Marchés et fondamentaux

Vania Mareuse, AMS Asset Management Services

2 minutes de lecture

Le rebond du marché est-il durable ou allons-nous vers une confirmation d’un bear market?

En 6 semaines les marchés ont dévissé de 35% puis rebondi de 34%, le Nasdaq a perdu 30% pour revenir au niveau de janvier, des millions de boutiques ont fermé dans le monde, on constate deux cent vingt mille morts et plus de deux cents millions de chômeurs au niveau global dont une grande partie ne retrouvera pas de travail avant plusieurs mois.

Les PIB des principales économies sont en baisse d’au moins 10%. Nous assistons à une récession mondiale comme jamais observée par le passé en temps de paix, l’un des mois le plus terribles de l’histoire. Mais le marché rebondit!

Comment s’explique le sursaut d’avril
  • Par une réaction des investisseurs qui amalgament, dans leur analyse, l’évolution de la pandémie avec la situation économique. Imaginant, à tort, que si la pandémie est sous contrôle l’activité repartira comme si de rien n’était. C’est oublier que les carnets de commandes des entreprises sont au plus bas et que leurs stocks sont élevés. Et que la consommation des ménages aux USA a chuté de 7,5% en mars, une des plus grandes baisses enregistrées.
Les algorithmes sont peu fiables pour anticiper
les évolutions de marchés à moyen terme.
  • Par le soutien des banques centrales qui redonne confiance aux investisseurs mais l’énorme contraction des PIB demandera des mois à se résorber.
  • Par des algorithmes qui génèrent des oscillations en zig zag, car ils sont tous construits sur un modèle commun : une moulinette de formules mathématiques savantes qui interprètent le futur à partir des mouvements passés. Ce qui les rend peu fiables pour anticiper les évolutions de marchés à moyen terme.
  • Par des hedges funds qui ont souvent des stratégies tendancielles, avec un net long et peu de mouvements dans le mois.
  • Par le retour de gérants de fonds qui ne veulent pas rater une hausse en V en se positionnant en avance sur des grandes sociétés, croyant retrouver un rythme de croissance normale rapidement. La NAAIM indique, à ce propos, une exposition longue de 80% des managers de fonds aux US, contre 25% en mars avec donc peu de cash à être réinvesti. 
Les fondamentaux ont-ils été oubliés?

Les investisseurs réagissent comme s’il s’agissait d’un épiphénomène qui ne durera que quelques mois avec une activité quasi-normale ensuite. Mais le choc déflationniste provoqué par le COVID-19 est unique dans l’histoire, car le monde entier le subit au même instant. 

Il ne faut pas espérer voir un redressement en V mais plus en U
avec des hauts et des bas sur les marchés pendant encore plusieurs mois.

Les conséquences ne se limiteront pas à une demande des consommateurs qui reprendrait au rythme actuel dans plusieurs mois, mais aussi à l’endettement d’Etats dont on peut douter le remboursement intégral, avec pour conséquence des moratoires supportés par les épargnants au travers des contrats d’assurance vie en euro ou sur les livrets d’épargne.

Il devient aujourd’hui plus sécurisant d’investir sur des obligations Corporate et une fois les perspectives économiques clarifiées sur les titres des grosses capitalisations, il faudra d’abord retrouver des ratios d’évaluation plus raisonnables qu’aujourd’hui et adapter à une situation économique dégradée, ce qui correspondrait à un S&P aux alentours de 2’400 (soit une baisse de 15%).

Il ne faut pas espérer voir un redressement en V mais plus en U avec des hauts et des bas sur les marchés pendant encore plusieurs mois. Une récession ne se récupère pas en quelques semaines mais en plusieurs trimestres. Techniquement le S&P, après un retracement de Fibonacci de 61%, devrait redescendre dans un premier temps à 2’650 puis 2’400 points. Le Nasdaq suivrait une configuration similaire avec un retracement de Fibonacci de 75% et devrait retourner sous les 7’800 points.

En conclusion donc

Il est faux de penser que les liquidités injectées par les banques centrales permettront une remontée des cours et un rétablissement de l’économie en quelques mois. Elles permettront seulement une stabilisation des sociétés qui sont solides financièrement et autoriseront un financement à bas coûts des Etats, dans l’espoir que la dette sera tout simplement abandonnée … ce qui n’est pas pour plaire aux Allemands et aux Hollandais à l’heure qu’il est.

Il est probable que nous verrons les marchés repartir à la baisse avant l’été.

Il est inexact d’imaginer que les carnets de commande des sociétés vont se remplir instantanément, que les résultats des entreprises vont être au rendez-vous dans les mois qui viennent et que l’emploi se rétablira aussi vite qu’il s’est désagrégé. 

Il est probable que nous verrons les marchés repartir à la baisse avant l’été et y rester jusqu’à ce que l’activité économique montre des signes positifs sérieux, avec des anticipations de gains des entreprises plus encourageants. 

En ce qui nous concerne, nous restons très sélectifs et n’investissons sur quelques titres qui pourraient rebondir rapidement, en Chine par exemple, mais demeurerons probablement baissiers sur les marchés occidentaux jusqu’à la fin de l’année.

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