L’impact de la réglementation des technologies en Chine

Daryl Liew, Reyl Singapore

2 minutes de lecture

Le respect de ces nouvelles exigences en matière de licence aura sans aucun doute un impact sur la rentabilité des activités de la Fintech.

Après un parcours exceptionnel en 2020, le marché boursier chinois a démarré de manière mitigée cette année. L'une des raisons de cette mauvaise performance est la surveillance réglementaire accrue du secteur technologique chinois, déclenchée par la suspension de l'introduction en bourse du groupe Ant en novembre dernier. Ces risques réglementaires peuvent être classés en trois grandes catégories.

La première consiste à éradiquer les pratiques de monopole des grandes entreprises technologiques. À cet égard, la commission anti-monopole chinoise (SAMR) vient de sanctionner Alibaba avec une amende record de 18 milliards de RMB pour comportement monopolistique sur le marché – plus précisément, pour avoir imposé l'exclusivité des ventes, connue sous le nom de «choose one from two» - Alibaba ayant interdit à ses vendeurs d'ouvrir des magasins en ligne ou de mener des actions de promotion avec des plateformes de commerce électronique concurrentes. Bien que l'amende soit nettement plus élevée que le précédent record de 6 milliards de RMB imposé à Qualcomm en 2015, elle est inférieure aux attentes de certains analystes: l'amende aurait pu représenter jusqu'à 10% du chiffre d'affaires d'Alibaba sur le marché domestique (l'amende s'élève à 4% du chiffre d'affaires du groupe réalisé sur le marché domestique en 2019). Tencent et JD.com pourraient également recevoir des amendes pour des infractions similaires aux directives anti-monopole du SAMR. Il convient toutefois de noter que les régulateurs reconnaissent le rôle important que jouent les entreprises technologiques dans l'économie chinoise, et que les amendes ne sont pas assez sévères pour les mettre hors d'état de nuire, mais simplement pour s'assurer qu'elles reçoivent le message afin d’améliorer leurs pratiques commerciales.

Les limites qui seront fixées auront un impact sur les évaluations
des entreprises technologiques chinoises.

La réduction des risques financiers est le second domaine dans lequel les Fintech chinoises sont examinées de près, les régulateurs financiers chinois supervisant cet aspect. Les régulateurs s'intéressent en effet de près aux activités de crédit des filiales des entreprises technologiques, afin de les aligner sur la réglementation applicable aux autres entreprises financières. En fait, les régulateurs financiers auraient récemment convoqué Ant Group pour une deuxième réunion conjointe, lui ordonnant de redéfinir ses opérations commerciales afin qu'elles soient conformes aux règlements et à la loi. Il s'agit notamment d'exigences spécifiques telles que la séparation des services de crédit des autres services de paiement, l'enregistrement en tant que société de holding financière (y compris l'obtention de licences dans tous les secteurs d'activité) ainsi que la collecte de données sur le principe de collecte minimale. JD Finance aurait déjà soumis la demande pour devenir une société de holding financière et se serait engagée à augmenter son ratio d'adéquation des fonds propres pour atteindre le seuil de 8%. Le respect de ces nouvelles exigences en matière de licence aura sans aucun doute un impact sur la rentabilité des activités de la Fintech.

Le troisième et dernier aspect de l'examen réglementaire est une loi imminente sur la protection des données qui est en cours de formulation. Les données constituent un nouvel or brut, et les entreprises technologiques chinoises ont ainsi pu constituer d'énormes bases de données sur les activités en ligne de leurs utilisateurs grâce à l'adoption généralisée de la technologie en Chine. Les autorités commencent à s'intéresser de plus près aux données que les entreprises technologiques collectent et à la manière dont elles les utilisent. Certains rapports suggèrent qu'une entité gouvernementale crée une coentreprise avec les principales entreprises technologiques pour être propriétaire des données. Cette option pourrait toutefois ne pas être acceptable pour les entreprises technologiques, car elles perdraient un avantage concurrentiel. Le fait que le gouvernement chinois soit directement et partiellement propriétaire des données pourrait également empêcher les entreprises technologiques chinoises de s'aventurer à l'étranger en raison des préoccupations des gouvernements étrangers en matière de sécurité. Les législateurs sont confrontés au défi de trouver un équilibre entre les intérêts de la vie privée, les intérêts économiques des entreprises individuelles et les considérations de sécurité nationale. Les limites qui seront finalement fixées auront un impact sur les évaluations des entreprises technologiques chinoises.

A lire aussi...