Urs Rohner pointe des méthodes de mesure ESG trop disparates

AWP

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Les instituts bancaires sont aujourd’hui confrontés à un «paysage fragmenté» en matière de durabilité, a affirmé le président de Credit Suisse.

La transition vers une économie durable est encore entravée par plusieurs obstacles, estime le président du conseil d’administration de Credit Suisse, Urs Rohner, pointant du doigt la grande disparité des méthodes de mesure des normes ESG, mais aussi des dispositions réglementaires.

Les instituts bancaires sont aujourd’hui confrontés à un «paysage fragmenté» en matière d’ESG (Environment, Social, Governance), a affirmé jeudi le président de la banque aux deux voiles dans le cadre d’un évènement en ligne organisé par le Swiss Finance Institute à Zurich. Selon lui, les méthodes de mesure sont très hétérogènes et les données souvent peu fiables.

Se référant à une étude du prestigieux MIT (Massachusetts Institute of Technology), il assure que les notes de cinq importants organes de certification ne montrent une corrélation que de 60%, contre 99% pour les ratings de crédit des trois principales agences de notation.

Patchwork réglementaire

La fragmentation des conditions-cadres réglementaires constituent également un obstacle, a poursuivi le dirigeant, déplorant le véritable «Patchwork» que représentent les dispositions réglementaires en matière d’ESG sur les différents marchés. Cela complique l’investissement global dans des solutions durables et implique le risque de lacunes de financement.

Selon Urs Rohner, un important jalon réglementaire est certainement le plan d’action pour le financement de la croissance durable arrêté par l’Union européenne (UE) en 2018. La taxonomie européenne influence également d’autres juridictions, selon le dirigeant, louant au passage les progrès significatifs réalisés par la Suisse avec ses propres conditions-cadres en matière d’ESG.

Le changement climatique représente un défi majeur pour les différentes industries, a encore rappelé M. Rohner. Selon lui, Credit Suisse a reconnu la nécessité d’une transition vers les sources d’énergie renouvelables, mais la banque préfère s’appuyer sur un «processus de transition» des anciennes sources d’énergie vers les nouvelles, et non sur une politique d’abandon abrupte.

Tennis climatique

Le numéro deux bancaire helvétique avait fait les gros titres en novembre 2018 justement pour avoir été pris pour cible par des militants du climat, qui s’étaient adonnés dans une agence lausannoise à une partie de tennis sauvage pour dénoncer ses investissements dans les énergies fossiles.

Huit mois après leur acquittement par le tribunal de Renens, les activistes avaient été condamnés en appel en septembre dernier à des peines pécuniaires avec sursis, la justice vaudoise estimant que les douze jeunes n’avaient pas agi en état de nécessité et qu’il existait d’autres moyens pour agir contre le réchauffement climatique.

Les avocats des prévenus avaient au contraire défendu l’action de désobéissance civile de leurs clients, la jugeant légitime pour dénoncer les investissements de Credit Suisse, et avaient dit envisager un recours au Tribunal fédéral, voire devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).

Financements critiqués

La polémique autour du financement durable est également prégnante dans d’autres pays. Pas plus tard que mercredi, la banque Barclays a été pointée du doigt par un réseau d’ONG pour sa participation au financement des énergies fossiles, malgré ses promesses sur le climat.

Selon des chiffres compilés par Rainforest Action Network (RAN), l’établissement britannique aurait octroyé au total 24,58 milliards de dollars de soutien financier et de prêts aux entreprises du secteur entre janvier et septembre, soit 200 millions de plus que la même période l’an passé.

Sous la pression de ses actionnaires, Barclays s’était pourtant engagée à la neutralité carbone d’ici 2050 et à financer seulement des projets conformes aux accords de Paris sur la lutte contre le réchauffement climatique.

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