Où se trouve la vérité comptable?

Salima Barragan

2 minutes de lecture

VIA AM, fondée par Guillaume Dolisi, utilise un modèle systématique de normalisation comptable afin d’évaluer plus de 3'000 sociétés dans le monde.

 

«La comptabilité est le langage des affaires et il est imparfait. A moins que vous ne soyez prêt à faire l’effort d’apprendre à lire et interpréter des données comptables,  vous ne devriez pas choisir vos actions vous-même». Par cette citation, Warren Buffet,  connu pour ses phrases incisives, met en lumière les limites de la comptabilité qui peut induire à de mauvaises décisions d’investissement.  Adepte de cette approche, Guillaume Dolisi, de VIA AM, estime que les  données comptables ne reflètent pas la réalité économique des entreprises. Pour cette raison, VIA AM sélectionne les titres de ses fonds en actions selon un processus systématique de normalisation des données comptables. «Nous utilisons une technologie big data afin d’être en mesure de recréer la comptabilité de milliers d’entreprises, pour évaluer précisément les passifs et actifs réels des entreprises que nous évaluons», explique le gérant. 

Des passifs et des actifs «cachés»

En mars 2015, Volkswagen déclarait 87 milliards d’euros de dettes nettes. Mais, avant même le scandale sur la non-conformité de véhicules vendus, Volkswagen passait 21 milliards d’euros de «provisions résultant de ses ventes». Ce montant apparaissait «hors bilan», ce qui signifie qu’il ne rentrait pas dans la dette comptable. Toujours hors bilan, le Groupe déclarait aussi 17 milliards d’euros de déficit de fonds de pension et 5 autres milliards de provisions supplémentaires, soit un total de 43 milliards d’euros... La seule dette comptable était clairement insuffisante pour révéler la totalité des risques financiers encourus. Pour apprécier la valeur économique réelle des sociétés, VIA AM prend donc en considération le passif global qui englobe tous les engagements financiers futures de l’entreprise.

«Toutes les dépenses telles que la R&D et la publicité
sont capitalisées comme des actifs tangibles.»

Du côté des actifs, le gérant applique la même logique et raisonne en termes d’actifs économiques. Toutes les dépenses telles que la R&D et la publicité sont capitalisées comme des actifs tangibles, dans la mesure où elles correspondent bien à des investissements visant à générer du cash dans le futur. «Nous essayons d’obtenir la valeur réelle des actifs économiques. Par exemple, lorsque les compagnies aériennes financent leur flotte via du leasing, les appareils apparaissent hors bilan, et nous devons les réintégrer aux actifs, comme s’ils étaient financés en cash ou par de la dette financière», explique Guillaume Dolisi. De même, les revenus opérationnels doivent prendre en compte l’ensemble des coûts salariaux. «Par exemple, la dilution future liées aux stock-options, aussi hors bilan, mais qui sont bien une forme de salaires, donc un coût pour l’actionnaire», précise-il. 

Flexibilité comptable

La comptabilité est aussi très flexible. Et selon les normes comptables et fiscales des différentes régions, les chiffres et leurs significations peuvent d’être très variables, rendant l’exercice de comparaison très délicat.  D’ailleurs, lors de comparaison entre des sociétés US GAAP et IFRS, les analystes financiers procèdent à certains ajustements. Les réformes comptables ne visent-elles pas à éliminer ces différences? Dans une lettre aux investisseurs, Warren Buffet explique que les réformes comptables apportent des couches supplémentaires de complexité et rendent la tâche de mesurer la performance opérationnelle des entreprises encore plus ardue. 

De même, les valeurs d’entreprises et les ratios financiers sont biaisés par les conventions comptables. VIA AM a calculé un écart de plus de 50% entre le ROE US GAAP et le ROE normalisé sur un tiers des titres de son portefeuille actions USA.

Une question dès lors se pose: «où se trouve la vérité comptable?»