Un monde un peu fou

Salima Barragan

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Romain Boscher, CIO actions monde de Fidelity, mise sur le retour en grâce des titres de valeur.

Des politiques monétaires non-conventionnelles, des marchés actions haussiers malgré une conjoncture incertaine, des banques centrales devenues acheteuses d’actions; l’environnement boursier est inédit. De ce fait, Romain Boscher, CIO de Fidelity, estime qu’un retour à la moyenne des cours des actions est peu probable. Il favorisera les titres de valeur, à l’exception des banques pénalisées par des taux faibles voire négatifs.

TAUX BAS QUI PERDURENT

Les investisseurs dissocient les taux d’intérêt historiquement bas des bruits politiques. A tort…car ces deux facteurs sont liés: «En plus d’une inflation inexistante, les craintes politiques obligent aussi les banques à rester accommodantes», explique Romain Boscher. Ces bruits de fond politiques ne défavoriseraient ainsi pas les actifs risqués…tant qu’ils n’accaparent pas l’attention des financiers. «Les investisseurs auraient avantage à se concentrer sur les bénéfices par action (EPS) qui constituent le meilleur indicateur des performances futures», estime Romain Boscher.

«Ces conditions de financement avantageuses encouragent
l’indiscipline budgétaire par des politiques de croissance externe relutives.»
POINTS D’INFLEXION

L’indice SOXX, un indicateur de l’activité industrielle très suivi par les stratégistes parce qu’il retrace la performance du secteur des semiconducteurs, a connu un creux de la vague en été 2019 que Romain Boscher interprète comme une courte récession industrielle. Similairement, les bénéfices par action (EPS) dopés par les baisses continues de taux et d’impôts sont reparti à la hausse après quelques mois de stagnation. Fidelity s’attend pour 2020 à une reprise durable de la profitabilité des entreprises à travers le monde.

COûT DE FINANCEMENT AU PLUS BAS

En revanche, la faiblesse des taux d’intérêt a réduit le coût des actions lorsque les entreprises rachètent leurs propres actions (ou celles de leurs concurrents) en s’endettant davantage. «Ces conditions de financement avantageuses encouragent l’indiscipline budgétaire par des politiques de croissance externe relutives», souligne Romain Boscher qui se méfie des entreprises rentrées dans de telles opérations financières alors que les cours des actions sont à des hauts historiques.

«Nous nous intéressons aux entreprises japonaises industrielles
dont les carnets de commande avaient baissé de 40%.»
RETOUR DES TITRES DE VALEUR

Pour 2020, Fidelity table sur une performance à un chiffre des marchés actions. Néanmoins, le gérant d’actifs réalloue ses portefeuilles afin de réduire l’exposition aux titres de croissance surévalués en faveur d'un retour dans l'espace valeur. «Nous n’investirons plus dans les valeurs de croissance dont les acteurs les moins profitables seront sévèrement sanctionnés», explique le spécialiste qui surpondère les titres de valeurs – exceptés ceux des banques dont les marges souffrent des taux bas - ainsi que les titres de qualité.

La reprise du cycle après «un atterrissage en douceur» profitera aux régions cycliques comme le Japon. «Nous nous intéressons aux entreprises japonaises industrielles (outils et machines) dont les carnets de commande avaient baissé de 40%», explique Romain Boscher. Fidelity table sur le redressement des valeurs industrielles mondiales dont l’automobile et rachète également certains titres du secteur de la technologie en maintenant un biais qualité: «car en fin de cycle de crédit, les entreprises endettées sont à proscrire», conclu-t-il.