Huit conseils pour naviguer en temps de crise

Yves Bonzon, Julius Baer

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Ce que l’on pensait être initialement un choc typique externe temporaire, qui allait se calmer, a en réalité conduit à une récession.

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1: La récession est déjà réelle

Premièrement, une récession est d’ores et déjà reflétée dans les cours des principaux actifs. Ce que l’on pensait être initialement un choc typique externe temporaire, qui allait se calmer, a en réalité conduit à une récession. En effet, les mesures que les gouvernements ont dû prendre pour contenir la propagation de cette épidémie ont mécaniquement plongé l’économie réelle dans une contraction. A partir des niveaux actuels de valorisation, qui reflètent donc cette récession, la clé est d’observer quelles vont être ou non les mesures apportées par les gouvernements.

2: Une réponse monétaire et fiscale est nécessaire

Face à la situation à laquelle nous sommes confrontés, la mesure la plus immédiate et la plus efficace est celle de la théorie moderne. Celle-ci vise à faire travailler la politique monétaire conjointement à la politique fiscale, en injectant des fonds étatiques monétisés par la banque centrale directement dans l’économie. Par exemple pour la Suisse, cela consisterait en une émission d’emprunt zéro coupon perpétuel par le Conseil fédéral, à laquelle souscrirait la banque centrale. De l’argent qui serait ensuite utilisé pour compenser les pertes de revenus des entreprises qui ont dû temporairement cesser leur activité. Sans cela, la vitesse de circulation de la monnaie dans le système pourrait se réduire encore et conduire à une déflation.

3: Efficience et rapidité de décision des gouvernements

Pour pouvoir amener cette réponse de politique non conventionnelle mais appropriée, nous devons, dans les portefeuilles, favoriser les actifs qui sont exposés à des pays qui ont la capacité d’imprimer la monnaie dans laquelle ils empruntent. La suisse est un exemple. On peut également citer des pays comme Singapour et les Etats-Unis bien sûr. A cet égard, Singapour a été exemplaire dans sa réponse de politique sanitaire pour contenir la propagation du virus. Un portefeuille exposé à des systèmes politiques et à des gouvernements qui peuvent prendre des décisions rapides et efficaces a plus de chance de traverser cette crise en limitant les dommages.

4: Miser sur le bon cheval

Certains pourraient être tentés d’explorer les actifs qui ont le plus souffert dans la baisse que nous venons de vivre. C’est une approche certes tentante, mais toutefois dangereuse, car les actifs les plus impactés sont également les plus hautement dépendants de la monétisation par les gouvernements des mesures de stimulation fiscale. Nous pensons donc, qu’il est préférable de rester concentré sur les actifs de qualité, qui nous permettent de traverser cette crise plus sereinement d’une part et nous donnent des perspectives de rendement intéressantes une fois que le cycle se normalisera.

5: Les crypto-actifs ont échoué au stress test

Les partisans des crypto-actifs ont construit l’histoire de cette nouvelle classe d’actifs sur l’idée qu’en cas de crise aiguë générale du système financier, ils constitueraient une source de diversification bienvenue dans laquelle l’argent et les investisseurs se réfugieraient. Malheureusement, nous constatons que le premier test réel de ces crypto-actifs depuis leur invention a échoué. En effet, les principaux parmi eux ont enregistré une baisse proportionnellement largement supérieure à celle des principaux indices boursiers à ce stade.

6: Qu’en est-il de l’or?

L’or vient immédiatement à l’esprit lorsque l’on imagine une crise de l’ampleur et de la nature de celle que nous sommes en train de vivre. L’or a initialement répondu très favorablement et a ensuite baissé également assez sensiblement. On peut se demander pourquoi l’or n’a pas continué à monter, compte tenu de l’aggravation de la crise. Le fait est que l’or est souvent mal compris. Certes, l’or est dans une certaine mesure une protection en cas d’hyperinflation mais surtout, sous forme physique, l’or a une caractéristique unique, celle d’être un très bon actif de protection contre le risque systémique, le risque de contrepartie ou de crédit. Or à ce stade heureusement, nous n’avons pas encore de montée marquée du risque systémique. Cela pourrait être le cas toutefois et avec le prix récent des cours, les investisseurs peuvent le considérer comme actif de diversification dans les portefeuilles aux niveaux actuels.

7: Ne vous fiez pas aux évaluations absolues

On dit souvent que la phrase la plus dangereuse en investissement, c’est de prétendre que cette fois c’est différent. Nous devons constater qu’avec la fermeture complète de larges pans de l’économie, nous faisons face à une situation sans précédent. De nombreux individus, de nombreuses sociétés voient leur activité cesser brutalement du jour au lendemain. Le cash-flow des entreprises concernées est donc extrêmement incertain aujourd’hui. Le cas le plus parlant est celui des compagnies aériennes. Le potentiel de récupération de ces actifs dépend fortement des politiques qui vont être mises en œuvre ou pas par les principaux gouvernements concernés. De ce fait, miser sur les actifs qui ont le plus souffert nous paraît être un pari extrêmement risqué, même si optiquement les valorisations peuvent paraître attractives aujourd’hui.

8: Restez investi

Enfin, il est très important de garder à l’esprit que le potentiel d’évolution des prix des principales classes d’actifs, - obligations d’état, crédit, actions, or, dépend largement des réponses que les gouvernements vont apporter à cette crise. La route la plus prudente est donc de rester investi, bien diversifié avec un biais qualité. Ce n’est pas un temps pour prendre des paris extrêmes, ni vers le cash, ni vers l’une ou l’autre des classes d’actifs.

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