De offshore à onshore

Haggay Aidlin, Geneva Management Group

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L'une des conséquences de la crise actuelle pourrait bien se matérialiser par une évolution durable vers la démondialisation.

Depuis plusieurs années les activités de planification patrimoniale doivent faire face à des circonstances difficiles: pressions budgétaires, resserrement de la surveillance des autorités fiscales et indignation du public suite aux scandales offshore, sont autant d’éléments qui poussent désormais certaines entreprises à rapatrier leurs actifs et leurs activités. A cela, s’ajoute dorénavant une crise sanitaire mondiale qui s'est transformée en crise économique mondiale. Avec l'arrêt des l'économies, les effets secondaires négatifs devraient se matérialiser rapidement et l'une des conséquences de cette situation sans précédent pourrait bien se matérialiser par une évolution durable vers la démondialisation. 

La situation actuelle a démontré que la sécurité de la production a souvent été sacrifiée afin de réduire les coûts. Aujourd’hui, compte tenu de l'impact sur les chaînes d'approvisionnement, des fermetures de frontières et des mesures de confinement, de nombreux pays et entreprises souhaiteront probablement relocaliser leurs centres de contrôle des operations et production, voire une partie ou l’entier de leurs activités administratives, sur leur territoire. Il est également probable que certains gouvernements encourageront l'émergence de «champions nationaux» dans des domaines d'importance nationale tels que la santé, l’approvisionnemnt en matières, produits ou services essentiels et la défense.

Parmi les facteurs indirects qui poussent à la délocalisation, on trouve 
la colère face aux inégalités croissantes entre riches et pauvres.

La migration d'une entreprise exige des efforts considérables mais celle-ci ne doit pas nécessairement se transformer en une expérience négative. Au contraire, il existe de nombreux points positifs pour toute entreprise qui décide de délocaliser. Avant d'examiner les aspects pratiques, il est intéressant de se pencher sur les types de facteurs, directs et indirects, à l'origine de ce phénomène, en plus des situations exceptionnelles comme celle que nous vivons en ce moment.

Les facteurs directs se matérialisent par les pressions légales et réglementaires exercées sur les entreprises et leurs propriétaires par les autorités, notamment fiscales, qui sont de plus en plus déterminées à "rapatrier" les opérations et les bénéfices. Aux États-Unis, par exemple, ces dernières ont mis en place des mesures afin de faciliter et d’accompagner le rapatriement des bénéfices et des activités des entreprises américaines.

Parmi les facteurs indirects qui poussent à la délocalisation, on trouve par exemple la colère face aux inégalités croissantes entre les riches et les pauvres ainsi que l'indignation du public face aux scandales et l'attention accrue des médias traditionnels et sociaux qui en découle. Tout ceci a un impact sur les programmes politiques des pays concernés et sur la géopolitique dans son ensemble.

Les bénéfices de l’onshoring

Il existe de nombreux avantages liés au rapatriement d'une entreprise tels que la protection contre les risques de fermeture des frontières et la coopération des autorités à l’échelle internationale, la possibilité d'exercer dans un environnement fiscal et réglementaire souvent mieux réputé, la réduction de l'écart géographique entre le lieu où les activités sont exercées et celui où l'entité est enregistrée, et l'accroissement de la crédibilité et de l'attrait pour les partenaires commerciaux, les investisseurs et les marchés de capitaux facilitant ainsi la capacité de financement.

Toute entreprise qui envisage de recourir à la délocalisation
doit se demander si elle souhaite migrer ou «repartir de zéro».

Afin de tirer parti de ces avantages sans interrompre les activités commerciales, il est essentiel de mettre en place un plan de délocalisation adéquat qui prend en compte un certain nombre de paramètres.

Le premier consiste à déterminer la nature de la société qui désir migrer. S'agit-il d'une société mère, d'une division commerciale ou d'un département R&D? Il est également important de connaître la structure de la société. Est-elle contrôlée par des individus, un trust, une fondation, ou encore une société cotée en bourse?

Le lieu de résidence des bénéficiaires effectifs jouera également un rôle dans la détermination de l'approche à adopter en matière de délocalisation, tout comme les futurs lieux de résidence,  notamment pour les conventions de double imposition.

Une fois ces questions clarifiées, il est essentiel de solliciter le soutien d’un conseiller afin de mettre en place une feuille de route détaillée grâce à laquelle il sera possible d'évaluer précisément les exigences en place dans les pays d'émigration et d'immigration. Cela permettra aussi de déterminer le coût et le temps nécessaire pour satisfaire à ces exigences. Cependant, tout au long du processus, il est nécessaire d'être réaliste et d'accepter que certaines variables puissent changer.

Migrer ou redémarrer

Enfin, toute entreprise qui envisage de recourir à la délocalisation doit se demander si elle souhaite migrer ou «repartir de zéro».

Lors d'une migration, l'on emporte avec soi son histoire, quelle qu'elle soit. Bien que les antécédents puissent être intéressants du point de vue de la planification fiscale et financière, certains arrangements, dont les accords commerciaux, peuvent être améliorés en repartant de zéro. Il convient également de garder à l'esprit que la création d'une nouvelle entité est souvent moins coûteuse que la migration d'une entité existante et, dans certains cas, peut prendre moins de temps. 

Le nœud du problème réside dans le fait que, lors de la migration d'une entreprise, il est primordial d’éviter à tout prix la cessation des activités pendant la période d'incertitude entre les juridictions.

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