Le Private Equity affiche historiquement des performances supérieures aux marchés cotés. Cette surperformance repose sur plusieurs leviers mécaniques, dont certains que je vous ai précédemment présentés, comme l’alignement d’intérêts, la gouvernance serrée ou encore la stratégie de Buy and Build, qui consiste à acquérir et consolider des entreprises pour en accélérer la croissance. Je vous propose de vous présenter dans cette 3e et dernière tribune consacrée aux leviers de performance du Private Equity, deux mécanismes, souvent moins visibles, qui méritent une attention particulière: la sélection proactive des champions et la préparation stratégique de la sortie.
Une sélection proactive et patiente des cibles
Contrairement aux investisseurs sur les marchés cotés, contraints de choisir parmi les sociétés déjà introduites en bourse, les fonds de Private Equity adoptent une approche bien plus sélective et proactive. Cette démarche commence par l’identification des industries présentant une croissance structurelle positive, c’est-à-dire des secteurs dont les perspectives sont portées par des tendances économiques ou technologiques durables.
Au sein de ces industries, les fonds ciblent des entreprises championnes, reconnues pour leur avantage compétitif fort et pérenne. Il ne s’agit pas simplement de saisir des opportunités, mais bien de construire une stratégie d'investissement autour d'acteurs capables de surperformer durablement.
Cette sélection ne se limite pas aux entreprises mises sur le marché. Les fonds de Private Equity n’hésitent pas à approcher des sociétés bien avant qu'elles ne soient en vente, parfois même plusieurs années en amont. Cette anticipation leur permet de nouer un dialogue approfondi avec les équipes de management et de comprendre en détail la stratégie, les ambitions et la performance opérationnelle de la cible.
En multipliant ces échanges, les investisseurs obtiennent un accès privilégié à des informations clés, bien avant qu'un processus de cession formel ne soit lancé. Ils peuvent ainsi analyser finement les indicateurs de performance, rencontrer les responsables des différentes unités d'affaires et, dans certains cas, conduire une due diligence stratégique pour évaluer le potentiel commercial, ainsi qu'une due diligence financière pour comprendre la nature exacte des performances économiques de l’entreprise.
Cette approche confère un avantage décisif. Lorsqu'une entreprise est finalement mise sur le marché, le fonds de Private Equity, fort de ses mois ou années de préparation, dispose d'une connaissance bien plus approfondie que celle des concurrents. Cette maîtrise de l'information se traduit par une meilleure évaluation des risques, une capacité à proposer un prix compétitif sans surpayer et, au final, une surperformance structurelle par rapport aux investisseurs cotés, qui se contentent des données publiques disponibles.
Une stratégie de sortie anticipée dès l'acquisition
Un autre levier fondamental repose sur la préparation minutieuse de la cession, amorcée dès l'acquisition de l'entreprise. Lorsqu'un fonds de Private Equity investit dans une société, il ne se contente pas d'accompagner sa croissance: il élabore un plan stratégique détaillé, co-construit avec l'équipe dirigeante, visant à maximiser la création de valeur sur un horizon de cinq à sept ans.
Cette transformation repose sur une démarche industrielle structurée. Les fonds mettent en œuvre des initiatives ciblées pour améliorer l'organisation, optimiser les opérations, accélérer l'expansion commerciale ou encore digitaliser certaines activités. Cette transformation n’est jamais improvisée: elle repose sur des analyses préalables approfondies et sur un dialogue constant avec le management.
Mais l'une des spécificités du Private Equity réside dans l'anticipation de la sortie. Dès l’acquisition, les fonds réfléchissent à la meilleure manière de céder l'entreprise à terme. L'objectif est clair: rendre la société la plus attractive possible pour un acquéreur industriel ou financier.
Pour cela, les investisseurs engagent un travail de prospection active. Ils rencontrent régulièrement des acquéreurs potentiels, testent leur appétit pour l'entreprise et ajustent, si besoin, la stratégie pour aligner la cible sur les attentes du marché. Cette approche permet non seulement d'optimiser la valorisation, mais aussi de sécuriser la transaction au moment de la cession.
Cette préparation proactive contraste fortement avec la gestion passive des portefeuilles cotés. Un investisseur sur les marchés financiers n'a ni l'accès direct à la stratégie des entreprises, ni la capacité d'influencer leur trajectoire pour en maximiser la valorisation future.
Le facteur temps: un avantage décisif
L'efficacité de ces leviers repose sur un élément fondamental: le temps long. Contrairement aux marchés cotés, soumis à la pression des résultats trimestriels, le Private Equity fonctionne sur des horizons de cinq à sept ans, voire davantage. Cette durée permet aux investisseurs de mener à bien les transformations nécessaires, sans subir les contraintes des cycles boursiers.
Cette illiquidité, souvent perçue comme une contrainte, constitue en réalité un atout. Elle garantit la stabilité des capitaux, permet de déployer des plans de croissance ambitieux et assure une exécution rigoureuse des stratégies définies en amont. En contrepartie, les investisseurs doivent accepter un engagement prolongé, seule condition pour capturer pleinement la valeur créée par ces transformations.
En définitive, la surperformance du Private Equity ne repose ni sur la spéculation ni sur une prise de risque excessive. Elle découle d'une approche structurée et méthodique, combinant une sélection rigoureuse des cibles, un accès privilégié à l'information, une transformation industrielle sur le temps long et une préparation minutieuse de la cession. Autant de leviers inaccessibles aux investisseurs cotés, dont la gestion reste, par nature, plus passive.
Lire également les deux premières parties:
Private Equity: les différents mécanismes de performance (1/3)
Comprendre les mécanismes de performance du Private Equity (2/3)