en ordre les finances publiques viendra suffisamment tôt après cette crise, a-t-il ajouté.
Interrogé par ailleurs sur la reprise attendue au troisième trimestre, il a souligné que le PIB devrait croître de manière «assez importante, compte tenu de l’ampleur du recul» qui sera enregistrée au deuxième trimestre.
Mais il est peu probable, selon lui, que la croissance du troisième trimestre puisse ramener l’économie américaine aux niveaux d’avant la crise.
M. Powell a déploré que le chômage augmente à des niveaux particulièrement élevés et qu’il ait «tendance à augmenter beaucoup plus rapidement pour les minorités» ainsi que pour les ménages aux bas revenus.
«C’est déchirant», a-t-il réagi rappelant qu’avant la pandémie, les minorités noires et hispaniques avaient enregistré des niveaux de chômage historiquement bas.
«C’est pourquoi il est urgent de faire tout ce que nous pouvons pour éviter que des dommages à plus long terme ne se produisent», a-t-il martelé.
«Nous disposons d’outils pour faire ce que nous pouvons pour garder les gens en contact avec la main-d’oeuvre et le travail», a-t-il également commenté.
M. Powell a enfin souligné l’injustice pour ceux qui «perdent tout ce qu’ils ont, y compris leur maison».

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