Pour la réassurance, la «maison brûle toujours»

AWP

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La facture des catastrophes assumée par les réassureurs est encore alourdie par la crise du COVID-19, à hauteur de 35 à 50 milliards de dollars selon S&P.

Avec 12 milliards de dollars de pertes au premier semestre dues à la crise liée au COVID-19, les grands réassureurs mondiaux craignent un alourdissement de la facture avec la prolongation de l’épidémie et la survenue de nouvelles catastrophes.

«La crise actuelle va coûter cher au secteur de la réassurance», a confirmé mardi Marc-Philippe Juilliard, directeur chez S&P Global Ratings lors d’une téléconférence sur la réassurance mondiale.

L’épidémie de COVID-19 a ainsi coûté à fin juin entre 35 et 50 milliards de dollars au secteur mondial de l’assurance et la réassurance, selon une estimation fournie par l’agence de notation.

Cet événement vient alourdir significativement la facture assumée par les réassureurs dont l’activité consiste à couvrir les assureurs.

Selon l’agence de notation, les lignes d’activités d’assurance les plus affectées par la crise du Covid-19 sont l’annulation d’événements, l’assurance de prêts immobiliers, l’assurance-crédit (couvrant les entreprises sur les risques d’impayés de leurs clients) et, dans une moindre mesure, l’interruption d’activité commerciale et le secteur de l’aviation.

En revanche, l’assurance automobile et les assurances couvrant les risques de décès devraient rester peu sensibles aux effets de l’épidémie.

Le coût de cette crise pour les vingt premiers réassureurs mondiaux a lui été de 12 milliards de dollars à fin juin, soit environ 30% de la facture totale pour l’ensemble du secteur de l’assurance, a développé Marc-Philippe Juilliard.

Ce qui représente aussi la majeure partie des 20 milliards de pertes enregistrées par ces vingt réassureurs au terme du premier semestre, «un chiffre tout sauf négligeable», relève ce spécialiste de l’assurance.

Impact sur de nombreux trimestres

Et «la pandémie n’est pas encore terminée - la maison brûle toujours», affirme-t-on chez Swiss Re, numéro un mondial de la réassurance.

«Nous prévoyons que la perte sera bien plus importante que cela», déclare à l’AFP Thierry Léger, responsable des souscriptions. «L’impact sur les résultats des assureurs et des réassureurs se fera sentir sur de nombreux trimestres à venir», anticipe-t-il.

Mais d’ores et déjà, «les pertes liées à l’épidémie et d’autres catastrophes ont déjà épuisé les budgets annuels alloués pour faire face aux évènements catastrophiques de plusieurs réassureurs», affirme pour sa part James Eck, vice-président crédit de l’agence de notation Moody’s.

Selon S&P Global Ratings, le budget alloué aux catastrophes et les revenus mis en réserve par les vingt premiers réassureurs ont diminué de plus de moitié passant d’environ 32 milliards de dollars à environ 14 milliards.

Les deux agences de notation ont décerné une perspective d’évolution négative au secteur. Pour l’heure, près de 20% des notes attribuées aux réassureurs sont désormais sous perspective négative, précise-t-on chez S&P Global Ratings.

En cause, les performances opérationnelles des groupes et leur rentabilité, déjà progressivement rognée depuis cinq ans par les taux bas et des années particulièrement coûteuses en catastrophes climatiques. Leur impact avait ainsi atteint un record de 350 milliards de dollars en 2017.

Crainte de nouvelles catastrophes

Assureurs et réassureurs retiennent ainsi leur souffle en pleine saison cyclonique. Le numéro deux du secteur Munich Re disait prévoir lundi, après le passage cet été des ouragans Hanna, Isaias et Laura, des demandes d’indemnisation pour plus d’une centaine de millions d’euros.

Sans compter d’autres sinistres dont les coûts n’ont pas encore été estimés tels que les incendies survenus en Californie ou l’explosion début août dans le port de Beyrouth.

Même s’»il est trop tôt pour le dire», ce sinistre «se chiffrera en milliards de dollars», selon M. Juilliard.

Seule la Banque mondiale a livré fin août une première évaluation des dommages et pertes économiques comprise entre 6,7 et 8,1 milliards de dollars.

Mais la pandémie de coronavirus promet de bouleverser le fonctionnement du secteur. Cela «doit être une leçon pour nous tous : nous devons agir plus rapidement et plus vigoureusement pour ne pas être aussi mal préparés que nous l’étions avec le Covid-19 à des risques tels que les cyberattaques ou le changement climatique», affirme dans un communiqué Torsten Jeworrek, l’un des administrateur de Munich Re.

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