La BCE plus pessimiste sur l’économie en zone euro

AWP

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Mario Draghi a souligné que les derniers indicateurs économiques «continuaient à être plus faibles que prévu», ce qui pèse sur les perspectives de croissance «à court terme».

La Banque centrale européenne a noirci jeudi son jugement sur l’économie en décrivant un climat truffé d’incertitudes, tout en assurant garder des «instruments» dans sa manche si cette dégradation devait s’accentuer.

«A l’unanimité», le conseil des gouverneurs a reconnu «l’essoufflement de la dynamique» en zone euro et estimé que les risques pesant sur la conjoncture avaient augmenté, a déclaré Mario Draghi, président de l’institution, devant la presse.

Dans le langage codifié de l’institution, un tel discours témoigne «clairement» d’un pessimisme accru, décrypte Carsten Brzeski, économiste chez ING.

La BCE fait ainsi écho à l’avertissement lancé lundi par la directrice du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, pour qui «le risque d’un recul plus prononcé de la croissance mondial a augmenté».

Parmi les craintes du moment, Mario Draghi a évoqué les «menaces protectionnistes», le flou sur le Brexit, les développements politiques dans «certains pays de la zone euro», le ralentissement en Chine et les déboires du secteur automobile allemand.

Plus généralement, la BCE s’inquiète de la «persistance de l’incertitude», susceptible de paralyser l’investissement et de compromettre l’activité future, tout en entretenant la fébrilité des marchés.

«Boîte à outils»

Jeudi, l’indice PMI mesurant l’activité privée en zone euro est encore venu ternir le tableau en tombant à son plus bas niveau depuis juillet 2013, suggérant une quasi-stagnation en janvier.

Soucieux de rassurer, Mario Draghi a néanmoins insisté sur le fait que le risque de récession restait «faible» aux yeux du Conseil des gouverneurs, balayant pour l’heure les scénarios les plus noirs.

Surtout, le banquier italien a assuré que l’institution n’était «pas à court d’instruments» pour réagir à une dégradation durable, même si elle vient de mettre fin à son programme historique de rachats de dette publique et privée.

Non seulement les rachats d’actifs font désormais partie de la «boîte à outils» de la BCE, et peuvent donc être réactivés, mais l’institut peut aussi accorder aux banques de la zone euro de nouveaux prêts géants, a détaillé M. Draghi.

Dans l’immédiat, la BCE a maintenu ses taux directeurs au plus bas, soit à zéro pour le taux de refinancement des banques et à -0,40% sur les liquidités excédentaires déposées à son guichet.

L’institut a répété que ces taux ne bougeront pas «jusqu’à l’été 2019 au moins», avant ce qui serait le premier tour de vis monétaire depuis juillet 2011, une action risquée si l’économie patine.

Prêts géants

Pour Carsten Brzeski, il faudra sans doute «attendre la réunion de juin» pour y voir plus clair, même si une hausse des taux avant le départ de Mario Draghi en octobre paraît d’ores et déjà peu probable.

Le marché a de son côté calé ses attentes de resserrement monétaire sur un horizon encore plus éloigné, allant de la toute fin 2019 à 2020, voire 2021.

Dans les mois qui viennent, la BCE va étroitement surveiller l’inflation en zone euro, seul objectif officiellement à son mandat, qui a ralenti à 1,6% en décembre.

L’institution reste néanmoins «confiante» dans la perspective de voir les prix remonter autour de 2%, grâce à la bonne tenue de l’emploi et des hausses de salaires, a expliqué le banquier italien.

Rien de concret n’a filtré sur les modalités d’une prochaine vague de prêts géants aux banques, dont le principe semble pourtant «acquis» selon Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

Le calendrier et les modalités de ces prêts, qui pourraient être la prochaine mesure décidée par la BCE, «dépendront des conditions économiques et financières des prochains mois», estime M. Ducrozet.

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