En dépit des tensions grandissantes au Moyen-Orient, l’augmentation des cours du pétrole reste contenue, Téhéran et Washington n’ayant aucun intérêt à une escalade et l’offre restant abondante.
Le cours du baril de Brent, qui avait bondi au-delà de 90 dollars au début de la guerre à Gaza ainsi qu’après une première attaque de l’Iran contre Israël en avril, reste ainsi contenu autour de 75 dollars. Explications.
Le crainte d’un embrasement a fait grimper les cours...
L’envoi d’environ 200 missiles iraniens mardi contre Israël fait craindre une guerre ouverte entre les deux puissances régionales.
«Le marché s’attend désormais à une réponse d’Israël», relève Ricardo Evangelista, analyste d’ActivTrades, pour qui un conflit à grande échelle ferait immédiatement grimper les cours.
«Une riposte d’Israël et de son allié inconditionnel, les Etats-Unis, pourrait inclure des dommages, voire la destruction des installations pétrolières iraniennes», développe Tamas Varga, analyste chez PVM, qui se base sur des informations du média américain Axios.
Or, l’Iran fait partie des dix plus grands producteurs de pétrole et possède les troisièmes réserves prouvées derrière le Venezuela et l’Arabie saoudite.
C’est majoritairement ce risque sur l’or noir iranien qui a entraîné une augmentation du baril de près de cinq dollars depuis mardi.
...mais Téhéran et Washington n’en veulent pas...
Plusieurs investisseurs établissent un parallèle entre l’attaque de mardi et celle de l’Iran contre Israël le 13 avril, sans suite concrète, et qui n’avait pesé que deux semaines sur les cours.
«Nous continuons de croire qu’une guerre prolongée (entre l’Iran et Israël, NDLR) est improbable», estime Naeem Aslam, pour qui Téhéran a avant tout réagi pour la forme, sans volonté d’envenimer la situation.
«Notre opération est terminée et nous ne comptons pas continuer», a d’ailleurs clarifié le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi.
Déjà sous le coup de sanctions internationales, l’Iran semble vouloir limiter son implication dans le conflit, estiment les analystes. Téhéran avait déjà rejeté lundi l’éventualité d’un déploiement de combattants au Liban et à Gaza.
A un mois de l’élection présidentielle, le gouvernement américain aurait lui aussi beaucoup à perdre d’une guerre totale. «L’administration Biden ne laissera pas les prix du pétrole s’envoler», avance John Plassard, de Mirabaud, interrogé par l’AFP.
Une conviction de nature à rassurer le marché sur l’ampleur de la riposte israélienne.
...la demande chinoise s’essouffle...
La demande de pétrole est plombée depuis des mois par le ralentissement économique de la Chine, premier importateur mondial, qui inquiète les marchés.
Les récentes mesures de relance annoncées par Pékin ne semblent pas y avoir changé grand-chose.
«Pour inverser la tendance, il faudrait une hausse de la demande des consommateurs et une solution à la crise de l’immobilier», explique Jorge Leon, analyste chez Rystad Energy.
Et face à cette demande chinoise en berne, l’offre de pétrole est elle abondante: deux dynamiques qui poussent mécaniquement les cours à la baisse.
...et l’offre est abondante
Selon le Wall Street Journal, le ministre saoudien du pétrole s’en est récemment pris aux membres de l’Opep+ (Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs alliés) qui ne respectent pas, selon lui, les limites de production fixées.
Avec une menace implicite: faire de même, quitte à lancer une guerre des prix pouvant faire chuter le baril jusqu’à 50 dollars, selon ses propos rapportés.
Dans l’immédiat, et en conformité avec l’Opep+, Ryad compte accroître sa production à partir de décembre, avec sept autres membres, pour rétablir progressivement 2,2 millions de barils par jour.
Une perspective qui confirme la nécessité pour les principaux pays producteurs de pétrole d’augmenter leurs parts de marché, quitte à voir les prix tomber.
«En cas de chute de la production de l’Iran, l’Opep+ pourrait sûrement augmenter sa production de 3,5 millions de barils par jour», ajoute Jorge Leon à l’AFP.