L’inflation inquiète, mais la reprise continue

Esty Dwek, Natixis Investment Managers Solutions 

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Les bons du Trésor semblent avoir dépassé le pire des craintes inflationnistes, suggérant une stabilisation continue.

La poursuite de la réouverture des Etats-Unis et de l'Europe soutient le rebond des données économiques, qui devraient rester très solides pendant un certain temps. Aux Etats-Unis, le marché du travail reste atone, mais les enquêtes ISM et PMI font état d'une forte croissance. En Europe, avec l'accélération des campagnes de vaccination, les données progressent comme en témoigne la hausse de l'indice PMI des services en mai. Avec la proposition de la Commission européenne de suspendre les règles de déficit jusqu'à fin 2023, les pays pourront rester plus expansionnistes fiscalement.

En dépit des chiffres très élevés de l'inflation en mai, la Fed ne devrait pas modifier sa trajectoire vers un tapering et une hausse des taux, car nombre de ses composantes semblent encore transitoires. De plus, l'inflation sous-jacente a progressé, mais moins qu'en avril, et la «reprise inclusive» de la Fed n'est pas encore arrivée à un taux de participation au marché du travail encore faible. La Réserve fédérale pourrait commencer à réfléchir à la réduction du QE lors de sa réunion de la semaine prochaine, même si celle-ci ne devrait débuter qu'en 2022 et les hausses de taux en 2023. 

Biden obtiendra sans doute certaines dépenses d'infrastructure,
au prix de quelques mois supplémentaires de négociations.

Les marchés vont probablement bien absorber cette annonce, si bien qu’un «tantrum» n’est pas à prévoir. En Europe, la BCE a prolongé le rythme actuel de hausse des achats d'actifs pour un quart de plus, comme largement anticipé, afin de limiter le rendement des Bunds.

Les négociations entre la Maison Blanche et les sénateurs républicains au sujet d'un projet de loi d'infrastructure bipartisan se sont écroulées, car les désaccords sur l'ampleur et la couverture du paquet demeuraient inconciliables. Biden s'adresse désormais à un groupe distinct de Républicains, mais le leader de la majorité au Sénat Schumer cherche déjà des moyens de faire adopter le paquet d'infrastructures selon des lignes partisanes uniquement. Quelle que soit la forme qu'il prendra, Biden obtiendra sans doute certaines dépenses d'infrastructure, au prix de quelques mois supplémentaires de négociations.

Par ailleurs, l'administration Biden a dévoilé comme prévu une nouvelle liste de sociétés chinoises liées à l'industrie de la défense et de la surveillance, dans lesquelles les investissements américains sont interdits. Toutefois, si le nombre de sociétés est aussi élevé, le périmètre est plus modeste par rapport à la liste de l'administration Trump, puisqu'elle ne prend pas en compte les filiales des sociétés ciblées.

Sur le plan fiscal, les pays du G7 ont convenu de soutenir une nouvelle taxe mondiale minimale d'au moins 15% que les entreprises devraient payer, quel que soit le lieu de leur siège social. Un accord avec les pays du G20 au sens large est également possible et il pourrait être signé d'ici la fin de l'année. Toutefois, cet accord n'est pas contraignant, ce qui suggère que certains pays à fiscalité plus faible pourraient ne pas signer, et avec un taux d'imposition des sociétés américain déjà supérieur à 15%, l'impact pourrait être plus faible que prévu. Pourtant, la coopération entre les Etats-Unis et l'Europe à ce sujet suggère moins de risques autour de la taxe numérique et des combats tarifaires dans les mois à venir.

La réouverture en cours devrait continuer à soutenir les prix du pétrole,
même si l'offre abondante devrait les plafonner à moyen terme.

Sur le front des matières premières, l'Opep+ a accepté d'augmenter sa production de 2 mn/jour d'ici fin juillet, mais la nouvelle était attendue et n'a pas eu d'impact sur la récente dynamique du pétrole. Le WTI et le Brent se négocient actuellement à plus de 69 dollars et 71 dollars le baril, soit leur plus haut niveau depuis deux ans. La réouverture en cours devrait continuer à soutenir les prix, même si l'offre abondante devrait les plafonner à moyen terme, surtout si les Etats-Unis et l'Iran conviennent d'un nouvel accord nucléaire.

Enfin, le dollar américain a récemment rebondi depuis son plus bas niveau depuis avril. Compte tenu de la stabilité des rendements et de l'amélioration des données en dehors des Etats-Unis, le dollar pourrait rester sous pression, même si une croissance plus forte et un portage plus élevé devraient limiter la baisse. De son côté, l'or semble avoir trouvé un soutien de l'ordre de 1’900 dollars l'once (en hausse de 11% depuis les points bas de mars), bénéficiant de la volatilité du secteur crypto. Une amélioration de la demande d'or est à anticiper avec la réouverture des économies émergentes, qui devrait se traduire par une amélioration de la demande physique, en particulier en Inde.

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