Renault annule l’introduction en bourse de sa filiale électrique Ampere

AWP

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Il s’agit d’un revirement stratégique majeur pour le constructeur automobile français et d’un nouvel avertissement pour le secteur de l’électrique, qui, au-delà de Tesla, peine à convaincre les investisseurs.

Annoncée depuis 2022 et prévue au printemps, l’introduction en bourse de la filiale dédiée aux voitures électriques de Renault, Ampere, est finalement annulée, a annoncé lundi le groupe automobile français.

Il s’agit d’un revirement stratégique majeur pour Renault et d’un nouvel avertissement pour le secteur de l’électrique, qui, au-delà de Tesla, peine à convaincre les investisseurs, au moment où les introductions en bourse tournent au ralenti depuis près de deux ans.

Et d’un revers pour le patron du groupe, Luca de Meo, nommé en juin dernier également PDG de la filiale et qui en a fait son fer de lance.

Dans son communiqué, Renault justifie la décision par des «conditions de marché actuelles» qui «ne sont pas réunies pour poursuivre le processus d’introduction en Bourse et servir au mieux les intérêts de Renault Group, ses actionnaires et Ampere».

Mais surtout, Renault n’a pas besoin d’argent frais pour financer le développement d’Ampère, a souligné devant les journalistes le patron du groupe, Luca de Meo.

«Nous avons l’argent pour avancer sur le projet tel quel» et absorber les pertes d’Ampère, qui vise toujours l’équilibre financier en 2025.

«Les résultats attendus pour 2023 confirment la capacité du groupe à générer du cash durablement pour financer son futur», précise Renault.

Marché faible aux états-Unis

Le constructeur, qui se redresse après des années difficiles, a lancé en novembre 2023 cette filiale qui rassemble ses activités électriques et logicielles en France, avec un total de 11’000 collaborateurs.

Sa valorisation avait été estimée entre huit et dix milliards d’euros, soit autant que Renault Group.

L’entrée en bourse devait permettre de recevoir de l’argent frais pour accélérer le virage électrique, et «donner plus rapidement des dividendes aux actionnaires et au groupe», avait souligné M. de Meo fin 2023.

Mais il lui fallait convaincre les marchés financiers, où les constructeurs automobiles historiques font pâle figure face à leurs nouveaux concurrents électriques, comme Tesla.

La décision souligne également les interrogations sur le marché des voitures électriques.

Car si 2023 était une année record pour l’électrique en France et la motorisation enregistre encore de fortes hausses en Europe, les ventes sont moins dynamiques aux Etats-Unis.

Outre des prix supérieurs à ceux des véhicules à moteur thermique, les clients y semblent rebutés par l’insuffisance des infrastructures de chargement et par une autonomie limitée, contrairement à la combustion.

«Nous avons pris la décision car le cash était disponible», a détaillé M. de Meo à propos de l’annulation. Il a évoqué un contexte «pas idéal» et un marché de l’électrique mal orienté.

La décision de Renault devrait ainsi résonner jusqu’aux Etats-Unis, ou Ford a annoncé la création d’une filiale électrique, sans préciser de plan d’introduction en Bourse à ce stade.

Prévisions inchangées

Sur un marché des voitures électriques qui a explosé ces dernières années, la filiale de Renault prévoit de vendre environ 300.000 véhicules en 2025 et un million en 2031, soit la moitié de ce que Renault a écoulé dans le monde en 2022.

Ampere vise un chiffre d’affaires ambitieux de 10 milliards d’euros dès 2025, contre 46 milliards pour le groupe Renault en 2022, et un taux de croissance annuel de plus de 30% entre 2023 et 2031.

«Au cours des derniers semestres, Renault Group a significativement amélioré sa performance pour atteindre des niveaux dépassant ses attentes initiales», a souligné Renault.

Ainsi, la décision de court-circuiter les marchés financiers «n’a pas d’impact sur les perspectives financières de Renault Group, ni sur sa stratégie d’allocation du capital», assure la direction du groupe.

Et elle ne remet pas en question le principe d’un investissement de Nissan et Mitsubishi dans Ampère, annoncé à 600 millions et 200 millions d’euros respectivement.

Le contrat signé avec ces deux partenaires permet un investissement dans tous les cas et «c’est quelque chose que nous devons discuter», a détaillé le directeur financier Thierry Piéton.

L’investissement du géant des puces électroniques Qualcomm «dépendait» cependant de l’entrée en Bourse et «nous devrons discuter de ce que cela veut dire, s’ils veulent participer d’une autre manière», a-t-il précisé.

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