Gonet: l'actualité des marchés au 19 mai

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

4 minutes de lecture

Nasdaq +2,44%, Dow +3,85%, SPX +3,15%, Russell +6,10%, SOX +4,80%, Eurostoxx +5,10%, SMI +2,72%.

Wall Street donne un gros coup de massue aux bears (baissiers). C’est le jour de l’opération «ARNm-1273», du nom du vaccin contre le COVID-19 testé par Moderna (MRNA +20%) et qui annonce avoir obtenu des résultats prometteurs en phase I sur une toute petite cohorte de patients jeunes et en bonne santé. Moderna semble être la plus avancée des sociétés en quête du graal, il y en a actuellement environ une centaine dans la course. Le marché européen est déjà bien orienté dans la matinée, à l’idée que l’Europe rouvre son économie plus rapidement que prévu (notamment l’Italie, la Grèce et l’Allemagne) et c’est à 13h30 que la nouvelle tombe et fait l’effet d’une bombe. C’est donc pétri d’espoir que les indices américains des actions débutent leur séance et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils ne font pas les choses à moitié. La recette du jour est fort simple, on prend tout ce qui a souffert du virus et on l’achète à tours de bras. Pour financer cette fièvre acheteuse, on réalise ses profits dans tout ce qui a bénéficié du même virus. Voyez plutôt le résultat du jour en termes de secteurs: les compagnies aériennes décollent de 13,9%, les voyagistes de 13,8%, les hôtels de 13,1%, le secteur pétrolier de 12 à 13%, les hôpitaux de 11,4%. Même les automobiles en profitent, qui gagnent 9,2%. Les volumes d’échanges sont importants avec 12,8 milliards de titres traités sur le NYSE (New York Stock Exchange). A la cloche, les intérêts passent d’un coup de 1 milliard de dollars vendeurs à 700 millions $ acheteurs, les bulls (haussiers) semblent ne pas avoir terminé leurs emplettes. La volatilité se prend les pieds dans le tapis, l’indice VIX (volatilité du SPX) chute de 8% et repasse en-dessous de la barre des 30. On assiste à des couvertures massives de shorts (positions vendues à découvert) dans les actions dites de valeur et aussi dans tous les secteurs qui ont particulièrement souffert du coronavirus. Le SPX ouvre un joli gap à la hausse et a désormais sa moyenne mobile à 200 jours en ligne de mire, qui se situe à 2998 points (clôture 2953,91). Cette résistance-ci sera un vrai test, elle est accompagnée d’un gap à combler, qui se situe à 2999.83 points, sachant que le SPX traite désormais à 21 – 23 x les bénéfices estimées 2021, contre 19 x avant l’arrivée du virus dans l’équation. L’indice Nasdaq100 (NDX) récupère aisément le niveau de 9300 points. Et que dire des petites capitalisations? Le Russell2000 (RTY) se met en orbite et est propulsé de 6,1% par les intervenants.

Il est intéressant de noter que les indices poursuivent leur hausse tout en procédant à des rotations de secteurs. Les parias de 2020 hier encore, deviennent les darlings d’aujourd’hui. Sur le podium du retour en grâce, les compagnies aériennes, les valeurs pétrolières et les sociétés de croisières. Côté face les valeurs de la santé, de la technologie et des biens de consommation de base. Le marché gagne en confiance, confiance que la Fed va tout faire pour supporter l’économie, ce qui est confirmé à nouveau par Jerome Powell, qui indique que la Réserve Fédérale n’a pas encore épuisé son arsenal pour accompagner la reprise de l’économie. Comprenez: le robinet des liquidités est ouvert et pourrait l’être plus encore. Et dans le marché, des voix s’élèvent qui pensent que cette rotation est un bon signe pour la suite, que les investisseurs cherchent des opportunités relatives et non simplement à jouer un momentum. Une période de surperformance des perdants du virus permettrait en tous les cas au rapport de forces de s’équilibrer quelque peu. Actuellement, plus de 50% du poids du SPX est constitué par les secteurs de la santé et de la technologie, ajoutés d’Alphabet, Amazon et Facebook. Ceci explique peut-être pourquoi le SPX a tant grimpé récemment, au mépris des statistiques économiques inquiétantes qui tombent chaque jour. Aujourd’hui, le SPX ne reflète plus fidèlement l’économie des Etats-Unis.

Hier n’est vraiment pas une journée pour les ours. Au-delà de Moderna et du fol espoir qu’elle suscite autour du globe, au-delà de la Fed, qui est à la barre comme jamais, le marché aime entendre Christine Lagarde, la patronne de la Banque Centrale Européenne, dire que la BCE en fera plus si elle réalise que son plan actuel de soutien de l’économie n’est pas suffisant. En Angleterre, le chef économiste de la Banque d’Angleterre, Andrew Haldane, déclare que la BoE examine le scénario de taux d’intérêts négatifs. Mais c’est du couple franco-allemand que vient le coup inattendu. Angela Merkel et Emmanuel Macron proposent un plan de relance inédit doté de 500 milliards d’euros. Encore un? Pas vraiment, car ce qui change, c'est qu'il passe par une forme de mutualisation de la dette européenne, via des emprunts réalisés par la Commission au nom de l'UE. On parle désormais de dotations et non de prêts. C’est un engagement important qui pèsera dans le plan que la Commission doit proposer le 27 mai (Ursula von der Leyen s'est d'ores et déjà réjouie de la proposition, tout comme Christine Lagarde). D'autres voix s’élèvent déjà contre cette initiative. Ce ne sera pas aisé de convaincre les 27 mais rappelons-nous que l’Europe s’est toujours construite durant des crises. A suivre donc, ce que fait l’euro, qui décolle contre le billet vert, la paire eur/usd à 1,0939 ce matin. Le dollar est délaissé pour sa part, le Dollar Index (DXY) à 99,53. Le Câble ne sait plus quelle direction prendre et swing comme rarement, la paire gbp/usd passe de 1,2076 hier à 1,2247 ce matin. Exportateurs helvètes réjouissez-vous! Le franc lâche enfin un (petit) peu de lest contre l’euro, actuellement à 1,0637, ce qui nous indique une chose: lorsque le marché sera convaincu que l’Europe est unie et capable de contrer l’adversité économique, tout cela pourrait bouger très vite.

Le pétrole poursuit son redressement, il se dit que la demande chinoise est quasiment de retour aux niveaux d’avant l’irruption du virus. Le baril de WTI Light Crude à 32,25 dollars ce matin. L’or fait une pause après sa belle hausse, l’once revient à 1736 dollars. Le rendement de l’emprunt US à 10 ans remonte fortement, à 0,72% ce matin, la détente gagne quasiment toutes les classes d’actifs.

Après la cloche de Wall-Street hier, Baidu, le Google chinois, grimpe de 8%, la firme relève ses prévisions de revenus au trimestre actuel. Aujourd’hui, les principaux titres à rapporter leurs résultat sont Wal-Mart et Home Depot. Le Nasdaq va durcir sa réglementation en matière d'introductions en bourse, notamment en restreignant l'accès aux entreprises chinoises. Alcon émet 750 millions de dollars d'obligations 2030 à 2,6%. Richemont place 2 milliards d’euros d'obligations en trois tranches. La FDA homologue le Tecentriq de Roche Holding en monothérapie de première ligne dans le NSCLC. Moody's dégrade la dette de Carnival en catégorie spéculative. JC Penney (-23%) demande la protection de la loi américaine sur les faillites. Le groupe entend fermer certains magasins et étudier une cession. Salt et Sunrise s'allient dans la fibre optique. Les fonds sous gestion de Julius Baer diminuent de 8,2% d’année en année, à 392 milliards de francs. Barclays relève Geberit à «equalweight». Sonova bat les attentes en 2019, au  niveau du bénéfice par actions, de l’EBITA et des revenus. La marge EBITA est légèrement en-dessous du consensus, le titre indiqué en hausse de 0,8%.

Au-delà des quelques résultats d’entreprises à venir, aujourd’hui nous suivrons surtout l’indice allemand ZEW, des attentes de croissance économique, à 11h heure de Genève. Le patron de la Fed Jerome Powell donne un discours à 16h.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent tous dans le vert, emportés par Wall Street. Tokyo clôture en progression de 1,49%, Hong Kong gagne 2,07%, Shanghai 0,74% et Séoul 2,25%. Le future SPX progresse encore… de 12 points et l’Europe va ouvrir en hausse de 0,8%.

A lire aussi...