Le consensus, ce faux-ami

Jean-Christophe Rochat, Banque Heritage

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Face à des prévisions économiques toujours plus incertaines, la fiabilité du consensus est remise en question.

 

Les débuts d'année sont une période particulièrement favorable pour les prévisionnistes, à la fois sur le plan de la macroéconomie, des marchés des devises et des rendements anticipés des places financières. Cependant, ce processus devient bien plus complexe lorsqu'il s'applique aux sciences humaines et sociales, intrinsèquement influencées par les comportements humains. Les écarts récurrents entre les prévisions et les résultats réels en témoignent. 

Les turbulences politiques se multiplient aux États-Unis, en Europe, au Canada, au Japon, et dans d'autres régions, tandis que l’ascension d’un «Sud global» mené par la Chine alimente ce climat d’incertitude. Enfin, la multipolarité croissante des relations internationales, qui semble s'installer durablement, réduit davantage la visibilité.

«Prévoir, c’est déjà agir»

Pour les investisseurs, l'agrégation d'un grand nombre de prévisions permet d’établir des consensus. Une fois construits comme une moyenne ou une médiane, ces derniers servent de références pour qualifier les opinions, voire les décisions d'investissement des professionnels. Dans le contexte mondial particulièrement perturbé que nous vivons, il est fort probable que ce travail de prévision perde en finesse et en précision. Mais qu'importe, les investisseurs garderont un œil avisé sur les consensus. Ce qui s’appelle dans le jargon «un processus d’investissement», est en fait leur mode de fonctionnement habituel. S'en écarter reviendrait à prendre un risque non négligeable pour leur carrière.

 L’administration Trump, protectionniste, préférerait une devise moins forte et donc plus compétitive. Comme lors de son premier mandat, Donald Trump n’hésitera pas à prendre toutes les mesures nécessaires pour y parvenir. 

L’exceptionnalisme américain semble avoir de beaux jours devant lui, avec une forte croissance économique, une hausse du dollar américain (dollar), une surperformance de Wall Street, une bonne tenue des «Big Tech» et des petites capitalisations, une sous-performance des titres européens et une détérioration de la situation en Chine.

Un dollar toujours plus haut

Il existe un large faisceau de facteurs hautement favorables à l’appréciation prolongée du dollar par rapport aux principales devises concurrentes:

  • L’accroissement du différentiel des taux d'intérêt avec ces dernières;
  • La plus grande vigueur de la croissance économique et de l'inflation américaines; 
  • L'imposition à grande échelle de droits de douane à la majorité des partenaires et rivaux commerciaux de l'Oncle Sam;
  • La déréglementation débridée;
  • Le développement et l'adoption rapides d'outils d’IA au service de la productivité des entreprises américaines;
  • Le déclin relatif de l'Union européenne face au spectre de la paralysie politique.

Pourtant, en y regardant de plus près, on constate que la force du dollar résulte avant tout d'un afflux régulier et massif de capitaux internationaux sur le marché américain ces derniers mois. Ces capitaux sont notamment investis dans la bourse américaine, et cela s’est accentué depuis l'élection de Donald Trump, connu pour ses politiques pro-business. À tel point que les positions des opérateurs volatils et spéculatifs atteignent désormais des sommets. Dans ce contexte, il semble peu probable qu'un soutien accru au billet vert, sous forme de nouveaux flux de capitaux, se matérialise à court terme.

Le dollar est (très) cher en termes de parité de pouvoir d’achat, comme au niveau des taux de change pondérés (nominal et réel). L’administration Trump, protectionniste, préférerait une devise moins forte et donc plus compétitive. Comme lors de son premier mandat, Donald Trump n’hésitera pas à prendre toutes les mesures nécessaires pour y parvenir. A court terme, rien ne presse, car la vigueur du dollar accroît la position de force des États-Unis dans les négociations sur les droits de douane. Mais à moyen terme, la situation pourrait bien évoluer…

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