Gestion de portefeuille, l’analogie de la prédiction météo

Guillaume Dolisi, VIA AM

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Pour beaucoup d’investisseurs, le métier de la gestion (ou du trading) se résume à un exercice de prédiction.

Les meilleurs gérants seraient susceptibles de maîtriser le market timing, c’est-à-dire d’anticiper les hausses et baisses futures des marchés pour acheter et vendre au bon moment. Ils se rapprocheraient ainsi d’un prévisionniste météo, capable d’annoncer correctement la pluie ou le beau temps pour les jours qui viennent.

Au premier abord, l’analogie paraît statistiquement pertinente. La météo, comme les marchés financiers, dépend d’une infinité d’éléments interdépendants. La qualité des prévisions semble découler de la capacité à collecter un très grand nombre de données et à les traiter correctement, pour en tirer des indications fiables à un horizon plus ou moins éloigné. Surtout, dans les deux cas, la temporalité visée, c’est-à-dire l’horizon auquel les prévisions sont établies, influe énormément sur leur fiabilité, donc sur la capacité réelle à prédire.

Les anticipations de court terme se révèlent généralement assez fiables. Les bulletins météo se trompent peu sur le temps qu’il fera demain ou après-demain. De même, il semble possible qu’un investisseur parvienne à prédire les marchés à un horizon qui s’étend de la seconde jusqu’à quelques jours, s’il dispose d’assez de données, de la capacité à les «nettoyer» et de l’infrastructure permettant d’identifier des relations statistiques en perpétuelle évolution. Mais les volumes disponibles pour exécuter ces prédictions de très court terme ne sont pas infinis, le gagnant rafle tout.

Un investisseur ayant des objectifs suffisamment réalistes pourra pleinement
bénéficier des effets exponentiels qu’offrent les marchés actions.

Au-delà de quelques jours, la fiabilité des prévisions météo s’effondre de façon exponentielle. Les météorologistes ne se risquent d’ailleurs pas à en établir. En revanche, elle redevient significative pour des moyennes de long terme: on peut par exemple prévoir la température moyenne le 30 juin à Paris pour les dix prochaines années (de 14 à 24°C). On est même capable d’intégrer un facteur perturbateur comme le réchauffement climatique (plutôt de 16 à 28°C vers 2050).

Il en va de même pour les marchés financiers. Il n’est pas réellement possible de prédire leur évolution à douze mois de façon consistante. Il suffit pour s’en convaincre de confronter les scénarios que les plus grands stratèges échafaudent chaque début d’année avec la réalité de la performance un an plus tard! À plus long terme, il est néanmoins possible d’estimer l’ordre de grandeur du rendement d’un portefeuille, en fonction des propriétés économiques de ses sous-jacents. Dans son principe, l’arithmétique est d’ailleurs assez simple.

Tout commence en effet par un multiple d’acquisition: pour un certain prix payé par action, un investisseur obtient un montant d’actifs économiques nets (bâtiments, usines, machines, R&D, publicité, etc. auxquels il faut veiller à retirer l’ensemble des passifs: dettes financières, engagements hors bilan, etc.). Ensuite, année après année, ce sont bien les actifs économiques qui vont créer plus ou moins de richesse.

Notre recherche tend justement à démontrer que les marchés finissent par converger vers la création de richesse réalisée. Les investisseurs ont besoin de pouvoir mesurer précisément la performance économique des actions, indépendamment de leurs fluctuations boursières parfois «traumatisantes». Une telle méthode se rapprocherait de la consolidation pratiquée par les holdings de participations majoritaires.

En matière d’investissement, il nous paraît plus efficace d’avoir approximativement raison à long terme, que précisément tort sur les 12 prochains mois. Selon nous, un bon gérant est plus «prévoyant» que «devin». Et un investisseur ayant des objectifs suffisamment réalistes pourra pleinement bénéficier des effets exponentiels qu’offrent les marchés actions.

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