Quel impact des déclarations de l’administration Trump?

Michaël Nizard, Edmond de Rothschild Asset Management

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Les indices PMI américains restent en territoire d’expansion mais se dégradent, avec un indice composite à 51,2 contre 52 attendu et une détérioration du secteur des services.
  • L’administration américaine est prête à discuter avec la Chine pour abaisser les droits de douane à 50-65%, en échange de concessions.
  • Les incertitudes commerciales pèsent sur les données macroéconomiques, avec une légère dégradation des indices PMI américains et européens, et des entreprises américaines qui envisagent désormais de répercuter la hausse de leurs coûts sur les prix de vente.
  • Aux Etats-Unis, plusieurs membres de la Réserve fédérale préconisent la prudence concernant la baisse des taux, face aux risques inflationnistes liés à la guerre commerciale. En Europe, l’économiste en chef de la BCE n’exclut pas une baisse prochaine des taux directeurs.

L’administration Trump continue de déstabiliser les marchés financiers avec des déclarations contrastées. D’abord, le directeur du Conseil économique national des Etats-Unis a déclaré que Donald Trump avait consulté ses équipes pour savoir s’il pouvait destituer Jerome Powell, et la réaction des marchés a été immédiate: une baisse des actions et du dollar, et une hausse des taux souverains. Le jour suivant, le président américain a changé de ton et a précisé qu’il ne souhaitait pas renvoyer Jerome Powell mais qu’il espérait le voir agir plus rapidement pour baisser les taux directeurs. Ce nouveau discours de Trump écarte ainsi le risque d’une perte de confiance majeure des investisseurs quant à l’indépendance de la Fed, et les marchés récupèrent les pertes du jour précédent. Sur le plan commercial, Donald Trump et Scott Bessent se sont montrés plus conciliants envers la Chine, affirmant que les droits de douane entre les deux pays ne resteraient pas aussi élevés très longtemps. L’administration américaine a affirmé que les Etats-Unis étaient ouverts à des discussions bilatérales avec la Chine pour réduire les droits de douane à 50-65%, à condition d’obtenir des concessions en retour.

Selon certaines sources médiatiques, Pékin envisagerait de suspendre certains de ses droits de douane ciblant les Etats-Unis, qui s’élèvent actuellement à 125%. Cette suspension viserait en particulier les équipements médicaux, certains produits chimiques industriels, ainsi que les avions américains. Malgré ces informations, la Chine n’a pas officiellement confirmé ces intentions, ce qui contribue à la volatilité observée sur les marchés. Malgré cela, l’administration américaine s’est montrée optimiste quant à la conclusion des accords commerciaux avec plusieurs pays d’ici le troisième trimestre, ce qui permettrait de limiter les effets négatifs de la guerre commerciale avant la fin de l’année. Suite à ces déclarations, les actifs américains ont réagi positivement, avec une hausse des actions et du dollar, et une baisse des taux américains, entraînant dans leur sillage les actifs européens grâce à l’espoir d’une accalmie dans la guerre commerciale.

Cependant, l’incertitude et les tensions commerciales pèsent sur les données macroéconomiques. Les indices PMI américains restent en territoire d’expansion mais se dégradent, avec un indice composite à 51,2 contre 52 attendu et une détérioration du secteur des services. De plus, le Beige Book de la Fed révèle les inquiétudes des entreprises face à l’augmentation des droits de douane; celles-ci envisagent de répercuter la hausse de leurs coûts sur leurs prix de vente alors que la demande ralentit. En zone euro, l’indice de confiance des consommateurs s’est encore dégradé pour le troisième mois consécutif (-16,7 contre -15,1 attendu) et les indices PMI d’avril ont envoyé un signal négatif avec une contraction dans le secteur des services (49,7 contre 50,5). Cependant, l’activité manufacturière s’est moins contractée que prévu (48,7 contre 47,7 attendu), grâce au rebond des nouvelles commandes à l’export, en anticipant un renforcement tarifaire. Dans ce contexte, il semble nécessaire pour la BCE de poursuivre l’assouplissement monétaire, d’autant plus que l’inflation en zone euro pourrait diminuer du fait d’un euro fort et d’une baisse du prix du pétrole. En effet, le prix du Brent a été sous pression en raison des récentes déclarations du Kazakhstan, qui privilégie ses intérêts nationaux plutôt que ceux de l’Opep+, révélant des désaccords internes croissants au sein du cartel.

La prudence demeure essentielle pour les banques centrales dans le contexte actuel. Aux Etats-Unis, plusieurs membres de la Réserve fédérale ont souligné qu’il est impératif de ne pas se précipiter, en raison des forts risques inflationnistes engendrés par la guerre commerciale. En Europe, l’économiste en chef de la Banque centrale européenne n’a pas exclu la possibilité d’une prochaine baisse des taux directeurs de 50 points de base, motivée par les inquiétudes concernant la détérioration des perspectives économiques et la baisse de l’inflation. Au Japon, l’inflation de Tokyo a montré des signes encourageants de hausse des prix, bien que les tensions commerciales avec les Etats-Unis justifient une approche prudente de la Banque du Japon (BoJ). Globalement, ces déclarations visent à rassurer les investisseurs sur la capacité des banques centrales à intervenir si nécessaire.

Dans cet environnement de marché toujours volatil, nous maintenons notre prudence sur les actifs risqués et les taux souverains, avec une préférence pour le crédit Investment grade.

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