Oui! à une monnaie à l’abri des crises financières

Ronny Moser

2 minutes de lecture

Réponse à l’article de Jean-Pierre Roth publié sur Allnews le 4 juin 2018.

Le 10 juin prochain, l’électorat suisse se prononcera sur l’Initiative Monnaie pleine qui veut mettre notre argent à l’abri des crises financières.

Dans son article du 4 juin 2018, Monsieur Jean-Pierre Roth nous présente son argumentaire à l’encontre de l’initiative. Trois arguments malheureux pour justifier un système financier ruineux tel que nous l’avons aujourd’hui, système qui fait surtout profiter les banques. Regardons de plus près pour comprendre.

Cette initiative est nécessaire

Le système financier d’aujourd’hui présente un énorme conflit d’intérêt: les banques commerciales sont en même temps compétentes et pour la création monétaire (confirmé par la BNS) et pour l’octroi du crédit. Ce déséquilibre mène forcément vers une prise de risque excessive. Finalement les bénéfices sont privatisés, et les risques supportés par la collectivité. Est-ce bien normal? Quel acteur économique jouit aujourd’hui de manière sous-entendue d’une garantie de l’Etat? La garantie des dépôts mentionnée par Monsieur Roth ne représente en fait que 1,4% des avoirs en circulation. Elle serait bien insuffisante en cas de faillite d’une seule grande banque, qui entraînerait toutes les autres. Monsieur Roth l'affirme lui-même: «En cas de difficulté majeure, nos autorités sauront prendre les mesures exceptionnelles qui s’imposeront.»

L’initiative a pour but de séparer les pouvoirs, aujourd’hui concentrés entre les mains des banques : la création monétaire à la Banque nationale, l'octroi de crédit aux banques privées. Ainsi, la Suisse retrouverait une vraie souveraineté. Les banques commerciales seraient sur un pied d'égalité avec tous les autres acteurs de l'économie, en devant assumer elles-mêmes les risques qu’elles prennent. Avec la Monnaie pleine, la sécurité de l’argent de nos comptes courants ne dépendra plus de la santé financière de la banque. Il y a là une différence fondamentale dans l'approche: Monsieur Roth et les opposants veulent à tout prix sauver les banques, tandis que l’initiative veut sécuriser notre argent!

Cette initiative fera bénéficier la collectivité de la création monétaire

En remettant l’entier de la création monétaire à la BNS, institution démocratiquement légitimée, les bénéfices reviendront à la collectivité. Aujourd'hui, ils ne profitent qu’aux banques commerciales (CHF 34,8 milliards entre 2007 et 2015). Avec l’initiative, ils seront en partie distribués à la Confédération, aux Cantons et aux citoyens, ce qui permettra p.ex. de baisser nos impôts. Les frais de gestion de compte auprès des banques ne seront pas plus élevés qu’aujourd’hui et seront largement compensés par d’autres avantages. En effet, les avoirs de ces comptes seront à l’abri de toute crise financière. Les clients pourront choisir, de placer leur argent sur un compte épargne, s’ils veulent en retirer un revenu d’intérêt. Aujourd'hui nous n'avons pas ce choix.

«Monsieur Roth se trompe largement
en parlant d’une concentration de pouvoir de style communisme.»

La BNS seule sera responsable de la gestion de la masse monétaire. Elle le fera sur la base d’une législation précise et au service de l’économie suisse. Monsieur Roth se trompe largement en parlant d’une concentration de pouvoir de style communisme. Car l’initiative n’étatise pas les banques, elles resteront privées, et une vraie concurrence de marché libre sera rétablie. Les banques retrouveront leur rôle traditionnel d'intermédiaire financier entre prêteur et emprunteur. Elles seront compétentes pour les paiements, la gestion de fortune et l'octroi de crédits, et continueront donc à fournir les mêmes prestations et services qu’aujourd’hui. Mais elles ne pourront plus créer de l'argent elles-mêmes. Elles continueront néanmoins à pouvoir faire un commerce rentable.

Cette initiative est raisonnable et éprouvée

Entre 1891 et 1999, soit durant une centaine d’année, l’article 39 de la Constitution fédérale, consacrait un système de monnaie pleine: «Le droit d’émettre des billets de banque et toute autre monnaie fiduciaire appartient exclusivement à la Confédération». Mais lors de la révision totale de de1999, les termes «et toute autre monnaie fiduciaire» ont été supprimés, sans que la question de la création monétaire n’ait fait l’objet d’un débat public! Depuis, l’émission de monnaie scripturale par les banques a explosé. Ce substitut monétaire n’est pas de la monnaie légale et constitue pourtant aujourd’hui 90% de l’argent en circulation en Suisse. Depuis 1999, les crises bancaires et financières s'enchaînent. Nous nous souvenons particulièrement de celle de 2008. Revenons donc vers le principe d’un système qui a fait ses preuves et qui remet la finance au service de l'économie réelle.

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