La monnaie fondante. La plus stupéfiante des révolutions financières

Présélection prix Turgot

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Bruno Colmant, Editions Renaissance du livre.

L'avis du Club de présélection du prix Turgot
Jean-Jacques Pluchart

L’ouvrage Bruno Colmant, professeur d’économie, membre de l’Académie royale des sciences et des beaux-arts de Belgique, présente la théorie monétaire dite de la «monnaie fondante», conçue en 1916 par l’économiste belgo-allemand Silvio Gesell. Selon son auteur, la monnaie émise devait perdre automatiquement 5,2% par an, par «estampillage d’un millième par semaine», puis faire l’objet de revalorisations aléatoires. Cette «usure» de la valeur de la monnaie était censée favoriser les transactions et décourager la thésaurisation et l’endettement. L’intérêt de ce système monétaire fut remarqué notamment par Keynes et Fisher. Il fut expérimenté localement dans plusieurs pays européens et notamment en Allemagne et en Autriche, frappées en 1923 par une hyperinflation.

Bruno Colmant compare les effets de l’application de ce modèle – dont il reconnait les imperfections – aux systèmes monétaires mis en place aux Etats Unis et surtout en Europe. Il observe notamment que la construction de l‘euro a eu des effets contraires sur les économies allemande et française, la stabilité de l’euro ayant favorisé les exportations et l’industrie privée allemandes, alors qu’elle a permis à l’Etat français de bénéficier de faibles taux d’intérêt afin de financer ses déséquilibres budgétaires. l’euro a stimulé l’initiative privée en Allemagne et a favorisé la puissance publique en France. L’euro a également creusé la fracture entre les économies des pays du sud et du nord.

Face aux crises, la Banque Centrale Européenne a été conduite à appliquer une stratégie non conventionnelle basée notamment sur des taux d’intérêt négatifs et le rachat de 30% des dettes publiques des pays de la zone euro. Bruno Colmant constate que l’épargne n’est plus rémunérée et que depuis quelques mois, elle est rongée par une inflation de plus de 5%, correspondant au taux d’usure conseillé par Gesell.

En conclusion, Bruno Colmant estime qu’un système inspiré de celui de Gesell aurait été probablement plus performant et il recense les difficultés que rencontrera la BCE pour enclencher la désinflation, soutenir la croissance économique et contenir l’endettement public, dans une zone monétaire de plus en plus hétérogène.