«Dr Copper nous redonne une leçon d’économie»

Stéphanie Rheinboldt, Atlantic Financial Group

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L’avènement des énergies renouvelables sonne-il un nouvel âge du cuivre?

L’âge du cuivre a marqué le début de l’utilisation des métaux par l’hommme, 2500 ans av. JC. Un tournant majeur puisque les matières premières utilisées, jusqu’alors difficiles à façonner, furent remplacées par un matériau malléable au gré des besoins. Près de 4500 and plus tard, connaitrons-nous un nouvel «âge du cuivre» avec l’avènement des énergies renouvelables et la révolution numérique.

Aujourd’hui le prix du cuivre tend à prédire la santé de notre économie, d’où son surnom de Dr Copper, tant il est présent dans la production de nombreux produits et infrastructures. Le cuivre est très largement utilisé dans les équipements électriques, la construction et l’électronique.

La demande devrait accélérer

Les fondamentaux pour les entreprises impliquées dans cette industrie s’améliorent. Les systèmes d’énergie renouvelable nécessitent cinq fois plus de cuivre que l’énergie conventionnelle et un véhicule électrique peut contenir un kilomètre de fil de cuivre, soit quatre fois plus qu’un moteur à combustion. Selon un récent rapport de McKinsey, la consommation de cuivre pourrait augmenter de 43% d’ici 2035, soutenue par les politiques destinées à réduire l’empreinte carbone.

L’offre est en déficit structurel à moyen-terme

En début d’année dernière, l’approvisionnement des mines a été fortement perturbé par l’émergence de la crise du Covid-19, réduisant les importations de ferraille vers la Chine. Celle-ci a réagi en augmentant ses inventaires de cuivre raffiné. Cependant, ces importations sont venues alimenter les stocks stratégiques et risquent peu de se retrouver sur le marché prochainement. La Chine représente à elle seule 50% de la demande globale de cuivre raffiné.

L’approvisionnement en cuivre sera probablement
limité par le vieillissement des actifs.

La croissance mondiale attendue en 2021 devrait engendrer un déficit structurel de l’offre de cuivre par rapport à la demande provenant de Chine et des pays, qui font le pari de la relance économique via des investissements massifs dans les infrastructures, l’électrification et les énergies renouvelables.

Les analystes de Goldman Sachs s’attendent à ce que le marché du cuivre affiche un déficit de 327 kt en 2021 et selon Reuters le déficit devrait perdurer en 2022 et 2023.

En effet, l’industrie minière a peu investi dans l’exploration ces dix dernières années et la pénurie de projets devrait soutenir les prix du cuivre dans les années à venir. Le Chili et le Pérou, tous deux gros producteurs de cuivre, ont été durement touchés par la pandémie de Covid-19, avec des confinements longs et sévères puis par des grèves et des conflits du travail au troisième trimestre. La production a ainsi été perturbée. Début septembre, les stocks des entrepôts du LME étaient à leur plus bas niveau depuis 2005.

À plus long terme, l’approvisionnement en cuivre sera probablement limité par le vieillissement des actifs, la baisse de la teneur en minerais des gisements et la diminution des projets. Pour satisfaire la demande, l’industrie devra donc non-seulement continuer d’exploiter des mines mais également augmenter le pourcentage de recyclage du minerai déjà extrait.

Les producteurs de cuivre

Les minières ont commencé l’année sur les chapeaux de roues grâce à leur forte corrélation au prix du cuivre. Le Stoxx Europe 600 Basic Resources index est le secteur qui affiche la meilleure performance depuis le début de l’année et depuis les plus bas de mars 2020, en hausse respectivement de 14.2% et +118%.

Malgré cette forte surperformance par rapport à l’indice Stoxx Europe 600, le secteur se traite encore à un discount de 47% par rapport à l’indice en termes de EV/EBITDA, soit 6x vs. 11.3x. La moyenne historique évolue autour d’un discount de 27% sur ces 10 dernières années.

Les matières premières offrent une bonne protection
en cas de cycle inflationniste.

Les plus gros producteurs de cuivre sont Codelco, Glencore et BHP Billiton. Parmi les compagnies les plus exposées au cuivre, on trouve Antofagasta, Freeport McMoRan et Lundin Mining avec respectivement 90%, 80% et 66% de leurs revenus provenant de l’exploration et de la production de cuivre.

Les compagnies minières bénéficient de bilans solides et la hausse du prix des matières premières laissent envisager une augmentation des dividendes et des rachats d’actions. Le rendement des flux de trésorerie est actuellement proche de 8% pour le secteur et pourrait augmenter alors que les dépenses d’investissements restent limitées. Parmi les compagnies offrant déjà des rendements de dividendes et flux de trésorerie élevés se trouvent Southern Copper, Rio Tinto, et BHP Billiton.

Les matières premières offrent une bonne protection en cas de cycle inflationniste. D’autre part, elles devraient continuer de s’apprécier au fur et à mesure que l’économie redémarre même si l’inflation sous-jacente reste faible.

Nous avons certainement entamé un nouvel âge du cuivre qui pourrait durer plusieurs années, voire plusieurs décennies. Ce nouveau cycle est soutenu par une demande solide et accélérée tandis que l’offre pourrait rester en deçà, le temps que l’exploration minière s’ajuste à la demande.

Les performances des minières productrices de cuivre pourraient perdurer et pousser les valorisations à la hausse.

Forte corrélation des valeurs minières au cuivre

Source: Bloomberg, Atlantic Financial Group

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