Rester dans le train, choisir le bon wagon

François Mollat du Jourdin, MJ&Cie

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La sortie de crise semble, potentiellement, à portée de main, mais il faudra compter avec un changement de paradigme.

L’année 2021 aura été exceptionnelle pour les investisseurs qui ont pu engranger des performances à deux chiffres sur de nombreux actifs, cotés ou non cotés. Si, à court terme, beaucoup d’incertitudes déstabilisent – un peu – des marchés déjà allergiques aux variants tels qu’omicron, le fait est que les banques centrales ont résolument poursuivi leur action et continué de «doper» l’économie à coup de liquidités quasi gratuites. Prochaine fin de partie après les dernières annonces de la Fed? Sur le moment, les marchés ne semblent cependant pas s’en émouvoir.

Alors une sortie de crise, potentiellement, à portée de main? Il faudra tout de même compter avec un changement de paradigme, en particulier géopolitique – la confrontation, politique, commerciale et financière entre la Chine et les Etats-Unis, mais également l’accélération de la «nombrification du réel»1.

Surtout, de grands points d’interrogation demeurent. Comment l’hyperendettement des Etats sera-t-il combattu? Par une hyperinflation, une forte progression des taxes ou des coupes sombres dans les budgets? A plus brève échéance, quelle attitude adopter vis-à-vis de taux d’intérêt qui progressent, comme c’est le cas aux Etats-Unis?

Il convient de naviguer avec le bon sens qui veut que les arbres ne montent pas au ciel, tout en se gardant bien de sauter d’un train qui continue à se déplacer à grande vitesse et produit des performances bienvenues.
Prudence avec TINA

Sur cette toile de fond qu’il convient de garder en tête, l’investisseur sera bien inspiré d’orienter ses choix en fonction de thématiques solides. En dépit des soubresauts sur le marché des taux américains, TINA (There Is No Alternative to stocks) garde la vedette. Cependant, volatilité oblige, la robustesse de portefeuilles prime: la préférence ira donc aux actifs de qualité, cotés ou non cotés, et à l’immobilier. Tout ce qui génère des revenus, qu’il s’agisse de dividendes, de coupons ou de loyers, devra permettre d’absorber l’inflation qui, comme l’a reconnu le président de la Fed, Jerome Powell, ne sera pas «transitoire».

Dans ce contexte, maintenir fermement le cap sur le long terme est crucial. La prudence dicte également de prendre régulièrement ses bénéfices de manière à pouvoir réallouer ses actifs et, le cas échéant, tirer parti des épisodes de fortes baisses qui constituent souvent des opportunités d’achat dans des marchés généralement chers.  Jusqu’à présent, les opérateurs ont profité des baisses pour revenir sur les marchés et cette tendance devrait se maintenir tant que les liquidités qui cherchent à se placer restent abondantes. Sauf événement géopolitique mondial, le «grand retournement» qui viendrait remettre en question le fonctionnement actuel de la machine financière se produira en effet lorsque les acteurs du marché réaliseront que les banques centrales retirent leur soutien à l’économie.

D’ici là, il convient de naviguer avec le bon sens qui veut que les arbres ne montent pas au ciel, tout en se gardant bien de sauter d’un train qui continue à se déplacer à grande vitesse et produit des performances bienvenues. Toute la question est de choisir les bons wagons. Et le marché chinois qui a reculé de 16% cette année alors que les marchés développés progressaient de 20% pourrait être l’un d’entre eux. Car une fois le «nettoyage» actuel terminé, il ne fait guère de doute que le pays retrouvera le chemin de la croissance. C’est aujourd’hui qu’il faut se souvenir qu’en mandarin, crise et opportunité sont intimement liées.

 

1 Olivier Rey in «Quand le monde s’est fait nombre» page 8, le chercheur utilise le terme de «nombrification»  pour distinguer la quantification du réel de la «numérisation»  qui «désigne une codification des données en vue de leur traitement informatique.

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