L'avenir de la gestion de fortune se féminise

Adrian Nösberger, Schroder & Co Bank

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En 2025, 60% des fortunes privées en Grande-Bretagne seront contrôlées par des femmes, impactant aussi la Suisse.

En 2025, 60 pour cent des fortunes privées en Grande-Bretagne seront contrôlées par des femmes. Cette prévision, basée sur une étude récente d'Ad Lucem et de Schroders, met en lumière un changement fondamental dans le monde financier, qui a également son importance pour la Suisse. Ce changement modifiera non seulement la dynamique de l'activité de gestion de fortune, mais aura également des répercussions profondes sur la relation entre les conseillers financiers et leurs clients.

La transmission de patrimoine dont il est question a lieu le plus souvent au sein de la génération des baby-boomers, où les conjoints masculins transmettent des biens à leurs partenaires. Ce phénomène observé en Grande-Bretagne devrait également devenir une réalité en Suisse en raison d'évolutions démographiques similaires. C'est une opportunité importante pour le secteur financier de repenser et d'adapter ses services.

L'étude relève que les trois quarts des femmes interrogées considèrent que le sexe de leur conseiller n'est pas une considération primordiale. C'est encourageant, particulièrement si l'on considère qu’aujourd’hui seuls 16% des conseillers sont des femmes. Toutefois, ce chiffre ne suffit pas, à lui seul, à saisir les véritables défis et opportunités qui découlent de cette transition.

Il s'agit d'intégrer les femmes en tant que partenaires à part entière dans la planification financière et de tenir compte de leurs besoins et souhaits spécifiques.

Pourquoi les conseillers bancaires et les gestionnaires de patrimoine devraient-ils prendre cette évolution au sérieux? L'étude met en évidence quatre grandes différences de perception qu'il convient d'aborder:

  1. La fidélité de la clientèle: alors que seulement 34% des femmes interrogées resteraient auprès de leur conseiller bancaire actuel après un divorce ou le décès de leur conjoint, 62% des conseillers s'attendent à une plus grande fidélité de la clientèle. Cet écart indique que les conseillers sous-estiment le risque de perdre un client après un événement marquant de la vie. Il y a donc un besoin urgent de cultiver la confiance et la continuité, surtout en période de grand changement.
  2. Satisfaction: la confiance, la sécurité et l’atteinte des objectifs financiers sont très appréciées des clientes féminines. Malgré cet alignement des valeurs fondamentales, l'étude montre que les conseillers sous-estiment souvent l'insatisfaction de leurs clientes quant aux services proposés. Il s’avère que les aspirations non financières, tels que les voyages ou le temps passé en famille, sont directement liés à l'indépendance financière. Cela souligne la nécessité d'une approche holistique du conseil, qui va au-delà des aspects purement financiers.
  3. Implication dans la planification financière: les femmes relèvent souvent le fait de ne pas avoir été suffisamment impliquées dans la planification financière avant leur veuvage ou leur séparation. C'est ce que confirment 45% des conseillers, qui communiquent principalement avec le partenaire masculin. Seuls 22 pour cent des conseillers affirment que les deux partenaires sont toujours présents lors des entretiens. Cette exclusivité doit être éliminée afin d'impliquer les femmes dans la planification financière sur un pied d'égalité. Il est temps que les conseillers repensent leur stratégie de communication et veillent à ce que les deux partenaires soient activement impliqués dans les discussions financières.
  4. Les besoins financiers: Les femmes peuvent avoir des besoins financiers différents de ceux des hommes. Alors que seulement 46% des femmes se sentent suffisamment couvertes en cas de maladie, plus de 60% des conseillers pensent que leurs clientes sont suffisamment protégées. Cela démontre que les conseillers doivent répondre plus spécifiquement aux besoins individuels de leurs clientes. Il incombe ici aux conseillers de remettre en question et d'adapter leurs pratiques de conseil afin de répondre aux besoins réels de leurs clientes.
    Les clientes souhaitent que leurs conseillers les comprennent mieux, qu'ils communiquent de manière proactive et qu'ils les écoutent davantage. Ces exigences doivent pouvoir être satisfaites et offrent une orientation claire pour le futur service à la clientèle. 

Au vu de ces conclusions, les banques et les gestionnaires de fortune devraient repenser et adapter leurs stratégies. Il s'agit d'intégrer les femmes en tant que partenaires à part entière dans la planification financière et de tenir compte de leurs besoins et souhaits spécifiques. C'est la seule manière d’établir et de maintenir une relation durable et de confiance avec les clients. L'avenir de la gestion de fortune se féminise - et nous devons y être préparés.

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