Vaccin contre le COVID-19, un remède pour soutenir l’économie

Stéphane Monier, Lombard Odier

3 minutes de lecture

Une avancée majeure dans la recherche d’un vaccin contre le virus devrait intervenir d'ici la fin de l'année, ce qui ouvrira la voie à une réelle reprise économique.

Points clés 
  • Seul un vaccin pourra ouvrir la voie à une reprise économique complète 
  • 243 vaccins sont en cours de développement et dix se trouvent en phase III d'essais cliniques
  • La réponse internationale reste fragmentée avec des stratégies principalement nationales
  • Nous tablons sur une avancée majeure dans la recherche d’un vaccin contre le COVID d'ici la fin de l'année.

Une reprise économique complète dépend du vaccin contre le COVID-19. Tant que l’on ne pourra protéger les populations contre le virus, environ un dixième de l'activité mondiale, y compris les secteurs du tourisme, de l'hôtellerie et du divertissement, ne renouera pas avec son rythme de croissance d'avant la pandémie.

Plus de 240 vaccins contre le COVID-19 sont actuellement en cours de développement, dont dix se trouvent en phase III d’essais cliniques, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Une fois qu'un vaccin atteint cette dernière phase de test, sa probabilité de succès est d'environ 85%, ce qui est considérablement plus élevé que le taux de succès de 60% des médicaments tous types confondus, selon le Conseil américain sur la santé et la science.

Dès le quatrième trimestre de cette année, on devrait commencer à avoir des données sur les résultats des essais thérapeutiques de sociétés biopharmaceutiques telles que Roche/Regeneron, Vir Biotechnology/ GlaxoSmithKline plc, Celltrion Healthcare et AstraZeneca. D'autres, dont Eli Lilly/Abcellera, Amgen, BeiGene/Singlomics et AbbVie, développent également des traitements, ce qui augmente la probabilité d'obtenir au moins une approbation pour les cas les plus graves avant la fin de 2020. 

Les attentes à l'égard d'un vaccin sont essentielles à la poursuite de la relance progressive de l'économie mondiale. Seul un vaccin largement accessible pourrait ouvrir la voie à une reprise économique plus complète. Notre hypothèse de travail est que dès le quatrième trimestre de 2020, un vaccin sera mis à la disposition du corps médical et des personnes âgées, avec une diffusion élargie d'ici le milieu de l'année prochaine. 

Moins mortel, plus gérable

Au niveau mondial, les infections cumulées se montent désormais à plus de 33 millions. Dans de nombreux pays, elles sont supérieures aux pics initiaux de mars et avril. L'augmentation des tests explique cette hausse des infections et si le nombre total de décès recensés depuis le début de la pandémie dépasse désormais le million, l'amélioration des connaissances médicales et des traitements, ainsi que le profil d'âge plus jeune des patients, rendent la pandémie nettement moins meurtrière.

Tant que les taux de mortalité resteront faibles, l'augmentation du nombre d'infections ne modifiera pas les perspectives à court terme. Les gouvernements sont déterminés à éviter le confinement généralisé du mois de mars qui a déclenché un ralentissement économique sans précédent. Aussi inégale que soit la reprise d’un pays à l’autre, les économies se redressent néanmoins grâce à l'amélioration des soins de santé, aux programmes de dépistage et à l'application des mesures de santé publique telles que le port du masque et la distanciation sociale. 

Nous envisageons trois étapes avant un retour à la normalité économique pleine et entière. Premièrement, suite à l’intensification de l’actualité sur le développement des vaccins, les investisseurs entreront dans une période plus volatile. Deuxièmement, une fois que l’on disposera d'un vaccin révolutionnaire, il y aura une longue période de distribution complexe et de défis logistiques pour vacciner certaines populations à risque. Enfin, au deuxième trimestre 2021, on commencera à assister à une distribution plus large auprès d'autres populations. 

La concurrence et non la coopération

La réponse à la grande crise financière de 2008 a été rapide et solidaire. Douze ans plus tard, la pandémie de COVID-19 s'est heurtée à des approches lentes et fragmentées, voire nationalistes et concurrentielles. La pandémie a ainsi mis en évidence les fragilités géopolitiques et l’absence de coopération multilatérale compromettant toute action coordonnée. 

Plusieurs gouvernements représentant 60% de la population mondiale, dont l'Union européenne, le Royaume-Uni, l'Australie, le Canada et le Japon, ont signé le programme commun de l'OMS pour l'achat de vaccins. «Ce n'est pas de la charité, c'est dans l'intérêt de chaque pays», a déclaré le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, «nous nageons ou coulons ensemble». 

Ce programme de l'OMS, connu sous le nom de Covax, et auquel il manque les quatre cinquièmes des 15 milliards de dollars nécessaires, vise à acquérir jusqu'à 2 milliards de doses de vaccins d'ici fin 2021, selon l'organisation. 

Même lorsqu’un vaccin sera disponible, les entreprises pharmaceutiques laissent entendre que la capacité de production se montera à environ 1,3 milliard de doses d'ici la fin de l’année, et à un total de 8 milliards en 2021, ce qui ne permettrait de vacciner qu'un peu plus de la moitié de la population mondiale, en supposant que deux injections distinctes soient nécessaires. L'objectif, à l'instar de la grippe saisonnière, est d'éviter que les contaminations au COVID-19 n’exigent une hospitalisation. La solution la plus rapide à la pandémie de COVID et à la reprise économique «est de faire en sorte que certaines personnes soient vaccinées dans tous les pays, et non pas toutes les personnes dans certains pays», a tweeté Tedros Adhanom Ghebreyesus le 21 septembre.

Les Etats-Unis, la Chine et la Russie ne se sont pas joints à l'initiative de l'OMS, mais ont conclu leurs propres accords ou poursuivent leurs propres programmes de vaccination. Selon l'OMS, des gouvernements représentant 13% de la population mondiale ont déjà réservé plus de la moitié de la capacité mondiale en vaccins. 

En août, la Suisse a signé un accord portant sur 4,5 millions de doses d'un vaccin développé par la société américaine Moderna Therapeutics, et qui protégerait 2,25 millions de personnes. Le gouvernement suisse affirme qu'il est également en pourparlers avec d'autres entreprises. 

La Russie a déjà approuvé un vaccin, connu sous le nom de Spoutnik V, pour traiter certaines personnes à haut risque et le président Vladimir Poutine a ordonné que le personnel de santé soit vacciné en priorité, avec un déploiement à l'ensemble de la population prévu pour le début de l'année prochaine. Les autorités chinoises ont également approuvé la distribution d'un vaccin au sein de l'armée et devraient commencer à diffuser ce traitement prophylactique à plus grande échelle dès le mois de novembre.

Tant que ce virus circulera, la possibilité subsiste qu'il mute en quelque chose de plus - ou moins - dangereux. Heureusement, le virus semble moins capable de mutations importantes que la grippe, ce qui suggère que le seuil d'efficacité supérieur à 50% fixé par les autorités de réglementation est réaliste.

Une première pour le XXIe siècle

Il semble raisonnable de penser qu'une grande partie des efforts de l'industrie de la santé pour identifier des thérapies et un vaccin, ainsi que les mesures de santé publique et les applications de traçage, commenceront à porter leurs fruits dans les mois à venir. 

Il s'agit de la première pandémie mondiale depuis un siècle. Il serait téméraire de présumer que ce sera la dernière. Pourtant, comme l'a récemment écrit Eric Schmidt, ancien PDG de Google, c'est aussi la première fois dans l'histoire que l’on dispose de technologies permettant de faire face aussi rapidement à une pandémie, grâce à l'analyse, au traçage et aux traitements ainsi qu'à d'éventuels vaccins. 

La découverte d'un vaccin révolutionnaire nous inciterait à augmenter le niveau de risque de nos portefeuilles. En attendant, nous continuons à surveiller l'impact de cette course aux vaccins sur nos perspectives macroéconomiques. 

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