La croissance, les exportations ou le chômage du Royaume-Uni ont tous déçu en avril, plaçant sous pression le gouvernement travailliste, en quête de relance économique. Les droits de douane américains et les récentes hausses d’impôts sont mis en cause.
Ces difficultés pèsent lourd pour le gouvernement travailliste, qui vient tout juste de présenter ses grandes orientations budgétaires pour les années à venir, avec notamment des milliards de livres d’investissements censés doper l’économie, mais est déjà attaqué sur le réalisme de ses projets.
Outre l’annonce en début de semaine d’une hausse du chômage en avril, à 4,6%, l’exécutif doit faire face jeudi à un produit intérieur brut (PIB) britannique en recul de 0,3% le même mois, une baisse plus importante qu’attendu. Il avait progressé de 0,7% au premier trimestre.
Les exportations vers les Etats-Unis ont par ailleurs connu une baisse record en avril, a également indiqué l’Office national des statistiques (ONS) jeudi.
«La croissance britannique a été assombrie par les droits de douane américains», tranche Kathleen Brooks, directrice de recherche pour XTB, qui rappelle que des constructeurs automobiles comme Jaguar Land Rover ont temporairement dû interrompre leurs expéditions vers les Etats-Unis.
Chiffres «clairement décevants»
De fait, le mois d’avril a vu l’entrée en vigueur des droits de douane de 10% imposés au Royaume-Uni et à d’autres pays par Donald Trump, ainsi que des taxes de 25% sur l’automobile.
Ils s’ajoutaient à des taxes déjà en vigueur sur l’acier et l’aluminium, initialement fixés à 25%.
Londres a beau avoir conclu début mai un arrangement commercial avec Washington pour y échapper partiellement, celles-ci sont toujours en vigueur, les négociations n’ayant en réalité pas totalement abouti.
«Notre mission première est de générer de la croissance», a réagi jeudi dans un communiqué la ministre des Finances Rachel Reeves, qui reconnait des chiffres «clairement décevants».
Mais elle promet que les investissements sur plusieurs années qu’elle a présenté mercredi dans le cadre de son exercice de réorientation budgétaire amélioreront la situation.
Le gouvernement a en effet assoupli ses règles budgétaires pour s’autoriser à investir davantage, prévoyant 113 milliards de livres (132 milliards d’euros) supplémentaires sur cinq ans dans la tech, la défense ou le nucléaire.
Le plan présenté mercredi, qui ne se limite pas aux investissements, vise aussi à réajuster des dépenses courantes de l’Etat. La santé et la défense sont désormais la priorité, tandis que les affaires étrangères et les transports devront se serrer la ceinture.
Voitures et métaux
En plus de la guerre commerciale, les mauvais chiffres économiques d’avril peuvent s’expliquer par l’entrée en vigueur au début du mois des fortes hausses d’impôts décidées par les travaillistes, notamment les cotisations patronales, dont se plaignent les entreprises.
Selon les Chambres de commerce britanniques (BCC), 82% des entreprises du pays pensent que cette hausse «aura un impact sur leurs opérations, affectant les investissements, le recrutement et les prix».
Selon nombre d’économistes, ces hausses ne seront peut-être pas suffisantes pour équilibrer les comptes et la Chancelière de l’Echiquier (titre officiel de Mme Reeves) pourrait à nouveau devoir augmenter les taxes lors du prochain budget, à l’automne, ce qu’elle a toujours écarté jusqu’ici.
Interrogée jeudi sur la radio LBC, elle a botté en touche: «Je pense qu’il serait très risqué pour une Chancelière de tenter d’écrire par avance des budgets dans un monde aussi incertain que le nôtre.»
Selon l’ONS, les exportations de voitures et de métaux vers les Etats-Unis ont contribué à la baisse des échanges commerciaux en avril. De manière générale, l’économie a pâti du recul de l’activité à la fois dans le secteur des services et l’industrie manufacturière.
«L’activité économique devrait rester atone jusqu’à la fin de l’année», prévoit Yael Selfin, économiste en chef chez KPMG UK. «Cependant, la solidité relative des finances des ménages devrait soutenir les dépenses et constituer un moteur essentiel de la croissance» pour le reste de l’année, selon elle.