Coup d'Etat militaire au Myanmar

Daryl Liew, Reyl Singapore

2 minutes de lecture

Des sanctions internationales pourraient être appliquées. Les plans économiques et d'investissement seront-ils affectés?

Le 1er février, l'armée du Myanmar a déclaré l'«état d'urgence», arrêtant Aung San Suu Kyi et d'autres membres importants du parti au pouvoir, la National League for Democracy (NLD), et prenant le contrôle du pays. Les militaires affirment que les élections générales de novembre dernier, remportées par la NLD dans une large mesure, ont été entachées par une fraude électorale. La commission électorale du Myanmar a rejeté ces allégations le 28 janvier, déclarant que «la faiblesse et les erreurs dans les listes électorales ne peuvent pas causer de fraude électorale» et que le vote a été mené de manière transparente devant les observateurs électoraux.

Le général Min Aung Hlaing, commandant en chef, est maintenant en charge de cette affaire et dispose d'un délai d'un an pour examiner les listes électorales avant de tenir de nouvelles élections démocratiques. Les observateurs sont sceptiques quant à la concrétisation de ce délai, car l'armée birmane a l'habitude de ne pas tenir ses promesses. Des engagements similaires avaient été pris à la suite du coup d'Etat militaire de 1988 et n'avaient pas été respectés.

Le Myanmar risque de retomber dans une période noire d'isolement international.

La question, désormais, est de savoir comment ce coup d'Etat pourrait affecter les plans économiques et d'investissement dans le pays. La conséquence immédiate est que des sanctions internationales pourraient être appliquées une fois de plus au Myanmar. Le nouveau président américain Joe Biden a menacé le pays de sanctions si les militaires ne renonçaient pas au pouvoir, tandis que d'autres dirigeants internationaux ont également condamné publiquement le coup d'Etat. Si la communauté internationale donne suite à ces menaces, le Myanmar risque de retomber dans une période noire d'isolement international, ce qui entravera de manière importante son développement économique et affectera directement sa population.

De mai 1997 à 2012, les Etats-Unis ont interdit les investissements des personnes et sociétés américaines au Myanmar. Les sanctions ont été assouplies à la suite de la transition vers un gouvernement civil après les élections de 2010. L'UE a également assoupli ses sanctions contre le Myanmar en 2012.

L'armée du Myanmar aurait été consciente de la réaction internationale potentielle suite à ses actions et du risque résidant dans le fait que les investisseurs étrangers cessent d'investir. Les investissements étrangers directs au Myanmar s'élèvent à quelque 5 milliards de dollars par an, et cet argent est indispensable pour les projets qui créent des emplois et améliorent le niveau de vie des habitants. Les coups d'Etat militaires ne sont cependant pas rares dans la région, les dirigeants actuels de Thaïlande et du Cambodge étant arrivés au pouvoir par des coups d'État. Les militaires du Myanmar pourraient donc prendre un risque calculé et espérer un résultat similaire à celui de leurs voisins.

Il serait plus pertinent de se pencher sur le cas de Yoma Strategic,
société cotée à Singapour mais principalement active au Myanmar.

Fort heureusement, les conséquences financières potentielles de ce bouleversement politique ne sont pas très importantes, car le Myanmar est toujours un marché frontière. La bourse de Yangon, qui ne compte actuellement que cinq sociétés cotées, a chuté de 6% le premier jour après le coup d'Etat. Il serait plus pertinent de se pencher sur le cas de Yoma Strategic, une société cotée à Singapour, dont les principales activités se situent au Myanmar. Yoma, en revanche, a vu le cours de son action chuter de 25%, ce qui reflète les incertitudes actuelles.

Tous les yeux sont dès lors tournés vers Washington et la sévérité des sanctions qui pourraient être imposées. Il y a également un risque de troubles supplémentaires à court terme, car Aung San Suu Kyi a demandé à ses partisans de s'opposer à la prise de contrôle militaire par une «désobéissance civile non violente». Il faut espérer que les affrontements entre l'armée et le public ne se reproduiront pas comme en 1988 et 2007, lorsque les militaires avaient utilisé la force pour réprimer les protestataires.

A lire aussi...