«Il fallait un élément déclencheur. Après une progression régulière des valorisations des actions américaines – en particulier celles des grandes entreprises de croissance – un retournement devenait inévitable.»
«À l’avenir, nous anticipons aux Etats-Unis une croissance plus faible et une inflation plus élevée. Hors des Etats-Unis, nous prévoyons également un affaiblissement de la croissance économique, bien qu’une demande en baisse devrait probablement atténuer les pressions inflationnistes. Pour les investisseurs, la discipline est essentielle. Les fortes baisses de marché ne surprennent que par leur timing, non par leur survenue. Ne courez pas après les marchés et, comme aimait le dire Jack Bogle, maintenez le cap. Tôt ou tard – et pas nécessairement dans cet ordre – la volatilité se résorbe, les marchés atteignent un plancher et la tempête passe.»
Les développements rapides liés aux droits de douane continuent de dominer les marchés financiers et de remodeler les scénarios économiques potentiels.
Nos prévisions économiques révisées reflètent dans l’ensemble notre opinion selon laquelle les droits de douane américains devraient entraîner un ralentissement de la croissance du PIB, tant aux Etats-Unis que dans les principales économies mondiales. Toutefois, en dehors des Etats-Unis, nous ne prévoyons pas une accélération de l’inflation comparable à celle attendue aux Etats-Unis, compte tenu du probable effet de la baisse de la demande sur les prix.
Dans notre scénario de base révisé, la croissance du PIB américain en 2025 tomberait sous la barre de 1%, plaçant l’économie à un niveau de «vitesse de décrochage» susceptible de raviver le spectre d’une récession.
Nous prévoyons également que l’inflation sous-jacente aux Etats-Unis atteindra près de 4% en glissement annuel d’ici fin 2025, et que le taux de chômage dépassera légèrement les 5%, soit le niveau le plus élevé depuis une décennie hors période Covid.
Nous détaillons ci-dessous les révisions apportées à nos prévisions économiques pour quatre grandes économies hors Etats-Unis: la zone euro, le Royaume-Uni, le Japon et la Chine.
Bien que la situation reste instable, ces ajustements offrent un point de repère utile dans un environnement macroéconomique particulièrement incertain.
Zone euro
Nous avions estimé que les annonces tarifaires du 2 avril porteraient le taux effectif de droits de douane sur l’UE à 15%. Avec les hausses attendues sur des secteurs actuellement exemptés (pharmaceutique, semi-conducteurs), ce taux aurait dépassé 20%.
Cependant, la pause de 90 jours annoncée le 9 avril atténue quelque peu cet impact. Si elle est maintenue, et si les hausses sectorielles se confirment, le taux effectif serait plus proche de 15%.
La hausse des droits de douane pèsera sur la croissance. Nous avons abaissé notre prévision de croissance du PIB de la zone euro à moins de 1% pour 2025, et autour de 1% pour 2026. Cela contrebalance les effets positifs attendus du programme fiscal allemand de grande ampleur annoncé en mars, de l’augmentation des dépenses de défense à l’échelle européenne, et de la perspective d’un cessez-le-feu en Ukraine.
Nous avons également relevé notre prévision d’inflation (CPI) pour fin 2025 à juste en dessous de 2%, mais nous l’avons abaissée pour fin 2026, en raison de l’affaiblissement de la demande.
Un environnement de croissance ralentie et d’inflation contenue laisse entrevoir une Banque centrale européenne (BCE) plus accommodante. Nous avons intégré deux baisses de taux supplémentaires à nos prévisions, et anticipons désormais un taux directeur à 1,75% (contre 2,25% précédemment), avec une réduction de 0,25 point probable dès la réunion d’avril.
Royaume-Uni
L’économie britannique ne devrait être que modérément affectée par les droits de douane américains. Nous estimons que le taux effectif de droits de douane sur le Royaume-Uni a augmenté d’environ 6 points de pourcentage, avec un risque d’augmentation supplémentaire dans les secteurs comme la pharmacie.
Tenant compte de possibles assouplissements à venir, nous avons ajusté notre hypothèse de base à un taux effectif de 7% (contre 2% auparavant).
Nous avons donc revu à la baisse nos prévisions de croissance du PIB : autour de 0,5% en 2025 et juste en dessous de 1% en 2026. L’inflation en fin d’année est désormais attendue à environ 2,5%, légèrement au-dessus de notre estimation précédente, mais nous abaissons la prévision 2026 à environ 2,0%.
Nous maintenons l’hypothèse d’une baisse de taux par trimestre par la Banque d’Angleterre, incluant une réduction de 0,25 point en mai. Le taux directeur atteindrait ainsi 3,75% fin 2025.
Japon
Nous avons abaissé notre prévision de croissance pour 2025 à moins de 1%. Les droits de douane devraient pénaliser l’économie japonaise via le ralentissement économique aux Etats-Unis et dans les régions voisines, ainsi qu’une baisse de la compétitivité des exportations japonaises sur le marché américain.
Nous continuons à prévoir un resserrement graduel de la politique monétaire par la Banque du Japon, avec un taux directeur proche de 1% d’ici fin 2025.
Chine
Nous avons revu à la baisse notre prévision de croissance du PIB pour 2025, de 4,5% à environ 4%. Cette révision s’explique par l’impact direct des droits de douane sur les exportations, la baisse de la confiance des ménages et des entreprises, et le ralentissement de la croissance mondiale.
Néanmoins, le ralentissement devrait être atténué par un assouplissement politique plus agressif. Relancer la consommation intérieure sera une priorité pour Pékin, avec à la clé des mesures de soutien budgétaire destinées aux ménages. Nous anticipons également un assouplissement monétaire par la Banque populaire de Chine, qui pourrait bientôt baisser ses taux.
Sur le plan de l’inflation, nous prévoyons que l’inflation annuelle sous-jacente (core CPI) atteindra environ 0,5%, tandis que l’indice global restera en dessous.