Et soudain les marchés s’animèrent!

François Savary

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Que les investisseurs aient à nouveau des doutes n’est pas une si mauvaise chose, compte tenu de l’optimisme qui régnait sur les marchés et l’excès de certitudes.

Depuis quelques semaines, les marchés financiers sont sujets à des évolutions qui se sont révélées violentes, parfois. On en veut pour preuve le rebond de la devise helvétique ou encore le retournement marqué du Yen sur le marché des changes. On peut noter aussi la reprise significative du Bitcoin ou la détente importante sur les rendements obligataires, ceux à deux ans en particulier. Les cours de l’or en ont d’ailleurs profité pour se rapprocher de la barre des 2500, qu’il pourrait bien franchir au cours des prochains mois, dans le sillage d’une baisse des taux américains et d’une confirmation d’un meilleur comportement de l’inflation.

Cependant, c’est bien sur le front des marchés actions que le retour de la volatilité suscite les plus nombreuses interrogations. D’un côté les partisans d’une inévitable «rotation» hors de la technologie et du thème (surjoué?) de la révolution de l’intelligence artificielle; de l’autre, les défenseurs d’un «élargissement de la profondeur du marché haussier» qui se mettrait en place, pour le moyen terme, à l’image de la nette surperformance des petites et moyennes capitalisations américaines depuis la mi-juillet.

Le secteur de la technologie a connu, au cours des dernières années, des replis assez semblables à celui qu’il vient de subir et ce de manière assez régulière.

Dans un tel contexte, les premières données de la saison des bénéficies pour le second trimestre ne sont pas mauvaises mais les valeurs du secteur technologique qui ont révélé leurs chiffres (Alphabeth, Tesla) ont été sanctionnées au regard d’attentes qui ont été déçues; en outre, les rumeurs de nouvelles mesures américaines pour empêcher le transfert technologique vers la Chine ont fortement impacter des valeurs comme ASML, TSMC ou AMD pour n’en citer que quelques-unes.

Pour éviter de céder à la «panique» il faut rappeler que de grandes valeurs du segment tech doivent encore livrer leurs résultats avant de tirer des conclusions. De même, les chiffres de ASML étaient loin d’être aussi mauvais que le comportement récent du cours de l’action pourrait le laisser croire et les éventuelles mesures américaines qui l’ont impacté ne sont pas encore une réalité. Que la cherté des évaluations ne laisse guère de place à des déceptions (même limitées) ou à des développements contraires sur le front du commerce est indéniable; ce qui ne veut pas dire que les tendances de fond sur ces valeurs doivent être remises en cause du jour au lendemain. En outre, il est bon de garder à l’esprit que le secteur de la technologie a connu, au cours des dernières années, des replis assez semblables à celui qu’il vient de subir (de l’ordre de 10%) et ce de manière assez régulière.

De la même manière, le segment de la consommation, un pan essentiel pour la réalisation du scénario d’atterrissage en douceur qui occupe l’esprit des investisseurs, a nourri quelques doutes; qu’il s’agisse de résultats de Nestlé, de ceux de deux des fleurons du luxe (LVMH et surtout Kering ) ou encore Visa (qui peut apparaître comme un bon baromètre de la propension des ménages à consommer) tout peut porter à s’interroger sur la capacité bénéficiaire de ces «mastodontes» de la cote dans un contexte de plus en plus désinflationniste.

Les données économiques globales continuent à pointer vers un cycle de croissance plus faible, spécialement aux USA, mais sans effondrement marqué de la conjoncture.

D’une manière générale, les mouvements récents sur les marchés financiers ont une vertu, ils amènent les investisseurs à réévaluer leurs hypothèses, qui avaient eu tendance à devenir extrêmement consensuelles depuis la consolidation du printemps 2024 (rapidement oubliée). Aussi abrupts qu’ils aient pu être, ils demeurent avant tout d’ampleur limitée.

S’interroger sur le caractère durable du retournement de la devise japonaise, sur l’inéluctable appréciation de la monnaie helvétique, la pérennité de la détente des rendements obligataires ou de celle de la surperformance des petites et moyennes capitalisations est légitime. La torpeur de l’été, qui est enfin arrivé, doit-elle pour autant conduire à tirer rapidement des conclusions et changer son allocation de manière drastique?

Il est vrai que les prochains mois sont porteurs de certaines inconnues comme celle des élections américaines ou celle relative à la validité de l’hypothèse d’une baisse des taux par la Réserve fédérale au mois de septembre.

Toutefois, il nous semble que les données économiques globales continuent à pointer vers un cycle de croissance plus faible, spécialement aux USA, mais sans effondrement marqué de la conjoncture. L’inflation, quant à elle, reste mieux orientée après des évolutions quelques peu contraire en début d’année. Le cadre d’un cycle de relâchement monétaire devrait se renforcer d’ici la fin de 2024, particulièrement aux USA où la Fed devrait suivre le chemin sur lequel la BNS et la BCE se sont déjà engagées.

En conclusion, que les investisseurs aient à nouveau des doutes n’est pas une si mauvaise chose, compte tenu de l’optimisme qui régnait sur les marchés et l’excès de certitudes qui s’était développé sur certaines positions des investisseurs. Nous ne sommes pas enclins, en l’état, à inciter à la remise en causes des orientations d’une allocation d’actifs, suite au regain de volatilité des dernières semaines.

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