L’évolution du secteur des gérants de fortune externes: les défis d’une consolidation

Laurent Pellet, Banque Lombard Odier

1 minute de lecture

Transparence, anticipation juridique, gestion humaine et lucidité économique seront les clés d’un rapprochement réussi.

Dans un marché en mutation, la question de la consolidation dans le secteur des gérants de fortune externes (EAM) revient avec insistance.

Une consolidation annoncée, mais longtemps invisible

Au début des années 2000, on parlait déjà d’une consolidation imminente du secteur des EAM — certains allant jusqu’à évoquer leur disparition. Mais cette consolidation ne s’est jamais vraiment matérialisée de façon visible. Contrairement au monde bancaire, où les transactions sont publiques et communiquées, les mouvements dans le monde des EAM restent le plus souvent discrets.

2020, une date charnière

La véritable reconnaissance du métier est intervenue avec l’entrée en vigueur des nouvelles lois suisses en 2020, qui ont imposé l’enregistrement officiel auprès de la Finma. Ça a inscrit le métier dans le paysage de la place financière suisse, qualifiant le métier de gérant de fortune externe comme un acteur indéniable. Grâce au processus d’annonce obligatoire, un premier chiffre précis du nombre d’EAM en Suisse a émergé en 2020: 2'128. Depuis, la Finma a régulièrement publié des chiffres sur les autorisations délivrées. Le dernier pointage au 11 mars comptait 1'530 EAM, ce qui représente une diminution de près de 25% du nombre d’acteurs.

Une consolidation inévitable

Les signaux convergent vers un resserrement significatif du nombre d’acteurs, sous l’effet combiné de la pression réglementaire, de l’évolution des attentes clients et des mutations économiques du secteur. Le paysage de la gestion de fortune a profondément changé en Suisse avec une dynamique de concentration dans le secteur bancaire qui touche désormais les EAM.

La succession au cœur des transactions

Le principal moteur des transactions reste la succession, qui reflète un désir de monétiser le fruit de son travail avant la retraite. Nous constatons quatre modèles de consolidation:

  1. Partenariat stratégique avec une banque: acquisition totale ou partielle.
  2. Fusions entre gérants externes: synergies de coûts, complémentarité d’offres et mutualisation des structures.
  3. Vente directe: cession d’un portefeuille à un tiers.
  4. Liquidation pure: fermeture de la structure, souvent pour des raisons de rentabilité ou de contraintes réglementaires.

Le facteur humain, clé du succès

Les dimensions humaines restent centrales à toute opération ou acquisition; il s’agit d’un business d’hommes et de femmes où la compatibilité culturelle est fondamentale. Contrairement à une entreprise industrielle, ce sont des relations clients qui sont au cœur de la valeur transmise.

A ce jour, si la consolidation du secteur EAM reste largement silencieuse, elle demeure pour autant bel et bien réelle et en ordre de marche. Dans un environnement plus réglementé, plus concurrentiel et plus exigeant, les gérants de fortune externes doivent se préparer à des opérations de transmission complexes, sensibles, mais aussi pleines d’opportunités. Transparence, anticipation juridique, gestion humaine et lucidité économique seront les clés d’un rapprochement réussi.

A lire aussi...