Malgré la récente hausse des rendements, les obligations restent séduisantes

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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Les taux ont augmenté pour l’ensemble des échéances un peu partout dans le monde. Les banques centrales ont souligné qu’il était trop tôt pour «crier victoire» dans la lutte contre l’inflation.

© Keystone

En septembre, les marchés des emprunts d’Etat ont évolué dans un contexte défavorable. Ainsi, ils ont achevé un troisième trimestre éprouvant, face à la perspective de taux directeurs durablement élevés aux Etats-Unis comme dans la zone euro. Décryptage.

Le rendement des bons du Trésor américain à dix ans a augmenté de 50 points de base (pb) en septembre, passant de 4,11% à 4,61%. Sur l’ensemble du troisième trimestre, il a bondi de 74 pb. S’agissant des rendements à trente ans, ils ont augmenté de 89 pb au cours du trimestre, la plus forte augmentation depuis début 2009.

La même tendance a été observée dans la zone euro, où le rendement du Bund allemand à dix ans a grimpé de 2,47 à 2,86% entre le début et la fin du mois de septembre.

Toutefois, malgré les difficultés auxquelles les investisseurs obligataires ont été confrontés dernièrement, la récente hausse des rendements obligataires appelle plusieurs remarques.

1. La hausse n’est pas le fruit d’une augmentation des anticipations d’inflation

Aux Etats-Unis, les points morts d’inflation à dix ans sont restés relativement stables ces dernières semaines et se situent actuellement à 2,39%. C’est le cas également en Europe où la hausse des rendements obligataires est le fruit de l’évolution des taux réels. En effet, le rendement réel du Bund allemand à dix ans était de 0,50% il y a environ dix jours, son plus haut niveau depuis 2011.

Les récentes fluctuations de cours sont probablement de nature technique dans la mesure où elles concernent notamment les taux longs et ultra longs. S’agissant des taux courts, ils ont été relativement stables après la dernière réunion du comité de politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed). Voilà pourquoi on privilégiera le segment cinq à dix ans de la courbe des rendements, d’autant qu’il est moins influencé par les facteurs techniques que le segment dix ans et plus.

2. Aux Etats-Unis, l’augmentation de l’offre de bons du Trésor semble causer une « indigestion » temporaire dans les rangs des investisseurs en obligations

Avec le passage de l’assouplissement quantitatif au resserrement quantitatif (QT), la Fed – qui était un acheteur de poids – s’est retirée du marché, tandis que les émissions ont augmenté pour financer le déficit budgétaire grandissant.

Même si elle a joué un rôle dans la récente baisse des cours sur le marché obligataire, la Fed est soucieuse de préserver la stabilité financière, ce qui l’amènera sans doute à intervenir, si nécessaire, pour assurer le bon fonctionnement du marché des bons du Trésor. Au printemps dernier, après l’effondrement de la Silicon Valley Bank, la Fed avait d’ailleurs créé de nouvelles facilités de prêt pour apporter des liquidités.

3. Les fluctuations des rendements ont peut-être été amplifiées par les changements de positionnement

Alors que le cycle de resserrement monétaire touche à sa fin, les marchés obligataires ont commencé à spéculer sur des baisses de taux directeurs en 2024. Par conséquent, le positionnement long sur les obligations, avant la baisse des rendements attendue l’an prochain sur fond d’assouplissement de la politique des banques centrales, faisait consensus parmi les participants au marché.

Toutefois, ces derniers étaient sans doute allés un peu vite en besogne en tablant sur un assouplissement rapide de la politique monétaire de la Fed. Ces dernières semaines, les données de la CFTC (Commodity Futures Trading Commission) mettent en évidence une diminution des positions longues, les investisseurs ayant ajusté leur exposition.

Ralentissement de l'économie

La hausse des rendements a certainement été amplifiée par ces facteurs techniques. A l’avenir, que l’atterrissage de l’économie se fasse en douceur ou dans la douleur, l’activité économique américaine et mondiale devrait ralentir l’an prochain. La décrue de l’inflation devrait améliorer le rendement réel des obligations, malgré le récent rebond des prix de l’énergie.

Les rendements obligataires aux Etats-Unis restent nettement supérieurs à leur niveau d’équilibre à long terme. Leur diminution est envisageable à mesure que les perspectives macroéconomiques deviendront plus porteuses pour les obligations.

Dans cet environnement, la Recherche d’UBS affiche toujours une préférence pour les obligations de grande qualité arrivant à échéance dans cinq à dix ans. Elle envisage un rendement de 3,5% d’ici douze mois pour les bons du Trésor américain à dix ans dans son scénario de référence, de 4% dans son scénario optimiste (croissance) et de 2,75% dans son scénario pessimiste (récession). Et comme lorsque les rendements des obligations baissent, leurs prix augmentent, cela se traduit respectivement par une performance (rendement total) de 14% (scénario de base), 10% (croissance) et 20% (récession).

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