L’administration Trump nous fait entrer dans une nouvelle ère monétaire
Croire que l’action du nouveau président se limitera au commerce et n’affectera pas la finance mondiale, notamment le système monétaire, serait naïf. Beaucoup voient en Trump une fusion entre Nixon et Reagan, les deux figures républicaines majeures des cinquante dernières années : Nixon, l’anti-élitiste, et Reagan, le pro-business. Ces deux présidents ont profondément transformé le système monétaire.
En 1971, Nixon suspendait la convertibilité du dollar en or. En 1985, Reagan réunissait le G7 au Plaza Hotel de New York pour organiser sa dépréciation. Tous deux faisaient face à une fuite des capitaux et ont appliqué des remèdes radicaux, au grand dam des investisseurs étrangers.
Trump est confronté au même problème, alors que la Fed a relevé ses taux pour juguler l’inflation et que le service de la dette s’alourdit de 300 milliards de dollars par an. Or, la lutte contre l’inflation est un impératif électoral et les taux resteront donc élevés. L’issue viendra de la monnaie et Trump a déjà exprimé sa volonté de déprécier le dollar, ce qui améliorerait aussi le commerce extérieur.
Son équipe planche sur le sujet. Stephen Miran, son nouveau conseiller économique, a publié en novembre 2024 «A User’s Guide to Restructuring the Global Trading System», qui envisage plusieurs options pour d’affaiblir le billet vert, dont l’une d’elles ressemble furieusement à un défaut sélectif sur la dette publique détenue par les non-résidents.
Les obligations ont perdu leur rôle protecteur
Autrefois diversifiantes et protectrices, les obligations d’état US, ont perdu leur rôle refuge. Depuis 2021, la corrélation actions-obligations est devenue positive (+0.64 sur trois ans), amplifiant la volatilité d’un portefeuille diversifié au lieu de l’atténuer. En 2022, cette dynamique s’est traduite par une chute simultanée du S&P 500 (-19%) et des obligations américaines à 10 ans (-14%), mettant à mal la fiabilité du modèle traditionnel d’allocation 60/40.
L’inflation, un «game changer»
Un paramètre presque oublié est venu perturber le paradigme de la mondialisation et de la stabilité des prix : l’inflation. Ce nouveau régime inflationniste a aggravé un équilibre déjà fragilisé par la perte de repères monétaires. La manipulation des taux d’intérêt par les banques centrales, les politiques monétaires et budgétaires laxistes de l’ère Covid et plus récemment l’utilisation de la confiscation de réserves monétaires comme outil de pression économique ont été autant d’évènements correctement anticipés par une hausse prémonitoire du prix de l’or mais nullement par le marché obligataire.
Le retour en grâce de l’or
Quel substitut des obligations choisir pour jouer ce rôle de protection? Historiquement, en période inflationniste, il faut chercher refuge dans les actifs qui incarnent le mieux les réserves de valeur. Si on y ajoute une exigence de liquidité élevée, l’or ressort comme l’actif de prédilection. Mais au-delà de cette considération, le métal jaune, par son caractère dit «antifragile» – qui se renforce en cas de stress sur les marchés – va jouer de plus un rôle clé dans la résilience des portefeuilles. Si le récent mouvement haussier du prix de l’or en direction des 3’000 USD se révèle être un énième signal d’alerte précoce d’un bouleversement majeur à venir, cette «antifragilité» sera d’autant plus nécessaire dans les portefeuilles.
Une gestion dynamique de l’or est indispensable
Il est essentiel de gérer l’or de manière dynamique, ce qui exige une technicité spécifique. Tout d’abord, parce que, sous forme physique, l’or ne génère aucun rendement. De plus, il s’agit d’un actif particulièrement volatil, dont le cours est déterminé par de nombreux facteurs, en raison de la diversité des sources de demande, entre joaillerie, technologie, banques centrales et investisseurs.
Une approche active génère de la valeur mais elle requiert une lecture fine des cycles économiques, une capacité d’adaptation aux paramètres de ce marché et une connaissance profonde des différents intervenants.
L’or optimisé
La meilleure approche repose probablement sur une stratégie alternative combinant un noyau d’or physique géré activement et une couche «overlay» pour ajuster l’exposition via du levier ou de la protection. Ces mêmes instruments permettent aussi d’en extraire un rendement, corrigeant ainsi l’un des principaux défauts reprochés à l’or.
Quelle part allouer à l’or?
Trop souvent sous-pondéré à 5% des portefeuilles, l’or ne peut exprimer ainsi pleinement son potentiel. Sur 50 ans, l’allocation optimale pour maximiser le ratio de Sharpe aurait été de 31% en actions, 47% en obligations et 22% en or. Sur 10 ans, elle aurait même été de 60% en or, 40% en actions et 0% en obligations.
L’or est plus qu’une simple assurance contre l’inflation : il devient un élément central d’une allocation résiliente face aux bouleversements monétaires et économiques à venir.