Le come-back de l’or

Salima Barragan

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Hausse de 18% sur un an: l’incertitude est payante pour le métal jaune.

©Keystone

Les commentaires sur la hausse des marchés actions abondent. A juste titre, car elle a pris par surprise un bon nombre de stratégistes prudents en début d’année. Mais la performance de l’or - qui brille, qui brille – s’est faite plus discrète. Le déclin brutal du métal jaune de 2012 à 2016 ravive certainement quelques souvenirs amers mais après deux ans et demi d’évolution en dents de scie et une flambée à 1'500 dollars l’once, le moment est-il venu de se repencher sur son cas? Le come-back de l’or en quelques points. 

Médaille d’or des matières premières

Dans le climat d’incertitude de la guerre des tarifs, l'or est devenu l’une des meilleures polices d’assurance. «Tant que les différends commerciaux ne sont pas résolus, l'or, en tant qu'actif refuge, continuera d'être l'un des produits favoris des investisseurs», lit-on dans une note d’investissement de WisdomTree qui estime que beaucoup sont en quête d’actifs historiquement sûrs.

Les actions se sont également bien comportées.
Pour expliquer ce paradoxe, Invesco avance le concept de la «prime Trump».

Pourtant, les actifs - dits non sûrs - comme les actions se sont plutôt bien comportés malgré le contexte commercial tendu. Pour expliquer ce paradoxe, Invesco avance le concept de la «prime Trump»: si les actions mondiales ont célébré l’élection de Trump dans l’euphorie, les inquiétudes se sont exprimées dans le cours de l’or qui traite avec une nouvelle prime de risque. Peut-on en conclure que si Trump n’est pas réélu, cette prime s’éteindra et le cours de l’or retombera?

A l’heure des taux négatifs

Lors d’une interview récente, Marc Faber, illustre éditeur du Gloom Doom & Boom report, explique que l’or, ne dépendant ni de la conjoncture chinoise ni du ralentissement de l’économie globale, doit sa hausse aux politiques monétaires des banques centrales: «si les banques centrales impriment de la monnaie, l’or devrait monter à long terme».  Sans surprise, il concède également que l’or constitue sa plus grosse position individuelle. A l’heure où les investisseurs paient pour acheter de la dette gouvernementale, Marc Faber souligne que «pour la première fois de l’histoire, les taux nominaux sont négatifs et compte tenu des rendements négatifs sur les obligations, l’or n’est pas cher». 

Dans le même esprit, WisdomTree estime que l’or n’est plus desservi par sa rémunération inexistante, toujours plus attractive que les rendements négatifs des obligations d'Etat: «les politiques monétaires des banques centrales devraient demeurer accommodantes l’an prochain donc une baisse significative du montant de la dette à rendement négatif semble peu probable. Ce qui continuera d'être favorable pour l'or».

Le milliardaire canadien Franck Giustra estime
que le boom de l’or est dans sa troisième et dernière phase.

Les taux bas ont ainsi fait décroitre le fameux coût d’opportunité de la détention d’or qui n’offre pas de rendement comme une obligation ou une action assortie d’un dividende. Pour cette raison, UBS s’attend aussi à une appréciation de l’or pour l’année prochaine - quoique plus dans une moindre mesure – avec la certitude que la croissance économique atone maintiendra les taux d'intérêt au plancher. La banque ajoute également que le prix de l’or étant fixé en dollar américain, une faiblesse de ce dernier (actuellement survalorisé) pousserait le cours à la hausse.

Refuge anticrise

Dans un post LinkedIn, Ray Dalio, fondateur du hedge fund Bridgewater, écrivait que la répression financière des banques centrales a créé une hausse artificielle des actifs risqués: «en conséquence, un trop grand nombre de personnes détiennent ces actifs et seront confrontées à des rendements décroissants». Aux yeux de Dalio, lorsque les conflits émergeront et que l'argent se dépréciera, les détenteurs d’or seront les mieux lotis.

Récemment, les banques centrales - en particulier celles des marchés émergents - ont augmenté leurs réserves d'or pour couvrir leurs expositions en devises étrangères (ce qui a notamment soutenu la tendance haussière). Ces achats matérialisent-ils leurs craintes de turbulences éminentes sur les marchés des devises? Quoi qu’il en soit, selon le World Gold Council, les crises monétaires mèneront l’or au sommet…encore faut-il qu’une crise majeure se déclare.

Pour conclure, le milliardaire canadien Franck Giustra estime que le boom de l’or est dans sa troisième et dernière phase. La première vague a déferlé en 2001. Puis les émissions de monnaie des banques centrales en 2009 ont amorcé la deuxième phase haussière. Selon l’homme d’affaires actif dans l’industrie minière (et accessoirement producteur de films) cette troisième et dernière vague sera explosive.

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