Pas une discussion ne s’est déroulée sans qu’il ne soit mentionné. Donald Trump, bien que pas sur place, a été omniprésent durant le WEF cette semaine. La rencontre a pris des allures de procès contre l’UE, sous pression. La Suisse a également mis cette dernière en garde.
L’allocution du président américain diffusée en ligne jeudi a été le point d’orgue du Forum économique mondial (WEF) durant lequel dirigeants et patrons ont passé leur temps à spéculer sur les conséquences de l’investiture américaine.
Le républicain a, pendant 45 minutes, déroulé son programme, menaçant une nouvelle fois le reste du monde de lui imposer de lourdes taxes s’il n’investit pas aux Etats-Unis. Il a en particulier ciblé l’UE, dénonçant des lourdeurs administratives. «L’Europe nous traite de manière trop injuste», a-t-il dit face à une tribune qui l’a à plusieurs reprises applaudi.
Le Vieux Continent a été l’autre éléphant dans la pièce à Davos. Les critiques et mises en garde, parmi lesquelles celles du président ukrainien Volodymyr Zelensky, ont été nombreuses. Bien consciente de l’enjeu de la semaine, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a affiché une Europe transformée, «ouverte aux affaires» au lancement du forum.
La Suisse entre deux feux
Cette lutte de pouvoir entre Bruxelles et Washington a passablement inquiété la Suisse, entre deux feux. Celle-ci ne veut pas se retrouvée pénalisée par des politiques contradictoires, comme c’est déjà arrivé par le passé.
La présidente de la Confédération Karin Keller-Sutter et le ministre de l’économie Guy Parmelin ont multiplié les rencontres avec des représentants de l’UE, dont Mme Von der Leyen, pour les mettre en garde. Ils s’inquiètent surtout de l’imposition minimale des multinationales voulue par l’OCDE, que la Suisse applique depuis janvier 2024. Le président américain a menacé de représailles économiques tous les pays qui l’appliquent encore.
Face aux différentes stratégies de pouvoir qui se sont jouées entre les grandes puissances, la Suisse a assuré ses arrières en soignant ses relations économiques avec de nombreux pays, dont l’Ukraine mais aussi l’Argentine. Mme Karin Keller-Sutter a rencontré le président argentin Javier Milei, allié de Trump, avec qui elle a abordé l’accord entre l’AELE et le Mercosur, qui serait très profitable à la Suisse.
M. Parmelin a lui multiplié les rapprochements avec les pays d’Asie ainsi qu’avec la Grande-Bretagne. Le Vaudois a aussi en ligne de mire l’accord de libre-échange avec les Etats-Unis, avec qui il veut prendre contact «le plus vite possible».
Proche-Orient au second plan
Outre l’UE, d’autres puissances se trouvent dans une position délicate face à la nouvelle administration américaine. Le président du Panama, dont le canal est convoité par Donald Trump, a réaffirmé à Davos son opposition totale aux ambitions du républicain.
La Chine, économiquement en difficulté, s’est aussi défendue face aux taxes faramineuses que le gouvernement américain veut lui imposer. Le vice-premier ministre Ding Xiuxiang a livré un plaidoyer contre le protectionnisme dans la station grisonne. Une aubaine pour Karin Keller-Sutter, qui en a profité pour donner un coup de pression supplémentaire à Pékin sur les droits de douane encore appliqués sur les exportations suisses.
Le Proche-Orient, où un cessez-le-feu a démarré juste avant le WEF, a lui été relégué au second plan, malgré la présence de plusieurs dirigeants de la région.
Le ministre des affaires étrangères Ignazio Cassis en a rencontré quelques-uns, ainsi que son homologue syrien Assad Hassan Al Shibani, pour connaître les prochaines étapes de la transition du gouvernement en place depuis le renversement de Bachar el-Assad. Les réponses ont toutefois été «très vagues». Les sanctions suisses à l’encontre de la Syrie seront donc pour le moment maintenues, a déclaré le Tessinois.